Nord (FRA)

Nord avait impressionné avec son second album “The Only Way to Reach the Surface”, sorti avant la pandémie. Un post hardcore barré, émotionnel et créatif qui allait puiser dans beaucoup d’influences pour se créer assez vite une personnalité propre et un son à part, méritant d’être paufiné avec le temps. 

C’est donc avec surprise que le quatuor (trio pour cette sortie) nous livre un ep 5 titres, sans guitares, beaucoup plus fantomatique et tirant autant de la BO, de la cold wave (même si le principal compositeur n’en est absolument pas friand) ou même de l’ambiant avec une certaine dose de prog moderne. Il était nécessaire de retourner discuter avec le sympathique Florent Gerbault, leader de son état d’une créature de plus en plus intrigante …

[Par Eternalis]

 


 

1 - Salut Flo ! C'est un plaisir de voir Nord de retour après le très bon “The Only way to Reach the Surface”. Comment s'est passé les mois qui ont suivi la sortie ? Des concerts ? De la promo ? 

Salut Joffrey ! La sortie de "TIOETM" est encore assez fraîche, donc on croule encore sous les chroniques et interviews, principalement grâce à la Klonosphere qui nous suit pour la deuxième fois dans nos folies. L'album ayant été composé en Octobre 2020, c'est plutôt gratifiant qu'il fasse son petit effet après tout ce long processus pour le sortir. Pour être honnête on avait absolument pas l'intention de jouer cet album en Live, mais la demande est forte, donc on planifie une petite tournée en Mai en belle compagnie, et sûrement quelques dates par-ci par-là cet hiver.

 

2 - Les deux premiers albums avaient beaucoup de liens thématiques et musicaux. Est ce qu'il était déjà prévu que le nouveau ait de nouveau des éléments le liant aux précédents ou souhaitiez vous quelque chose de plus indépendant ?

On souhaitait définitivement sortir des sentiers battus, de notre zone de confort. L'écriture de la musique comme des textes se base tout de même beaucoup sur nos vies personnelles, et nos deux premiers albums ont clôt un chapitre. Ce nouvel essai a été écrit en pleine pandémie, donc dans un contexte particulier. Une période qui a été à la fois "très courte" pour certains et à la fois interminable pour d'autres. C'est pourquoi je pense que ça va rester un 5 titres indépendant du reste (même si notre vibe un peu "prog" peut très vite revenir au galop sur la suite de notre discographie...).

 

3 - “The Implosion of Everything that Matters” démontre que vous aimez décidément les titres à rallonge. Que peux-tu déjà me dire sur ce nom de disque ?

Comme dit précédemment, on a écrit cet opus en pleine pandémie et surtout en plein deuxième confinement. L'amas de mauvaises nouvelles (désolé je vais pourrir l'ambiance) : les gens qui sont partis trop tôt, ceux qui se sont psychologiquement perdus, des couples qui se sont séparés... Bref ! On implose. On se concentre sur les choses importantes. Le titre vient tout simplement de là, de ce surplus de pensées et d'angoisse qui prend au bide. Heureusement pour beaucoup la musique a été un bel exutoire (dans le groupe ça nous a bien occupé l'esprit en tout cas !).

 

"Officiellement, je n'avais pas de guitare sous la main pendant le deuxième confinement, mais un paquet de vieux claviers à disposition [...] Je crois que j'avais besoin de faire une petite pause de ces instruments (rires) ! "

 

4 - L’opus fait 25 min pour cinq titres .. est ce qu'il faut le considérer comme le véritable troisième album du groupe ou un ep transitoire ?

J'ai le droit de dire "album transitoire" ? Je crois qu'on aime pas trop le terme d'EP car finalement on garde ce côté très chapitré, un début, une fin, une histoire au milieu. C'est comme ça qu'on fonctionnait sur les albums précédents. Après on ne le considère pas comme le troisième album, mais plus comme une parenthèse un peu expérimentale, un témoignage d'une sale période qu'on ne veut pas oublier pour autant.

