Larsen and Lies

Être un jeune groupe, sortir un premier disque, ep ou full-lenght, c’est aussi une histoire d’abnégation, de volonté, de surpasser les galères ensemble pour enfin voir se concrétiser le travail de plusieurs années. 

Larsen & Lies, groupe parisien de heavy rock, ne fait pas exception à la règle. Covid, temps, stabilisation du line-up en place, assise financière … rien n’est épargné pour parvenir à tenir entre ses mains le précieux sésame. A l’aube de la sortie de “Live a Good Lie”, premier témoignage de nombreuses influences allant de Guns N’Roses à Aerosmith en passant par le hard des années 80, un soupçon d’AOR, des influences bluesy pour parvenir à un premier essai qui n’appelle qu’une suite plus longue et complète. 

Place à Mr Stone (guitare / choeurs) et Screaming Jay (chant / harmonica) pour nous en dire un peu plus …

 

[Par Eternalis]

 

 

Une petite présentation s’impose …

Mr Stone : Le groupe est presque un spin off d’un groupe précédent. On s’est tous rencontrés à la base en tant que collègues avec un groupe qui s’appelait Six Floors Under. On travaillait pour la plupart dans la même boîte sans s’être jamais rencontré. On a joué ensemble pendant 4 à 5 ans et on a fait de supers choses. On a joué en Inde, pour une association caritative aux Etats-Unis à New-York et on s’est créé de grands souvenirs. 

En revanche, on était de nombreux musiciens, très variés, avec des influences qui allaient du rock à la soul ou au funk et c’était plutôt pas mal pour ce que nous faisions, à savoir des reprises, mais il était clair assez vite que certains membres voulaient plus. Nous étions un noyau dur à se dire que les covers, c’était sympa, mais que les compos, c’était mieux. 

On a déjà fait un titre ensemble, “Six Floors Under”. L’expérience a été super bonne et on a donc décidé, en 2019, de faire notre propre groupe à côté. Nous n’avons pas forcément tous les mêmes influences mais on a réussi à faire un beau mix qui est devenu Larsen & Lies. 

Screaming Jay : On est actuellement cinq, nous avons mis trois ans avant que le deuxième guitariste ne nous rejoigne. Le groupe s’est construit à la base avec quatre membres car même si Sted était prévu dès le départ, il n’a pas pu s’investir pour raisons personnelles. 

Nous sommes donc aujourd’hui avec la formation que nous souhaitions au départ. 

Mr Stone : C’est probablement ce qui a aussi débloqué les choses pour l’album. On s’est tapé le covid, pas mal de galères inhérentes aux jeunes groupes, des concerts où il y a 8 personnes, des trucs qui s’annulent. Maintenant on voit le bout de tout ça. 

Côté musique, on ne se classe pas forcément dans un style mais le heavy rock correspond bien. On n'a pas forcément l’impression de jouer du heavy metal, il y a des éléments hard rock, voire du rock indépendant. 

 

" On s’est aussi imaginé les bistrots un peu sombres, dans les années 20, les histoires de gang, les mensonges de chacun"

 

Si le terme de “Larsen” peut sembler logique et assez évident, qu’en est-il de ces “mensonges”. Est-ce qu’il y a une évocation particulière ou est-ce que c’était pour la sémantique, les deux “L” et le fait que ça sonne simplement bien ? 

Screaming Jay : un peu des deux (rires)

Mr Stone : Le logo était aussi un peu visé. Vous avez échappé à pas mal de choses pendant nos tentatives, on s’est souvenu de choses horribles dernièrement (rires)

Pourquoi Lies ? On aimait bien les deux mots, l’allitération du “L” et le “&” qui fait justement rock. On s’est aussi imaginé les bistrots un peu sombres, dans les années 20, les histoires de gang, les mensonges de chacun et du coup, le “Lies” allait bien et sonnait bien. Ça donne aussi un côté historique, une ambiguïté sur les histoires que l’on veut raconter. On a poussé la chose jusque dans la pochette avec les doigts croisés dans le dos du menteur. 

 

Un premier ep arrive donc et il s’appelle “Live a Good Lie”. Est-ce qu’on peut y voir un côté ironique de nos vies ? Des mensonges du quotidien, des réseaux sociaux, etc … ? 

Un peu oui. On se retrouve tous là dessus dans le groupe, ce côté ironique. Si on prend la chanson “The Entertainers” par exemple, il y a cette idée que, même quand c’est la merde et le monde est en feu, nous sommes là pour vous divertir, même si tout part en vrille. 

