The Gathering

interview The Gathering



Interview - Hans Rutten - promoSuperheat

Spin City n°15 - Janvier 2004




Renforcés par l\'amitié


THE GATHERING, sans doute l\'un des groupes néerlandais les plus connus et
prospères, ont sorti beaucoup de beaux albums en 10 ans de carrière. Pour
fêter cet anniversaire, un album live très réussi sortira bientôt. Quelques
chansons-phares de leurs derniers albums seront interprétés d\'une manière
magnifique et intimiste. Pendant cette période mouvementée, j\'ai eu une
conversation détendue et à coeur ouvert avec le batteur Hans
Rutten.

Es-tu fier de ce à quoi tu es arrivé jusqu\'à présent
avec THE GATHERING?

Fier est peut-être un mot mal choisi. c\'est
très beau que nous soyons arrivés si loin, mais je ne crois pas que fier est
le mot juste pour décrire cela. Il s\'agit plus d\'une impulsion pour écrire
des titres encore meilleurs, pour apprendre davantage. De temps en temps
j\'ai bien le sentiment qu\'enfin nous avons atteint l\'excellence avec notre
groupe, alors que ce n\'était absolument pas le but, car nous avons commencé
le groupe en tant que hobby. Mais pour être honnête, je ne repose pas sur
mes lauriers en étant fier.

Quelle chanson de THE GATHERING a
pour toi une signification particulière et pourquoi?

Je pense
surtout à \"Sand & Mercury\", car chaque fois que nous jouons ce titre, nous
faisons nos adieux à un de nos proches amis qui est décédé. Beaucoup de gens
trouvent cette chanson fort belle et par conséquent elle reste toujours en
principe sur notre setlist, si nous faisons un concert de durée
normale.

La question suivante est peut-être étrange:
achèterais-tu un album de THE GATHERING si tu ne jouais pas dans ce
groupe?

Dans le groupe nous nous sommes tous au moins une fois
posés cette question à nous-mêmes; je pense que oui, je pense bien que je
ferais cela. Rien que par le fait que THE GATHERING est un groupe
néerlandais je serais déjà plus curieux; on est plus enclin à encourager un
groupe de sa propre région.

Quelle est une des plus belles
histoires que tu as entendu, qu\'un fan a vécu ou a fait en rapport avec
votre musique?


Il y a longtemps un fan m\'a raconté une histoire qui m\'a ému : il avait une
amie russe vivant à Moscou, il s\'y est rendu en visite et avait emmené avec
lui 10 copies de How To Measure A Planet des Pays-Bas. Il les a
vendus à Gorky Park. L\'argent qu\'il a récolté grâce aux CDs, il l\'a alors déposé
sur le compte d\'une association caritative ; je pense que c\'était une fondation
qui aidait les victimes de la guerre en Yougoslavie. Cette histoire m\'a ému,
j\'ai trouvé vraiment fantastique qu\'il prenne cette initiative et cela ne m\'a
certainement pas laissé indifférent.


Lorsque tu dois monter sur scène pour un
concert, es-tu toujours nerveux ou es-tu devenu plutôt habitué à cela au fil
des années?

Nous jouons vraiment souvent et avons déjà une
solide expérience, mais je n\'aurai jamais un sentiment de détente semblable
à celui de rester dans le jardin à travailler. Il y a encore toujours une
certaine tension lors d\'un concert et il faut aussi qu\'il y en ait, je
pense, cela ne doit pas devenir une routine. Nous avons besoin d\'une
certaine énergie pour jouer notre musique. Si cette énergie ou cette tension
est absente, les auditeurs le remarqueront immédiatement. Je pense que les
footballeurs ressentent cette même tension quand le coup d\'envoi d\'un match
est donné; une certaine pression repose alors sur tes
épaules.

J\'ai assisté de nombreuses fois aux concerts de ton
groupe et quelque chose que j\'ai toujours trouvé bizarre est le fait
qu\'Anneke ne dit presque rien entre les morceaux. Est-ce qu\'elle
n\'introduira jamais un morceau, ni ne dira un petit mot? Ou est-ce que cela
a à voir avec de la timidité?

Anneke est arrivée pour
Mandylion. Il s\'agissait d\'un album malgré tout très spirituel.
La musique possède une certaine spiritualité; j\'ai un jour lu une critique
qui parlait d\'une ambiance sacrée et religieuse lors de nos concerts.
Nighttime Birds était un album plus léger, dirons-nous, et à
présent Anneke pourrait bien dire un petit mot entre les morceaux, mais,
pour une raison ou une autre, elle ne parvient pas à le
faire.

Envers qui ou quoi peux-tu porter de
l\'admiration?

