Si comme moi, l’annonce du split d’Unfold avait sérieusement entamé votre moral, sachez que plusieurs ex-membres du fameux groupe suisse sont de retour au sein de Vanvouver avec un premier album tout simplement mortel. Si vous vénérez Cult Of Luna, Keelhaul et Isis, "The Moment" qui vient de sortir chez Division risque vite fait de monopoliser votre platine pour un bon bout de temps. Voici d’ailleurs, pour faire plus ample connaissance, une interview en janvier 2005 avec Elie et Michael, respectivement guitariste et chanteur de Vancouver.
>Vancouver est, à la base je crois, un projet parallèle
de différents membres d’Unfold, Iscariote et Impure Wilhelmina.
Qu’est ce qui a motivé la création de ce nouveau groupe
? Ne trouviez vous pas entière liberté de création au sein
de vos différents groupes ?
E: En fait, ce sont Laurent, Alain et moi-même qui avons lancé
Vancouver, à la base comme un projet hors Unfold. Nous recherchions donc
un bassiste et un chanteur, et nous avons tout de suite pensé à
Bastien d’Iscariote et Michael d’Impure Wilhelmina. Ils ont tout
de suite accepté de harder avec nous dans les termes de l’époque,
soit enregistrer un disque et éventuellement faire quelques concerts.
Avec le split d’Unfold et celui d’Iscariote, Vancouver est devenu
notre groupe principal, sauf pour Michael, qui poursuit à première
vue l’aventure Impure.
>Depuis qu’Unfold a splitté, qu’est ce qui a
changé au sein de Vancouver ?
E: Pas grand-chose en fait, à part qu’on essaie de répéter
plus puisque nous avons un groupe et non plus deux, mais nos emplois du temps
respectifs nous limitent un peu.
>Quelles sont d’ailleurs les raisons du split d’Unfold
sans être trop indiscret ?
E: Pour aller vite, disons que cela tient à la conjonction de plusieurs
facteurs qui, ensemble, ont fait que nous avons décidé de mettre
Unfold au placard : le départ du chanteur qui en avait marre de pousser
la hurlante, l’envie qui nous manquait de rechercher quelqu’un,
un bassiste très occupé avec un autre groupe (Forceed), une série
de mauvais plans concerts, le sentiment d’avoir accompli quelque chose
de solide avec le groupe (avec la sortie d’ "Aeon Aony" notamment),
etc… Donc pas d’histoire de nanas ou de pognon, c’en est presque
navrant pour les ragots ?
>Musicalement, Vancouver est assez différent d’Unfold.
Moins lancinant et plus direct. Vancouver mise énormément sur
la basse, un instrument malheureusement souvent sous-utilisé. Quelles
sont d’après vous les différences principales entre les
2 groupes ?
E: Je pense que si tu écoutes l’album d’Unfold, tu verras
que la basse prend une place de choix dans le mix et donne pas mal de relief
aux morceaux. Nos égos de guitaristes n’étant pas du type
démesurés, nous aimons laisser beaucoup de place à la basse,
qui est selon moi, un instrument trop souvent sous-estimé, mais totalement
essentiel dans le son du groupe. Donc à mes yeux pas trop de différences
entre les 2 groupes à ce niveau. Avec Vancouver, nous composons de manière
plus rapide et spontanée. Ca nous permet de saisir l’énergie
des morceaux et de leur donner une autre couleur, alors qu’avec Unfold,
tout était très réflé
>Au niveau de la composition, comment ça se passe chez Vancouver
? Est ce difficile de composer en essayant d’offrir quelque chose de différent
de ce que vous avez fait dans le passé ?
E: On compose tout à quatre et on envoie ensuite des cdr des nouveaux
morceaux à Michael, qui a ensuite tout loisir de hurler dans son salon.
Ça se passe bien comme cela pour le moment, mais nous sommes évidemment
ouverts à toute proposition (indécente) de Michael en ce qui concerne
l’instrumentation des morceaux.
>On entend souvent dire que pour écrire ou composer, l’auteur
doit être quelqu’un de particulièrement écorché.
Utilisez vous vos blessures, vos souffrances pour avancer artistiquement ?
M: En fait je pense que c’est pas vraiment le cas dans le cadre de Vancouver
(et d’un bon nombre de groupes de rock), car la composition des morceaux
est un travail de groupe. Et de plus les textes ne sont pas écrits en
même temps que la musique. Il n’y a donc pas "d’accouchement
dans la douleur" proprement dit. Il faudrait poser cette question à
un songwriter, ou un peintre par exemple, des artistes qui produisent une création
de manière beaucoup plus personnelle.
>"The Moment", votre premier album est sorti chez Division.
Où a-t-il été enregistré ? Satisfait du son obtenu
?