 

5 - “Candles” ouvre le disque avec tellement d’onirisme … cette partie de piano est magnifique, parfaitement “percuté” par un passage très angoissant. Quelle idée derrière un tel titre d’ouverture ? 

C'est le tout premier titre qui a été écrit pour cet album. J'étais isolé à la campagne dans une vieille maison familiale, j'ai joué ces quelques accords sur le vieux Pleyel de ma grand-mère. Et là tout le côté nostalgique de cet instrument abandonné depuis quelques années là-bas m'a donné l'idée générale de ce nouveau disque. Le tout dans un domaine vide, avec de la brume, bref c'était fantomatique ! Quand à la cassure avec le passage angoissant, je n'ai pas de vraie explication intelligente, juste que comme à notre habitude on est incapable de rester calmes trop longtemps, on aime beaucoup trop surprendre !

 

6 - Il y a un côté très fantomatique qui ressort de l’album. Quelque chose de plus éthéré que “The Only Way …” qui était quand même beaucoup plus brut et agressif. Est-ce une volonté consciente d’évolution ou est-ce venu naturellement ? 

Je crois qu'au-delà de la météo et de la situation pandémique, c'est notre utilisation des synthétiseurs qui nous a mené naturellement vers ce côté fantomatique. On est pas vraiment des virtuoses du clavier, mais ce qui est sûr c'est qu'on ne voulait pas des sons trop proguy-kitschouilles, ni en même temps faire quelque chose de 100% électronique car on ne maîtrise pas ça du tout. Du coup mettre de la distorsion et de la reverb dans des orgues paraissaient être naturel pour composer sans guitares, et attraper cette touche un peu vaporeuse qui allait casser notre son habituel. Après en termes de prises pures et dures il faut savoir que c'est la première fois qu'on enregistre quasiment tout nous même. Pas de studio à part pour les lignes de batterie acoustique et de basse électrique ! Le reste en DIY avec les moyens du bord. Néanmoins l'album est mixé et masterisé par Clément Decrock du Boss Hog Studio qui a travaillé sur quasi l'intégralité de nos sorties.

 

 

7 - Où sont passées les guitares ? (rires)

Officiellement, je n'avais pas de guitare sous la main pendant le deuxième confinement, mais un paquet de vieux claviers à disposition. Officieusement, avant d'être isolé à la campagne j'ai fait 3 semaines de studio avec un nouveau groupe (qui répond au nom de TELLMARCH) à poncer des sons de basses et de guitares, enregistrées en live sur des amplis bien vintages. Je crois que j'avais besoin de faire une petite pause de ces instruments (rires) ! 

 

8 - J’ai trouvé que l’album était une belle réponse à la mouvance synthwave, majoritairement instrumentale, et une tentative de mixage entre cette scène récente avec de la cold wave ou encore des groupes plus prog comme Leprous ou VOLA. Qu’est-ce que tu en penses ?

Je vais être honnête : la synthwave et la cold wave sont des styles que je ne maîtrise pas, voire n'écoute pas du tout. Les influences pour ce 5 titres sont assez étranges. On va chercher comme d'habitude dans des groupes barrés comme The Mars Volta, qu'on mélangerait avec de la musique plus ambiante et triste à la Bon Iver. Le tout en s'inspirant du travail électronique fait par des groupes comme le dernier EP d'Arcane Roots ou encore les travaux de Fange sans leur batteur. Mais je comprends la vibe un peu Leprous sur les passages calmes, ils ont vraiment fait évoluer leur son d'une manière incroyable donc j'attrape le compliment !

 

9 - J’ai adoré le côté incantatoire de “Incantation” (étrange non ?). Peux-tu en dire plus sur l’intervention en japonais ?