Il n’y a pas de côté politique. Ce n’est pas notre délire, même si certains dans le groupe voulaient qu’on parle de Sardou et Armanet (rires).

Screaming Jay : C’est clair que nous n’avons pas du tout une optique engagée. Je n’ai jamais fait de la musique dans ce but là, dans mes différents groupes. J’ai déjà essayé par le passé mais comme c’était très mauvais, j’ai décidé d’arrêter (rires). Certains le font très bien donc je les laisse faire. 

Je fais de la musique pour changer l’idée des gens, pour les divertir et leur faire passer un bon moment. 

Mr Stone : j’aime bien l’idée que nos chansons soient comme des faits divers, des chansons que l’on prend indépendamment, qui racontent chacune une histoire différente. 

 

 

Vous avez mis en place un crowdfunding qui a été explosé puisque vous avez récolté 3200€ en faisant un objectif de 2500. Est-ce que vous vous attendiez, honnêtement, à un tel succès ? 

Screaming Jay : un peu des deux (rires). Très honnêtement, au début, j’étais plutôt confiant en me disant que ça allait passer. Puis au bout d’une semaine, tu vois que les gens que tu connais ont participé, que ça commence à se tasser et là, tu te dis “On freine fortement !”. Et là, j’y croyais vachement moins ! 

Mais on a poussé, on a communiqué sur les réseaux sociaux et finalement, ça l’a fait ! 

Mr Stone : on a aussi revu nos ambitions à la baisse en se renseignant et regardant ce qui se faisait ailleurs. Effectivement, on est très conscient de ne pas avoir trouvé notre public. On est confiant dans notre musique mais il est évident que depuis le covid, les gens ont plus de mal à sortir et il faut faire les choses avec humilité. 
 

Qu’est-ce que ça aurait changé si ça n’avait pas été atteint ? 

Screaming Jay : L’album serait sorti de toute façon, mais avec moins d’argent sur notre compte en banque ! L’idée était surtout de rentrer dans nos frais et de lancer d’autres projets derrière, comme un clip par exemple, ou des tee-shirts. 

Mr Stone : Peut-être que ça aurait cassé une certaine dynamique, avec la sortie de l’album à venir. Ça aurait été une galère de plus je dirais. 
 

Est-ce que vous pouvez parler de votre expérience studio ? 

L’expérience studio a été en elle-même une galère de plus (rires). On était en contact depuis longtemps avec les gars du studio mais le covid nous est tombé dessus. Après il y a eu un gars qui a quitté le pays pour partir en Suisse donc il fallait un autre ingé son. 

Finalement, ça a été une des meilleures choses qui soit arrivé parce qu’il nous a permis de nous faire sortir beaucoup de choses, il nous a beaucoup poussé. Je regrette un peu que nous ayons tous enregistré chacun de notre côté parce que nous n’étions pas disponibles tous en même temps. C’était la deuxième fois pour moi que j’allais en studio et j’ai appris plein de choses, avec humilité, des difficultés à jouer certaines parties alors que nous étions pourtant bien préparés. J’ai même eu une merde avec une guitare qui sonnait faux, une idée de génie de ne pas faire régler ma Marceau avant les prises !  On a trouvé une vieille Explorer en studio qui n’avait pas été joué depuis des années mais qui sonnait d’enfer et on a fini avec ça !

 

Screaming Jay : Comme quoi une bonne vieille Gibson sera toujours une valeur sûre pour du rock ! (rires). 

De mon côté, il est clair que Greg Canone nous a tous mis un bon coup de pied au cul. J’ai fait mes prises avec Damien Badey. On s’est bien marré mais c’était exigeant et ils n’hésitaient jamais à nous dire si certaines parties étaient merdiques. Je m’y attendais, le studio ne pardonne rien et aucun écart. 

Il y a des morceaux sur lesquels je pensais être à l’aise et pourtant, je m’y suis repris à plusieurs fois car ce n’était simplement pas comme je voulais. A côté, un titre comme “The Entertainers”, plus complexe, je le redoutais et c’est presque une première prise sur l’album ! 

Pour revenir à l’expérience, c’était super, avec des gars très pro ! Je regrette simplement d’avoir couru constamment après le temps, de ne pas avoir eu le temps de faire certaines choses que nous avions pensé. Mais il a fallu restreindre le temps pour des raisons purement budgétaires. 

Mr Stone : Mais l’album est là, et surtout il met un point final à tous ces titres que nous avions depuis longtemps. Certains sont déjà vieux. Donc on peut désormais penser à autre chose et travailler sur d’autres choses. 

