Step In Fluid

Qu’il est bon, lorsqu’on se retrouve parfois face à une certaine lassitude du metal conformiste que nous servent tant de groupes, de partager la fraicheur, le panache, l’originalité et le groove d’un combo comme Step in Fluid, hybride musical entre jazz et metal, composé entre autres de Harun Demiraslan (Trepalium) et Florant Marcadet (Klone), ainsi que du guitariste soliste de Sinscale et d’un bassiste de free jazz. Pour en savoir un peu plus sur l’album, sorti voici quelques mois, sur l’accueil concocté pour la musique et les concerts ainsi que les envies de ces musiciens français de plus en plus reculer, nous avons rencontré ces gars humbles, drôles, souriants et affables, juste avant un de leur concert à Poitiers. Résumé d’une jolie rencontre. [D’après les propos recueillis par GloryHoll ; rédigé par Eternalis]

interview Step In Fluid1 – Salut les gars. On va commencer simple. Pouvez-vous nous présenter Step in Fluid s’il vous plait ?
Harun : Bonsoir (rires). Je suis Harun, un des guitaristes de Step in Fluid, un des membres fondateurs avec Flo, le batteur, et Stéphane Dupé le bassiste (ndlr : Aldrick, le second guitariste, n’étant pas encore arrivé au moment de l’interview).
On a commencé à faire quelques répèts, surtout avec Florent. J’avais quelques riffs en tête, j’aimais beaucoup sa façon de jouer avec ses cymbales, son son de caisse claire et ça a tout de suite collé. Du coup, on a contacté un type de Bressuire, qui nous a lâché ensuite faute de disponibilité. Aldrick nous a rejoint à la même période…puis on a eu l’idée de sortir un ep, puis un maxi et finalement, c'est devenu un album. On a ensuite rencontré le bassiste, qui avait un groupe de funk assez réputé et avec qui on s’est de suite bien entendu. Il avait un mois pour apprendre le set avant les premiers concerts et tout s’est bien passé.


2 – Vous vous connaissiez tous avant au final ?
Florent : Harun ne connaissait pas Stephane, je le connaissais parce qu’on s’était croisé au Confort Moderne avec Klone, qui est mon second groupe. On a sympathisé, on s’est dit qu’on ferait peut-être un peu de funk ensemble un jour. Du coup, je n’ai pas hésité à l’appeler quand l’occasion s’est présentée, ça a tout de suite collé, on a fait des dates et voilà !

3 – "One Step Beyond" est très jazzy et groovy, moins métal que vos groupes respectifs tout en gardant un très gros son. Vous aviez envie de respirer musicalement parlant ?
Harun : carrément oui. Chacun de nous, dans nos groupes respectifs, sommes vraiment dans le metal donc oui, à part Stephane qui vient d’une autre école disons (rires). Dans Trepalium, il y a une voix gutturale, des rythmes très particuliers propres au death et au thrash. Flo est un peu dans le même cas, même si c’est plus rock progressif. Donc c’est vrai qu’un groupe instrumental, inspiré de la funk et du jazz, c’est assez rafraichissant. Il n’y a que Steph qui est un peu le vieux qui se met au metal (rires)

Stephane : c’est vrai que je n’avais pas forcément l’habitude du son metal. C’est un son beaucoup plus puissant, qui prend au corps. Par exemple, je n’ai jamais eu l’habitude de jouer avec des bouchons d’oreilles alors que là, j’ai dû en mettre dès le début. C’est donc vraiment une nouvelle école, autant sur scène pendant les concerts qu’en répétition et c’est vrai que c’est agréable de faire le parallèle, de comparer, vis-à-vis d’où je viens à la base.


4 – Comment définiriez-vous le style musical du groupe ?
Flo : plein plein de styles. Je pense que les metalleux diront que c’est du jazz, et les jazzeux que c’est du metal dans le principe où ce n’est pas un groupe traditionnel, ou on mélange plein de choses. C’est de la pure fusion je dirais, ça pioche dans l’esprit hip hop, funk, affro mais avec de grosses guitares metalliques pour grossir le son.