Belle et longue histoire ! On a joué à Paris en 2017 avec Presence Of Soul, groupe de Drone/Doom/Post-Metal japonais dans lequel chante Yuki, qui est en feat sur "Incantation". Puis en 2018 on a accompagné notre batteur Thibault au Japon sur sa tournée avec Monolithe. L'occasion de recroiser Yuki et de vraiment tomber sous le charme de sa voix et de son pays ! On voulait vraiment aller jouer au Japon à la sortie de notre album en Avril 2020, mais les conditions de voyage étaient pas folles dans ces circonstances désastreuses. Du coup on a saisi l'occasion d'un nouvel album pour travailler avec Yuki à distance. Le Japon a pas mal souffert de la Covid, on voulait qu'elle puisse s'exprimer sur le sujet dans sa langue maternelle, que ça soit le plus honnête possible. On est très fier de cette fin de morceau car elle a joué le jeu à 100% et le texte comme ses placements sont magnifiques.

 

"On souhaitait définitivement sortir des sentiers battus, de notre zone de confort."

 

10 - Le dernier morceau, éponyme, me fait penser à une musique de BO, et il ressort un côté assez cinématographique de l’ensemble (j’ai pensé à Stranger Things notamment). Est-ce un genre qui t’inspire ? 

On est deux intermittents du spectacle dans le groupe, un dans le cinéma, l'autre à la télévision ! Nécessairement on consomme du film et des séries à la pelle. J'ai toujours considéré que les fins d'album doivent être émotionnellement épiques, et c'est sûrement pour ça qu'on abuse des cuivres sur tous les titres qui ferment nos albums. Je crois qu'on a passé beaucoup trop de temps dans les salles de cinéma.

Personnellement même si je n'écoute pas de Synthwave je reste très subjugué par les B.O. de Carpenter. Pas mal de Zimmer, de Morricone, et je voue un petit culte à Cliff Martinez (Drive, Only God Forgives...). Ils nous inspirent très certainement mais... inconsciemment !

 

 

11 - Est-ce que ça ne va pas être trop difficile de transposer tout ça en live ? 

On y travaille actuellement et ça va être une bien belle tanasse ! On jouait déjà une version guitares de "Truth Philters" sur notre tournée européenne en Janvier. Mais pour 2024, on a prévu de jouer l'album dans son intégralité, en faisant une version hybride avec des synthétiseurs ET des guitares. Exercice compliqué mais qui je pense aura son charme, on croise les doigts !

 

12 - Est-ce que ce nouvel ep est là pour définir le futur de Nord ou une facette plus expérimentale avant un retour plus “metallique” pour le prochain album ?

Je rassure les phobiques du synthétiseur, on était en effet sur une phase un peu expérimentale mais on repart sur quelque chose de plus organique, plus rock et bien plus metal que tout ce qu'on a pu faire auparavant. J'en profite pour éclaircir un point important, Nord est toujours un quatuor : Notre guitariste lead est devenu papa pendant la période pandémie et n'avait clairement pas le temps ni la tête pour bosser sur ce 5 titres, mais il est de retour sur le prochain opus ! Les guitares sont rebranchées ! D'ailleurs elles sonneront dès Janvier 2024, je n'en dis pas plus...

 

13 - Si tu veux ajouter quelque chose, je te laisse le mot de la fin … merci de ta participation !

Déjà merci Joffrey pour cette interview ! J'espère te recroiser dans les salles de concert en 2024. Si je devais ajouter quelque chose, aussi classique que ça soit, c'est qu'on a la chance en France d'avoir un paquet de groupes éclectiques, surtout dans ce genre incroyable qu'est le metal. Déplacez-vous dans les petites salles voir les concerts locaux, elles regorgent de pépites musicales. Soutenez les jeunes groupes en leur achetant du merch ,et allez découvrir des festivals plus petits qui se sont beaucoup trop bagarrés cette année et la précédente pour ne pas annuler leurs événements. Bref, délectez-vous, du metal il y en a à boire et à manger !

 

interview réalisée par Eternalis

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