M: Il a été enregistré par Patrick Matthey et mixé
par Julien Felhman, l’ingé son d’Unfold. Nous sommes très
satisfait, surtout qu’il a été enregistré en trois
jours.
>Les titres de vos chansons sont plutôt énigmatiques.
De quoi parlez-vous ? Qui écrit ? D’où tirez-vous l’inspiration
?
E: Il est vrai que nos paroles sont assez "énigmatiques". Sur
"The Moment", j’ai écrit la majorité des paroles,
qui sont volontairement très floues et peuvent parfois étonner
ou même désarçonner l’éventuel lecteur. C’est
d’ailleurs le but. Je cherche à écrire des paroles qui regroupent
mots, suites de mots, imagerie ou deuxièmes sens, dont l’ "énergie"
(qui peut être tirée par Michael) me paraît manifeste. J’utilise
pour cela une manière d’écrire peu orthodoxe (je n’en
dirai pas plus) et le résultat ressemble peu à des paroles plus
"classiques". Anecdote : une fois, on avait besoin d’un texte
avec Michael, et comme on était en train de boire un verre les deux sur
une terrasse, on a pris une feuille de papier, et on a écrit une phrase
chacun, tour à tour. On a plutôt bien rigolé et le texte
n’est pas mal du tout au final !
M: héhé, l’élan de fer se noyait dans le sang, heureusement
que je braille en anglais et qu’on y comprends rien !
>Beaucoup de plages atmosphériques émaillent le disque. A l’écoute de l’excellent "Exosphère", ça m’a fait penser au film d’Alain Resnais "On Connaît La Chanson" (je ne sais pas si tu connais ?). Pour imager l’état dépressif lattant de Dussolier, le réalisateur utilise des visions de méduses avec une musique assez inquiéta
E: Je ne crois pas que Vancouver puisse revendiquer un côté cinématographique dans ses influences. Moi, j’aime aller au cinéma et ça s’arrête là je crois. Le truc des influences cinématographiques, ça me fait toujours un peu rire et penser au groupe qui ne sait pas comment se démarquer des autres et qui se dit : "Putain, et si on disait qu’on est influencés par le cinéma ?...". Et ça débouche sur des trucs abjectes et risibles du genre Artsonic (ce groupe français pas bien), qui avait développé sur son premier album un concept totalement barge et d’une conceptualisation à l’épreuve des balles : la vie est un film (alors on se met à torse nu sur la pochette avec de l’huile sur le corps). Tu vois le topo ? Faire des trucs comme ça, ça ne nous intéresse pas. On essaie juste d’être francs et honnêtes avec notre musique et avec nous-mêmes, et on n’a pas besoin de se cacher derrière des concepts ou des influences qui ne servent qu’à être données en pâture aux médias.
>Pourquoi avoir choisi Vancouver comme nom ? Une fascination pour
cette ville ?
M: En fait non. Elie avait préparé une liste de noms pour le groupe,
on en a discuté, et plus ou moins par élimination, Vancouver à
été retenu.
>Quels sont les groupes qui vous influencent ?
E: On en a beaucoup, et elles sont changeantes. Comme on écoute tous
beaucoup de musique, on est forcément influencés par des trucs
différents selon les périodes. Ces temps pour ne prendre qu’un
exemple, on écoute pas mal de trucs plus rapides, genre Dillinger ou
des groupes de death-metal comme Behemoth. On n’arrive pas à aller
aussi vite (…!) mais on constate nous-même que de tels groupes nous
influencent puisque nos derniers morceaux sont nettement plus rapides et nerveux.
Sinon, on aimera toujours Refused, Helmet, Mastodon, Zen Guerilla, Nine Inch
Nails, Breach, Morbid Angel, Neurosis, Rage Against the Machine, j’en
passe et des meilleurs.
>La pochette et tout l’artwork intérieur sont absolument
superbes. Qui a eu l’idée de ce type de réalisation assez
originale qui utilise pliage/découpage/collage ?
M: Un fois de plus, tout s’est fait très spontanément. L’idée
vient de Fabian Sbarro, qui a réalisé l’ébauche de
l’artwork au studio pendant qu’on faisait les prises. Il s’activait
à ses petits bricolages pendant que je crachais du sang à un mètre
de lui.
>"The Portrait", la dernière chanson de l’album
est assez différente du reste (presque pop). Y a t’il un sentiment
particulier ou une idée différente que vous vouliez y faire passer
?
E: On s’est simplement dit : faisons une ballade pour les fans de Scorpions,
et comme on ne sait pas faire des solos, voilà le résultat ! Uli
Roth : ach schööönn !
>Y a-t-il des prévisions de concerts en France pour bientôt
?
E: Ben y’en a un à Lyon le 28 janvier et après c’est
le calme plat.
>Je vous laisse le mot de la fin.
Alors disons : White Snake.
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