Harun : Certains en parlent aussi comme du prog…

Stephane : Pour moi c’est un mélange bien dosé parce qu’il y a un peu de tout sans que ce soit vulgaire ou cliché.

Flo : le côté jazz apparait sur des solos, des harmonies mais on n’est pas dans une recherche d’improvisation constante. On aime bien les chansons, les structures refrains efficaces même si on aime vadrouiller pour tester des choses mais je dirais que ça reste rock au fond, au sens large mais rock !

Harun : certaines chansons ont une approche, d’autres en auront des différentes donc du coup, c’est difficile à dire.
Flo : Ce qui est difficile pour définir Step, c’est aussi qu’il n’y a pas de chanteur, et c’est souvent lui qui étiquète un style sur un groupe.


5 – C’était un choix de ne pas avoir de chanteur ?
Flo : au départ oui mais maintenant…on est ouvert à tout. On se dit que c’est un peu la cour de récré donc si un chanteur ou une chanteuse venait et que ça collait, on se dit « pourquoi pas ? ».

Stéphane : l’avantage aussi de la formule quartet c’est que l’on peut facilement inviter des musiciens sur un album. On a Mathieu Metzger qui apparait, DJ Troubl' sur les scratchs…on a cette liberté de pouvoir choisir des invités et de se faire plaisir.

Harun : on peut être l’orchestre si on veut sur un morceau. Taper de manière plus pop si on trouve qu’une chanteuse a une belle voix, ou autre. On a cette ossature principale et ensuite, des invités pour colorer ou donner une dimension différente à nos morceaux. <
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6 – Votre musique reste technique tout de même, et assez alambiquée. Est-ce qu’il était important d’apporter une touche technique pour être pris au sérieux selon vous ?
Stéphane : la technique n’est pas là pour faire jolie, elle est au service des morceaux. On n’a pas envie de déballer toute notre technique juste pour impressionner le chaland, on est au service de la musique, pour faire que l’alchimie soit juste et que l’étincelle se fasse. Sans superflue.

Flo : Par exemple, dans l’album, je fais un solo de batterie à un moment donné qui peut paraître technique, mais à côté, une chanson comme « Smooth » développe un rythme presque hip hop qui ne bouge pas pendant 3min30. J’avais presque envie qu’on ait l’impression d’entendre une boite à rythme, comme dans la tradition du hip hop avec une véritable boite à rythme qui joue toujours la même chose, même si je le développe un peu plus en live. C’est vraiment pour être en cohérence avec la chose, si on doit être simple pendant trois minutes on le fera, s’il faut tartiner, on le fera aussi. Tout le monde dit que les groupes ne sont pas techniques pour être techniques, ils s’en défendent mais je pense sincèrement que ce n’est vraiment pas une fin en soi pour Step in Fluid. C’est le riff avant tout.


7 – Harun, on entend la talkbox sur l’album quelque fois, est-ce que c’est un accessoire que tu apprécies particulièrement ? Il renforce le côté jazzy…
Harun : Pour deux raisons oui. Déjà, c’est un instrument qui est empreint de la musique black, que des musiciens comme Steevie Wonder ont utilisé et qui est très cool et en même temps, ça colle au côté « cheewing gum » des riffs, un peu décalé et dure à saisir, étant donné qu’on joue sur une corde assez molle de la guitare. Du coup, ça donne un côté très organique à la musique.

Stéphane : Ça amène le côté vocal aussi, même s’il est déformé par la talkbox, il y a tout de même une chaleur vocale que l’on retrouve, même s’il n’y a pas de chanteur.

Florent : Ça crée du relief, mais on s’est autorisé à faire venir Yann Ligner (ndlr : chanteur de Klone) pour faire des textures de voix sur « Vicious Connexion ». J’ai ajouté aussi des syllabes pour faire vivre l’album simplement et la talkbox va aussi dans ce sens.