Je peux avoir de l\'admiration pour les vieux de la
vieille, quelqu\'un comme Lemmy de MOTÖRHEAD ou Ozzy de BLACK SABBATH, ils
sont simplement des légendes vivantes. Ces deux gars me semblent tout
bonnement survivre à tout, ils ont déjà vu tant de choses de toutes les

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couleurs et pourtant ils restent toujours debout. J\'ai en fait un grand
respect pour quiconque qui fait de la musique venant du coeur, et peu
importe qu\'il s\'agisse de musique classique, pop, symphonique, grindcore.
S\'il s\'y trouve une émotion qui peut m\'atteindre, cela est très bien. Ou les
gens qui tentent des choses inédites. Dernièrement, par exemple, j\'ai
découvert un groupe écossais expérimental, MOGWAI, qui sonne très heavy à
certains moments et très planant à d\'autres. Je trouve cela formidable! Dans
ce domaine, cela peut m\'arriver d\'être jaloux d\'un groupe comme RADIOHEAD.
Leur façon de composer est formidablement belle. J\'ai en fait beaucoup de
respect pour tous ceux vivant dans le monde de la musique. C\'est un milieu
infesté de requins, où beaucoup d\'argent circule et où le musicien est
toujours le dernier à en profiter. Un musicien se trouve toujours en
position précaire et se donne simplement à fond en insufflant une partie de
lui-même sur un album. Beaucoup de journalistes ne semblent pas vraiment en
saisir l\'importance.

Penses-tu être une bonne personne?
Penses-tu être un ami dévoué pour les autres?

Je pense que oui,
j\'essaye vraiment sans relâche de travailler sur mes défauts. On peut de
temps en temps ne pas être satisfait de certains traits de son caractère; je
trouve par exemple que je suis trop impatient. Je connais bien mes qualités
et mes défauts, et je suis en paix avec moi-même. Si l\'on s\'apprécie
soi-même, on peut aussi se lier d\'amitié avec les autres. En voyageant
autour du monde, entre autres, j\'ai appris à me connaître en profondeur dans
les situations les plus diverses, ce qui contribue à mon évolution
personnelle. Je fais de la musique dans un \"environnement protégé\" avec des
amis, mais en fait il faudrait tous les jours faire quelque chose qu\'on
trouve difficile à accomplir, dont on a peur. Cela rend la vie bien plus
intéressante.

A quel album aurais-tu aimé participer, si cela
avait été possible?

Sans aucun doute Dark Side Of The
Moon
de PINK FLOYD. Cet album est sorti en 1972 et est toujours bien
en avance sur son temps. Il est encore toujours fantastique à écouter et je
parle ici d\'un album sorti il y a plus de 28 ans. Je trouve vraiment
formidable la façon dont cet album sonne et dont les morceaux s\'enchaînent.
Le dernier album de MASSIVE ATTACK, Mezzanine, je le trouve
aussi génial, il s\'y tapit une atmosphère sombre et fascinante, qui est bien
plus ténébreuse et menaçante que celle produite par certains groupes de
black metal actuels. Mezzanine est pour moi un chef-d\'oeuvre
simplement grandiose et un tel album donne aux autres musiciens un regain
d\'émulation pour composer soi-même de la musique. PORTISHEAD possède aussi
une telle noirceur dans leur musique, bien qu\'on ait affaire ici à un groupe
rattaché à la scène pop.

Quelle importance accordes-tu à
l\'argent et à quoi aimes-tu le dépenser?

Je n\'y accorde pas une
importance très grande. Nous pouvons vivre de notre musique, mais ce n\'est
certainement pas le jackpot. Les gens pensent que nous sommes riches et ça
n\'est certainement pas le cas. Nous recevons chaque mois l\'équivalent d\'un
salaire comparable au salaire minimum aux Pays-Bas, mais j\'en suis
satisfait, car avec cela je peux faire tout ce que je veux. Comme tu le
sais, j\'ai une formation de programmeur, je pourrais gagner le triple de ce
que je gagne actuellement, mais je trouve que faire de la musique est bien
plus gai, et tant que je pourrai continuer à le faire, je le ferai. On peut
entièrement s\'évader dans la musique et c\'est simplement une des plus
chouettes choses qui existent. La plus grande part de mes dépenses est
consacrée aux CDs, je pense; la semaine passée par exemple j\'ai acheté 5 CDs
en un jour. Parfois j\'achète un CD pour mon travail; j\'ai ainsi acheté le
dernier album des SMASHING PUMPKINS. Je trouve le chanteur affreux, mais je
trouve le groupe même très intéressant et j\'essaye alors d\'écouter en
faisant abstraction du chant. ce que je ne ferais jamais pour de l\'argent,
c\'est composer de la musique à ce point commerciale qu\'elle me permettrait
de gagner beaucoup d\'argent; la musique deviendrait alors un vrai travail et
je ne crois pas en ce concept. Si THE GATHERING devait faire la musique
commerciale d\'une firme de disque, ce sera le jour où j\'arrêterais, c\'est
sûr.

Donner un concert, est-ce pour toi une manière idéale de
te délivrer de ta colère?

