Il est évident que la musique symphonique est devenue, avec le temps, l’une des composantes essentielles de la musique metal, et un complément parfait à cet art pour lui offrir un paradoxe, une antinomie et une association initialement grotesque mais finalement logique.
Le succès et l’essor de groupes comme
Nightwish,
Within Temptation ou
After Forever ont également permis de mettre en avant, en plus de la présence d’orchestre, les femmes au premier plan d’un courant encore majoritairement masculin. De ce fait, le genre fut pillé pendant une dizaine d’année de toutes parts, les groupes se multipliant et bourgeonnant à tout va, pour le meilleur mais surtout pour le pire. En effet, que ce soit dans l’exigence de l’instrumentation ou l’excellence vocale que requiert le style, le metal symphonique reste un domaine relativement élitiste, ou l’erreur est difficilement acceptable. Les nombreux
Magica,
Visions of Atlantis ou encore
Amberian Dawn (pour les plus connus) souffrent donc de ce manque chronique de talent individuel, de moyens techniques pour mener à bien le périple artistique que de constituer un opus solide et ambitieux de véritable metal symphonique.
Très attendu, le second album des français de
Whyzdom, intitulé "
Blind ?" est donc actuellement scruté comme l’un des possibles étendards du genre dans nos contrées. Musicalement, l’album démontre très rapidement que les moyens ont été donnés pour que la production sonne massive et épaisse, que ce soit pour l’instrumentation metal ou la puissance orchestrale des symphonies. Les maitres en la matière que sont
Nightwish pour distiller cette alchimie parfaite sont une influence évidente, et cela se ressent également dans le jeu de guitare de Vynce et Régis, pouvant évoquer celui d’Emppu Vuorinen. La présence de chœurs assez ambitieux, et d’orchestrations à chaque instant, montre bien que
Whyzdom a voulu aller dans ses derniers retranchements pour créer un mastodonte du genre, et ne plus faire dans la figuration.
L’unique écoute de "Dancing with
Lucifer" suffit à se faire souffler par l’élan épique et les chœurs impressionnants qui ont été enregistrés, tout comme le jeu incisif et précis des guitaristes qui insufflent beaucoup de dynamisme à l’ensemble. L’introduction presque médiévale de "Cassandra’s Mirror" ne sera pas sans évoquer les voyages transalpins que peuvent nous offrir
Rhapsody of
Fire ou leurs compères, même si nous y verrons ici plus un moyen de varier les plaisirs et les paysages sonores.
Cependant, si musicalement, tout semble extrêmement bien en place, des guitares à la batterie en passant par les arrangements, ce n’est pas encore exactement le cas concernant la chanteuse Elvyne Lorient, qui dévoile ses limites sur ce même "Cassandra’s Mirror" par exemple. Relativement peu en voix, possédant un timbre manquant naturellement de puissance, de charisme ou simplement de pureté, elle manque singulièrement de chaleur ou d’âme et ne parvient pas à porter suffisamment la musique pour l’emmener à l’étage supérieur (les vocalises sur le pré-refrain en sont le meilleur exemple). Lorsque l’on débute le voyage de l’immense "On the
Road to
Babylon" (plus de huit minutes), il est difficile de ne pas se laisser embarquer par la puissance symphonique, le lyrisme (les chœurs sont véritablement monumentaux) et surtout par le riff impitoyable qui se met très rapidement en place. Mais lorsque Elvyne intervient…que ce soit la ligne vocale en elle-même (quelle idée de chanter de manière syncopée sur un titre aussi épique ?) ou simplement le timbre…rien ne colle. Elle apparait comme un corps étranger qui dessert la musique, même s’il est évident qu’elle possède un talent propre. Simplement que sa personnalité n’est pas du tout en symbiose avec la richesse musicale de l’instrumentation. L’emphase mélodique du refrain, traversé par de superbes guitares lead, lui permet pourtant de prendre plus d’assurance, notamment avant des soli à l’efficacité redoutable, faisant augmenter significativement la puissance de la composition.
Fondamentalement, il est indispensable de louer l’incroyable abatage qui a été réalisé sur ce "
Blind ?", clairement l’un des albums de metal symphonique les plus ambitieux et bien réalisé dans le domaine (auquel on pourrait ajouter, bien que différent, le fameux "Cybion" de
Kalisia). Une fois de plus, juste l’introduction du dantesque "
Cathedral of the Damned", culminant à presque onze minutes, suffit à se dire que l’on tient réellement un groupe maîtrisant superbement son sujet. Les chœurs, les mélodies et cette faculté de sonner presque comme une bande originale de film sans que cela soit brouillon ou immature…mais il y a toujours, malheureusement, cette vocaliste qui ne peut pas porter les compositions, qui se veut comme un élément perturbateur, extérieur à la magie du groupe. Une fois de plus, il n’est pas question de remettre en cause sa technique, mais véritablement son inadéquation avec le groupe, faisant qu’il manque invariablement l’étincelle de magie, l’émotion supplémentaire, le « petit truc » qui enverrait inexorablement ce "
Blind ?" sur orbite.
Il est certain que beaucoup y trouveront leur compte ("
Venom and Frustration", et son ambiance plus gothique laisse s'infiltrer une aura plus sombre), et ils auraient tort de s’en priver. Je ne pourrais personnellement cesser de regretter ce point qui empêche de faire que le voyage soit complet et véritablement addictif. Car finalement, aussi ébloui que nous avons pu l’être, la fin de l’album ne donne pas nécessairement envie immédiatement de le relancer pour y plonger une fois de plus. Il s’agit là d’une tare qui pourrait rendre la vie de l’album plus courte que prévue, et qui n’est pas forcément un bon signe au vu de la durée de vie des disques actuels dans les bacs des disquaires…
Sinon à part çà, merci pour ta chronique
En ce qui concerne l'album, j'avoue que ta chronique me donne vraiment envie d'y jeter un coup d'oreille, et je t'en remercie !
"Quant à la voix d'Elvyn, on est fixé tout de suite, elle chante avec assurance, maturité et précision, aussi bien dans les graves que dans les aiguës, sa voix est mélodieuse et puissante, elle n'a pas besoin de hurler pour que la note sorte avec précision, de bonne augure … "
C'est une blague, j'espère ? si c'est pas le cas, je te conseille vivement de réécouter l'album parce que c'est tout ... sauf ce que tu décris.
Mais libre à toi de t'exprimer et de marquer un désaccord. C'est aussi le but d'une chronique d'avoir plusieurs avis
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