8 – Vous avez pu faire quelques concerts, comme en ouverture d’Hacride en mars dernier ou ce soir au Grand Kfé. Quelle est la réaction du public devant votre musique ?
Stéphane : chaleureuses et positives. L’accueil a été très enthousiaste !
Harun : On a fait un petit club à Rennes, c’était vraiment un bon accueil. Les gens trouvent de la fraicheur dans notre style, et c’est ce qu’on veut donner à notre public. Du coup, on garde toujours notre identité metal avec certains riffs, mais on est décomplexé, on peut faire ce qu’on veut, apporter des choses plus positives.

Florent : Oui voilà. Moi personnellement, je fais de la musique pour que les gens dansent, je n’ai pas de message particulier à faire passer. Je rêve par exemple de faire un featuring, même si ça n’arrivera jamais, avec Rihanna ou Britney Spears (rires). J’adore ce qu’elles font, j’écoute ça en me levant le matin et ça me fait triper avant d’aller jouer du Klone.

Stephane : pas moi personnellement !

Florent : Non mais, primo vous n’avez pas de gouts et deuxio, je vous emmerde (éclats de rire général)


9 – Comment s’est passé l’enregistrement de l’album ?
Harun : très bien. On s’est pas mal étalé dans le temps aussi. Il a fallu pas mal de temps avant que l’on trouve le feeling, les bonnes sensations tous ensemble.

Stéphane : ce n’était pas live donc on est tous passé les uns après les autres pour enregistrer nos parties respectives.


10 – "One Step Beyond" est-il un one shot ou doit-on s’attendre à d’autres albums pour la suite ?
Harun : On compte en faire un deuxième de manière sure. D’ailleurs, on va jouer ce soir deux titres du nouvel album. Dès que l’on aura plus de temps, dans quelques mois, après les enregistrements de Trepalium, de Klone et de Sinscale, on s’y attèlera plus sérieusement.

11 – Tu viens de rentrer en studio pour le prochain Trepalium. Peux-tu en parler rapidement ou c’est secret défense ?
Harun : C’est en cours d’enregistrement, on en est aux parties guitares pour le moment. On est super content et confiant du son qu’aura l’album, on se demandait comment cela allait se bosser avec Thibault Chaumon, mais les p
interview Step In Fluidrises batteries et guitares se sont passées nickels. On travaille lentement mais surement, et l’ensemble devrait sortir en février ou en mars prochain.

12 – Et Klone ?
Florent : On vient de terminer ces jours-ci la composition du douzième morceau, et je vais entamer l’enregistrement de mes parties lundi prochain (ndlr : interview réalisée le mercredi 5 Octobre). J’entre au Nomad Studio, à la Roche sur Yon, là où on a enregistré le Step d’ailleurs, même si ce ne sont plus les mêmes mecs qui s’en occupent. Donc ensuite, ça sera les grattes, la basse et le chant et j’espère que, vers la fin de l’année, l’album sera fini. Pour la sortie, je ne me prononce pas parce qu’on en sait encore rien et je ne voudrais pas dire de conneries. Ça dépendra des labels, des propositions de tournées et de beaucoup de facteurs indépendants de notre seule volonté, Guillaume (ndlr : Bernard, guitariste de Klone) gère très bien ça.

Harun : D’ailleurs, on risque de faire une tournée commune pour les 10 ans de Klonosphère, avec Klone et Trepalium, surement Hacride, l’année prochaine ou suivante, pour fêter tout ça. Donc tenez-vous au courant !


