Nightmare (FRA)

Lorsqu’il est revenu d’entre les morts en 1999, le cauchemar français ne s’attendait probablement pas à un tel regain de vitalité et de soutien de la part du public français, mais surtout international. Depuis un « The Dominion Gate » acclamée par la critique, Nightmare enchaine les pépites et s’affirme de plus en plus comme l’un des groupes de power metal qui compte. Et ce n’est pas parce que «The Burden of God » a quelque peu déçu votre serviteur qu’il ne s’est pas empressé d’échanger avec Yves Campion, fondateur, bassiste et hurleur à ses moments perdus du groupe, mais aussi directeur de la publication chez Metallian. Le grand blond nous offre, brut de pomme, sa vision de la scène metal et de la lente agonie que traverse la musique actuellement.

[Pas Eternalis]

interview Nightmare (FRA)1 – « Insurrection » avait été très bien accueilli par la presse et les fans. Comment s’est passé la tournée qui a suivi ?
Très bien, ça a duré deux ans déjà (rires). Beaucoup de pays étrangers, on a vraiment profité pour aller dans des pays un peu plus improbables que l’on n’avait pas l’habitude de faire en temps normaux.

2 – D’accord. Parlons un peu de « The Burden of God ». Comment le présenterais-tu pour commencer ?
Déjà il est différent dans son approche et dans sa construction. Nous avons composé de manière différente, avec plus d’arrangements. Nous avons eu la chance d’avoir Jonathan Ménard aux claviers qui a fait un travail remarquable. On a été beaucoup plus loin dans la richesse d’interprétation et de composition que tout ce que nous avons fait précédemment.

L’important aussi fut d’avoir le producteur avec nous de A à Z, Patrick Liotard, avec qui nous avons composé, arrangé les morceaux pour obtenir le résultat que nous voulions réellement. Nous avons énormément travaillé les mélodies, pour tout optimiser et avoir le meilleur résultat final que tu connais.



3 – L’aspect principal ressortant de ce nouvel album est qu’il est bien plus mélodique que les précédents, avec l’incursion des claviers, des orchestrations…
Comment ces éléments sont entrés dans Nightmare ? Nous n’avions plus l’habitude d’entendre ça…

On avait déjà, plus ou moins, avec « Cosmovision », travaillé avec une approche symphonique, avec même des choristes. On a donc voulu revenir à cela, sans aller jusqu’au point de cet album. On voulait sortir du carcan pur power thrash metal dont on s’est peut-être lassés, pour apporter plus d’atmosphères aux compositions.

4 – Justement, « Genetic Disorder » et « Insurrection » allaient très loin dans cet aspect belliqueux et plus sombre de votre musique. Penses-tu que ces albums seront le maximum dans cette veine ?
Non, je pense que si tu prends en termes de thrash, « Genetic Disorder » est le must mais on continuera à surprendre, c’est certain. On suit le feeling que l’on a sur le moment, s’inspirant de ce qui se passe dans nos vies ou dans le monde. Je ne pourrais te dire ce qu’on fera la prochaine fois. Là, on avait réellement envie de revenir à quelque chose de beaucoup plus arrangé, atmosphérique et en phase avec les textes de Jo (Amore, chant).

Nous n’avons rien de tracé d’avance.



5 – Parlons un peu du line up. Matt Asselberghs a remplacé JC Jess pour des raisons d’emplois du temps. A-t-il apporté des choses particulières pour l’album ? Est-ce qu’il a composé ?
Il n’a pas composé à proprement parler puisque Franck avait déjà presque tout fait lorsqu’il est arrivé dans le groupe, mais il a apporté son jeu. Il a fait des soli, il les a interprété librement parce que nous n’avons pas voulu qu’il arrive en tant que guitariste juste live. Nous l’avons intégré.

On s’est posé la question à un moment ; nous étions quatre et nous pouvions le faire à quatre. Mais finalement, c’est bien mieux de l’intégrer dans le line up à la source de l’album, et ne pas l’utiliser en tant que faire-valoir. La chance a fait de rencontrer Matt rapidement, et que tout colle entre nous.