De temps en temps, oui. Je me souviens
ainsi d\'un concert lors de notre tournée américaine, c\'était à Detroit, je
pense, et ce n\'était vraiment pas mon jour. C\'était une très belle salle
avec des gens sympathiques mais, comme je l\'ai dit, ce n\'éta
interview The Gatheringit pas mon jour
et lorsque j\'ai pu déchargé ma frustration sur ma batterie cela m\'a fait
énormément de bien. Etre aussi intensément pris par la musique pendant une
telle demi-heure peut faire beaucoup de bien, c\'est une sorte de \"lavage\"
après lequel je me sens toujours mieux.

Quel est, selon toi,
le préjugé le plus tenace au sujet de THE GATHERING?

Que nous
sommes 5 personnes très braves qui vont sans cesse à Efteling [note de Miss
MC: parc d\'attractions très populaire aux Pays-Bas]! (rires) Nous n\'avons
pas vraiment une image sérieuse. Je trouve que c\'est bien dommage car nous
faisons cependant de la musique assez sérieuse et nous nous en occupons
sérieusement. Je ne sais pas vraiment en fait ce que les autres disent de
nous, aussi bien en positif qu\'en négatif. Les fans me disent peu de choses
à ce sujet.

Votre formation est restée stable ces dernières
années, à part le départ de Jelmer. Comment t\'arranges-tu pour que le groupe
continue à t\'intéresser? Comment continuez-vous à vous fréquenter
amicalement?

Nous étions déjà de bons amis avant de commencer le
groupe. Naturellement il y a parfois beaucoup de disputes, mais certainement
jamais un drame qui ne peut pas être réglé. Le courant passe bien entre
nous, chaque membre du groupe a une certaine vision de la façon dont la
musique doit être faite. En fait dans le groupe tout se passe avec
bonhommie. Chez beaucoup d\'autres groupes, il s\'agit souvent de quelqu\'un
qui veut faire de la musique et qui cherche d\'autres musiciens via une
petite annonce, cela est un peu plus impersonnel. Des groupes qui ont
commencé en même temps que nous, comme Gorefest ou Acrosticon, n\'existent
plus actuellement. Je pense qu\'il faut surtout imputer cela au fait que ce
n\'était peut-être pas des groupes très soudés, il ne s\'agissait pas d\'un
cercle d\'amis qui aimaient bien se voir... Ce qui est le cas en ce qui nous
concerne.

Si tu as un différend au sein du groupe, réagis-tu
autrement envers ton frère René qu\'envers un autre membre du
groupe?

Oui, car nous sommes frères, nous pouvons discuter d\'une
manière plus violente. A cet égard, René et moi sommes les plus grands
fauteurs de troubles, les plus grandes gueules, dirons-nous. Si nous voulons
absolument quelque chose, nous essayons avec beaucoup de passion, de flamme
et de feu d\'imposer notre avis. Heureusement les autres sont plus calmes
là-dessus et aussi plus faciles à vivre. Si notre groupe était composé de 5
personnes comme nous deux, il n\'aurait pas survécu très longtemps, je le
crains! (rires)

La période la plus dure pour THE GATHERING
est peut-être encore toujours l\'époque d\'Almost A Dance, votre
deuxième album qui était qualifié de \"plutôt médiocre\" à
\"mauvais\"...


Absolument. A cette époque, nous ne savions pas exactement ce que nous allions
faire : jeter le manche avant la cognée ou aller de l\'avant. Heureusement nous
avons fait le deuxième choix. Pendant cette période qui devait être médiocre
et pour laquelle je n\'ai absolument aucun regret, nous n\'étions vraiment pas
là où nous sommes actuellement. Je me souviens encore d\'un concert au Paradisio
d\'Amsterdam lors de la tournée de promotion de cet album: une partie du public
nous avait appréciés, mais le reste nous avait directement sifflés. Cette soirée,
ainsi que le fait que ces gens nous avaient laissés tomber, m\'ont fait réfléchir.


Jusqu\'à quel point oserais-tu appeler THE
GATHERING le groupe amateur né en 1989?

Nous avons beaucoup
appris, mais notre objectif reste le même: faire de la musique plus ou moins
dure mais porteuse d\'émotions et avec certains passages calmes.
Always avait déjà tout cela, mais dans un \"emballage\"
différent. Des titres comme \"Stonegarden\" ou \"Always\" sont aussi un peu
calmes de par leur construction. Je suis persuadé que cela n\'a pas beaucoup
changé, nous expérimentons un peu plus désormais. Je pense que nous
réussissons à faire passer notre message grâce à la passion que nous
insufflons à notre musique. Et cette passion est la même que celle qui nous
animait il y a 10 ans.

Pour conclure, dirais-tu que tu es
chanceux?

Je me pose souvent cette question et je crois bien que
oui. Il y des jours moins roses, mais tout le monde a ses hauts et ses bas.
J\'ai tout le loisir de faire ce que j\'aime, faire de la musique, alors que
cela avait commencé comme un hobby. Je suis complètement libre quand je fais
de la musique, c\'est quelque chose de formidable, un sentiment très
agréable, donc je suis un homme chanceux.

size=\"4\">Propos recueillis par Steven Willens
Traduit du
néerlandais par Miss MC
>
interview réalisée par Spin City n?15

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