13 – "One Step Beyond" est sorti chez Season of Mist. Klone et Trepalium sont aussi membres du label marseillais…que penses-tu de leur boulot et des labels en général dans l’industrie du disque ?
Harun : Comme c’est un milieu en mutation, les groupes sont de plus en plus amenés à s’auto-gérer et autofinancer leurs productions. Step in Fluid a d’ailleurs fait le choix de s’auto-produire…(il hésite)…ou plutôt on a pas trouvé de labels. Guillaume qui est en partenariat avec Season of Mist vis-à-vis du Klonosphere nous a proposé une distribution, bien que l’on soit en auto-production.
Maintenant, je pense qu'entre les groupes et les labels, c’est du cas par cas.

Florent : Season of Mist fait un gros travail sur la mise en bacs par exemple, et au niveau de la promotion. On fait beaucoup d’interviews, de rencontres même si, comme dit Harun, c’est beaucoup auto-gérer.

Harun : En général, des groupes de notre stature, comme Klone ou Hacride, qui vendent entre 2 et 4 000 albums, arrivons à retouché de l’argent pour l’investir dans l’album suivant, mais ça reste difficile, bien plus que certains peuvent le croire. Mais tu imagines bien que les labels sont frileux pour ce genre de groupes, dit, en développement.


14 – Qu’est-ce que vous pensez de la scène musicale actuelle en France ? Que ce soit au niveau métal, infrastructures ou soutien du public ?
Harun : Niveau infrastructures, je dirais que c’est vraiment bien. Malgré le manque d’argent, les gens se bougent réellement et il y beaucoup de collectifs ou d’associations pour faire vivre la scène. Sinon, pour la musique, je ne pense pas être le mieux placé parce que j’écoute de moins en moins de metal, à part les groupes de mes amis mais c’est vrai que je suis mal placé.

Florent : Moi encore moins, parce que j’écoute peu de metal en général, encore moins que Harun, et Steph pas du tout (rires). Question piège pour le coup (rires).


15 – La question suivante ne va pas être plus facile alors : qu’écoutez-vous en ce moment ?
Florent (directement) : The Street ! C’est un groupe de rap anglais que j’adore. Sinon, H2O, la scène new-yorkaise, beaucoup de hardcore mais très peu, voire pas du tout de metal je l’avoue. Des vieux groupes au final…

Harun : C’est ce que j’avais dit déjà, je suis un mauvais auditeur aujourd’hui. Autant avant j’écoutais beaucoup de choses, j’achetais plein de disques, un véritable « cdvore » mais maintenant, je n’achète plus rien, je n’écoute pas grand-chose (rires de Florent).

Stéphane : Quand on fait beaucoup de musique, tous les jours et avec des groupes différents, c’est presque évident qu’on veille se poser sans musique quand on rentre chez soi. On a plus la tête à se remettre un cd, même si c’est important d’avoir des opportunités, de découvrir des choses, de d’écouter agréablement des choses différentes…On peut être, au moins, à fond dans notre musique sans entrer dans une rivalité pour faire ce que les autres font, ce qui est à la mode…


16 – Si vous avez quelque chose à ajouter, je vous laisse le mot de la fin pour Spirit of Metal…
Harun : merci à Spirit of Metal. A toi aussi et à tout le monde.

Florent : merci beaucoup, à tout le monde (rires).

Stéphane : Et attention à la corrosion…metal…corrosion (éclats de rire général). Bon j’arrête, à bientôt sur la route !


interview réalisée par Eternalis

3 Commentaires

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krakoukass56 - 17 Octobre 2011: Sympa ton itw. Les mecs ont pas l'air de se prendre le chou, pourtant c'est pas des pipes...
Merci Eter !
Gloryholl - 17 Octobre 2011: Ah, ça c'est sur, ils se prennent pas la tête. Ils sont très modestes et supers gentils. Et Florent aime faire le comique ^^ J'ai passé un agréable moment, merci Eter' pour cette occasion qui tu m'as donné ;) Première inté stressée pour moi mais des mecs très accueillant et ouverts en face, ça passe tout seul.
clek - 21 Octobre 2011: Interview très sympathique et complète, mais serait-il possible de corriger le "fasse" à la première ligne ?
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