6 – Vous avez connu pas mal de studios ces dernières années, entre le Soundsuite, le Fredman, le studio d’Alex Kohler…maintenant Montpellier avec Patrick Liotard.
Qu’est-ce que cela vous a apporté et en quoi c’était différent des autres fois ?

Différent parce qu’on connait Patrick depuis très longtemps. Il nous comprenait, il avait enregistré notre ep « Astral Deliverance » à l’époque et puis c’est quelqu’un de grand talent, qui connait le groupe et nos exigences.

On a voulu travaill
interview Nightmare (FRA)er avec lui de A à Z comme je disais, nous voulions comme point culminant qu’il soit comme le sixième membre du groupe. Il a même composé deux titres donc il s’est plus qu’impliqué. Nous voulions un producteur comme cela, qui ne soit pas juste ingénieur du son mais qui prenne part à la créativité de l’album. Je suis très content que l’on ait pu collaborer comme cela.



7 – Je trouve personnellement que le son sonne plus fin et raffiné. Moins allemand et rugueux finalement...
(ndlr : il me coupe) Moins thrash oui. C’est vraiment ce que nous voulions, et plus raffiné parce que les titres l’exigeaient. Il y a plus de profondeur dans les compositions.

Volontairement, nous avions été en Allemagne pour toucher de plus près le marché allemand, ou au Fredman pour « Genetic Disorder » pour le son « stéréotype Fredrick Nordstrom » et toute l’aura que cela peut donner. Mais cela nous a collé une étiquette sans reliefs, comme si étions un groupe cantonné à un seul style. C’est aussi pour ça que nous avons enregistré l’album en France.



8 – Magali Luyten intervient sur « The Dominion Gate pt III ». Est-ce qu’il y a un concept derrière ces morceaux que l’on retrouve depuis l’album éponyme en 2005 ?
C’est une trilogie en fait. Le concept est assez fouillé…il y a un résumé général dans le livret de l’album d’ailleurs.

Dans la partie I, il y a un messager qui découvre le monde parfait et idyllique. Mais il s’aperçoit après que ce n’est pas le cas. Dans la deuxième partie, il découvre que des androïdes viennent du ciel pour détruire le monde, que le chaos est prêt à l’envahir et que la science, les mathématiques ont pris le contrôle sur l’homme. Même si c’est lui qui les a créés, c’est devenu trop énorme et incontrôlable. Et dans cette modernité, nous avons oublié qu’il y avait des endroits qui dormaient, mais qui étaient tout aussi dangereux, comme le Moyen-Orient si nous en parlons de manière contemporaine. D’où ce personnage de Magali, qui est une reine de Perse voulant s’approprier le monde.

La conclusion vient plus ou moins dire que la fin du monde proviendra probablement de ces contrées, de ces pays-là. C’est pessimiste mais en, même temps très réaliste. La trilogie marque l’apocalypse…clairement, si un jour, un pays fait péter la bombe atomique, cela viendra d’Iran et pas d’ailleurs. C’est une vue générale de l’avancée du monde.

Il n’y aura donc pas de partie IV.





9 – Nightmare a aujourd’hui plus de trente ans de carrière. Quels défis ou questions vous posez-vous lorsque vous préparez un nouveau disque ?
C’est une très bonne question ça…on s’en pose beaucoup sincèrement. On se dit « on a déjà fait tout ça, on a été dans telle ou telle direction donc maintenant, que fait-on ? ».

C’est toujours un challenge, un challenge que l’on peut réussir comme on peut le foirer. Nous ne sommes pas devin. C’est important d’avoir des choses à dire, de se renouveler au niveau de la composition et je pense qu’on a fait un album très fort aujourd’hui. On a de très bons retours de la presse pour le moment, et celui d’après sera un gros challenge car nous ne serons pas capable de rester sur nos acquis pour faire un « The Burden of God II ». Il faudra travailler dur…

J’en connais beaucoup qui se sont fatigués et sont devenu mièvres avec le temps parce qu’il n’y avait pas cette remise en question. Nightmare évite de tomber dans ce piège-là.



