En termes de metal extrême, certains cherchent à sortir des sentiers battus et à explorer des domaines sinon insoupçonnés, tout du moins peu explorés. Si le phénomène est bien connu dans le black avec des myriades de groupes ayant complètement travesti l'essence du style (ou du moins certains le pensent), c'est moins le cas dans le death metal, plus souvent tourné vers le tout technique ou le old-school. Mais quelques courageux se sont frottés et se frottent encore à cet exercice périlleux avec plus ou moins de bonheur, avec la difficulté de réussir à conserver une puissance intacte derrière les pérégrinations progressivo-avant-gardistes.
Les Hollandais de
The Monolith Deathcult font probablement partie de ceux qui ont poussé le plus loin la démarche avec plus ou moins de bonheur, étant passés directement du monstrueux et complètement décadent « Triumvirate » au poussif et surjoué
Tetragrammaton, qui perdait vraiment en intensité et faisait avorter nombre d'espoirs basés sur eux...
Deux ans après ce pétard semi-mouillé semi-trempé, les Hollandais reviennent avec un EP «
Bloodcults » toujours sur Season of
Mist, et qui leur offrira une certaine amplitude pour s'exprimer, puisqu'il dure quarante minutes soit, largement plus qu'habituellement pour l'exercice.
Une des premières choses qui apparaîtra au fur et à mesure des compositions, c'est que les Bataves ont tiré les leçons d'une partie des critiques ayant heurté
Tetragrammaton. Et, sur les six titres axés death metal qui occupent le début de cet album, le groupe a cherché à mettre ses œufs dans le même panier, celui de la puissance, pas d'introduction flonflon durant vingt plombes, pas de passages complètement foutraques plombant la dynamique en milieu de morceau. Le groupe a fait un effort pour remettre les riffings et la rythmique au centre des débats et c'est bien par la furie dévastatrice que ces morceaux parleront.
L'accompagnement est toutefois là avec des passages orchestraux sympathiques soutenant la rythmique, avec parfois un côté pompeux que n'auraient pas renié les Japonais de
Sigh (« Der
Hexenhammer » ou encore des arrangements electro avec boîte à rythme hardbeat sur «
Doom of the Tawuzê Melek »). Il n’empêche que l'ensemble demeure plus épuré que par le passé et que le tout finit par sonner plus scolaire, moins foufou que sur « Triumvirate », hormis sur « Reign of
Hell » qui, avec ses claviers et son interlude en russe, fait figure de titre phare.
Pour le reste, le groupe s'est concentré sur l'expression de son death metal avec ses riffings tranchants devant une batterie furieuse, tout en tirant le meilleur de ses deux vocalistes avec les quelques passages-clefs sur lesquels la harsh vocal aiguë viendra se substituer avec vigueur au growling dominant sur l'album. On a droit à un regain d'intensité par rapport à l'album précédent, mais on n'est pas réellement surpris, en tout cas, si on connaît ce que le groupe a fait par le passé.
En fait, les seuls moments vraiment surprenants de la part du groupe sont les deux derniers morceaux, qui déparent réellement : «
Die Waffe Mensch RMX », un espèce de gros trip indus assez chiant (et je suis loin d'être le plus grand adversaire de l'indus), et pourtant ceux qui sont aux manettes de ce remix, en l'occurrence le groupe
Schwarzblut, est plutôt bon par ailleurs. Mais là, il est difficile de s'intéresser à cette prestation opaque, répétitive et sans envergure, et surtout à une version acoustique de « Den Ensomme Nordens Dronning », absolument méconnaissable, dans une optique latino-flamenco-obscure, assez sympathique même si gadget...
Au final, ce
Bloodcults ne suffira pas à lui seul à dissiper les doutes quant à l'avenir de «
The Monolith Deathcult ». Il s'agit d'un EP dont on peut dire qu'il est bon, mais également qu'il n'apporte pas grand chose de neuf à l'oeuvre des Bataves. Après avoir été révolutionnaire puis décevant par trop de n'importe quoi, le groupe s'avère ici finalement assez attendu. Les titres sont bons, l'ambiance est au rendez-vous, mais on s'attendait (ou tous du moins, moi) à être surpris ou à voir encore une nouvelle dimension émerger de ce qui fut. Au contraire, on a l'impression, sans encore tourner en rond, que le groupe a atteint son paroxysme, et on peut craindre que les manœuvres du combo pour persister dans son message ne soient que de vaines tentatives pour éviter la chute.
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