10 – Une tournée est prévue directement pour promouvoir l’album ou avez-vous d’autres projets immédiats ?
On a quelques dates à l’étranger mais on n’a pas encore réellement de tournées de prévues. Nous n’avons encore rien en France de concret, nous venons aussi de changer d’agence de booking et elle est vraiment derrière nous donc
interview Nightmare (FRA)on espère que tout va bien se passer et qu’on va jouer le maximum possible.

11 – L’album sort chez AFM. A la sortie d’ « Insurrection », Jo avait dit que vous aviez choisi ce label pour cibler le marché allemand qui était plus en phase et calibré pour votre musique. Est-ce que ce fut un choix payant et est-ce que vous êtes satisfait de ce qu’ils ont fait pour vous ?
Oui, un choix réfléchi par rapport au fait que le marché allemand est très important pour nous. En cela, le résultat n’est pas mal du tout, on a pu enregistrer en Allemagne justement. Maintenant, nous ne sommes pas non plus Maiden tu vois mais nous ne sommes pas mécontent du résultat.

12 – Je trouve la pochette de l’album vraiment très réussie. Y a-t-il un message particulier derrière ?
C’est une interprétation en fonction de ce que l’on a envie d’interpréter. Il y a un côté chrétien/anti chrétien qui ressort avec ce personnage qui peut être un justicier ou un prêtre.

Le message, est qu’il peut-être là comme un chevalier satanique (petits rires). Il y a un côté anti-chrétien suggéré dans le sens ou la religion est sensé apportée le calme, la paix, sans guerre ni famine alors qu’on se rend compte que le monde est dans un bordel pas possible. Ce justicier, ce prêcheur est donc là pour dire que dans l’église, il y a peut-être un lien avec le mal, que Satan est peut-être déjà fortement intégré dans l’église, qu’il fait corps avec.



13 – Est-ce qu’il y a un groupe avec lequel vous voudriez vraiment tourner ou jouer en particulier ?
Personnellement, mon rêve aurait été de tourner avec Crimson Glory qui est mon groupe fétiche, et c’est ce qui va nous arriver fin aout. Autant te dire que je suis comblé (rires).

14 - Changeons un peu de sujet…tu es personnellement directeur de la publication chez Metallian depuis pas mal de temps. Comment vis la presse magazine aujourd’hui, puisque l’on dit qu’elle est mourante au même titre que le cd physique ?
C’est une autre interview du coup (rires). Je n’aime pas forcément digresser comme ça…maintenant, brut de pomme, je te dirais que c’est compliqué. La presse papier n’a plus les beaux jours qu’elle avait avant, cela fait partie de l’évolution de la société et des pratiques des gens, qui préfèrent internet plutôt qu’un magazine.

Quand je dis la presse, c’est la presse papier en général, pas forcément la musique. Internet a clairement fracassé le marché.



15 – Nightmare est revenu au début des années 2000, lorsque le téléchargement a explosé. Es-tu aussi pessimiste que ceux qui prédisent la mort du disque physique dans les prochaines années au profit du simple mp3 ?
Je pense qu’on y va tout droit. Si l’on évolue comme ça, il n’y aura plus de disques, mais simplement une offre numérique. Les gens, pour la plupart, fonctionnent comme des androïdes et mettent tout ça sur une clé, stocke sans se préoccuper d’un objet. Je pense du moins, que la plupart réagissent comme ça aujourd’hui. Je ne vois pas d’issue positive à tout cela.

16 – On arrive à la fin. Si tu as quelque chose à ajouter pour Nightmare ou pour les lecteurs, je te laisse conclure…
Merci infiniment pour le soutien et pour cette interview. Je pense que c’est important de soutenir les groupes français car ils ne le sont pas assez, alors qu’il y a des groupes de qualité. Sans parler de Nightmare, mais en général, nous avons des groupes parfois meilleurs que dans les autres pays. C’est quelque chose qu’il y a beaucoup à l’étranger, les allemands soutiennent beaucoup les groupes de leur pays et les français un peu moins, c’est là aussi ancré dans notre culture.

On vous donne rendez-vous sur la route car on n' a pas fini de se voir. Venez nombreux !


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interview réalisée par Eternalis

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