 

 

Est-ce que vous avez pensé ajouter “Stay the Fuck Home” [ndlr : clip sorti pendant le covid et disponible sur Youtube] dans cet ep ? 

On ne l’a pas envisagé non. A un moment, on ne savait pas quoi en faire de cette chanson parce qu’elle est très connotée sur une période. On a même essayé de refaire des paroles mais ça ne marchait pas. 

Finalement, on s’est dit que c’était une partie de nous, que nous la joueront en live et voilà. 

Screaming Jay : c’est surtout un morceau très ironique parce que quand on l’a fait, nous étions au premier confinement, on se disait aussi qu’il valait mieux rester chez soi, que c’était plus sûr … et à la fin du troisième confinement ça devenait “Get the Fuck Out” (rires). 

 

"Il y a une vraie différence entre l’achat immédiat et spontané [d'un cd] après le concert et le fait de penser, chez soi, le lendemain, à aller sur une plateforme de streaming pour réécouter et t’abonner."

 

Vous avez fait le choix de ne pas sortir de formats physiques pour vous focaliser sur les plateformes de streaming. Si on met de côté l’aspect financier du coût de production d’un cd ou d’un vinyle, croyez-vous encore au format physique ? 

Mr Stone : (ndlr il hésite) A la base, on voulait simplifier la chose, sortir sur les plateformes et aller au plus vite. Si je prends mon exemple, je n’ai plus rien chez moi qui permette de lire un cd ou un vinyle. Je ne voulais pas trop me poser cette question-là et on se rendait compte, autour de nous, qu’il n’y avait pas un fort enthousiasme. De mon côté, je voyais le côté gestion du crowdfunding, le studio, la pochette … donc je me disais que gérer ça en plus, ça faisait beaucoup. J’aurais bien kiffé le vinyle pour l’objet, et je pense que l’on fera ça dans un second temps. Je pense néanmoins que de moins en moins de gens achètent des produits physiques … 

Screaming Jay : j’étais probablement un des seuls qui disaient “Ça serait bien qu’on le fasse”. Je pense aussi à la sortie des concerts, à ceux qui veulent revenir avec un souvenir, avec un produit. Il n’aurait pas été question de le presser à des milliers d’exemplaires mais au moins d’en avoir quelques-uns, donc c’est pour ça qu’on y reviendra sûrement. 

Il y a une vraie différence entre l’achat immédiat et spontané après le concert et le fait de penser, chez soi, le lendemain, à aller sur une plateforme de streaming pour réécouter et t’abonner. Je comprends l’argument des gens qui n’achètent presque plus de produits mais pour laisser une trace, c’est préférable. 

 

Est-ce que des concerts sont prévus pour la suite ? En dehors de Paris ? 

On a déjà le concert le 29 septembre avec le groupe Nate, qui est à une trentaine de minutes de Paris. 

Mr Stone : On parlait aussi de faire quelques concerts dans Paris car on connait pas mal de gens qui seraient prêts à venir nous voir. On a aussi quelques pistes à côté, vis à vis des contacts de chacun. J’aimerais bien décrocher quelques festivals également pour l’année prochaine. J’ai des contacts du côté de Lyon, Nantes ou Nancy donc j’espère que ça se fera. Il y a aussi le concert acoustique qui se fera à Vannes (ndlr : un magasin de musique qui a contribué au crowdfunding avec la contrepartie du concert) et le but sera de le coupler avec un autre concert électrique. 
 

 

Beaucoup d’artistes craignaient que l’après-covid soit un embouteillage avec des tonnes de concerts, notamment de gros artistes “prioritaires”. Comment fait-on sa place quand on est “jeunes” ? 

On était tellement focalisé sur l’ep que finalement, les concerts étaient un peu au second plan depuis la reprise. Donc on ne s’est pas pris trop de mur de ce côté-là. 

 

On retrouve un solo d’harmonica sur “The Writing on the Wall”, chose plutôt rare dans le hard ou le metal. Comment les autres ont-ils accepté l’idée et est-ce que vous reproduirez la chose à l’avenir ? 

Screaming Jay : ça n’a pas été très compliqué puisque ce sont eux qui m’ont dit “Bon, ici, tu vas nous jouer un solo d’harmo”. Donc j’ai dit “Ok, quelle est la tonalité ?” et c’était parti (rires). Il n’y a rien eu de compliqué car je l’avais déjà fait avec Six Floors Under. J’aime bien en concert ajouter de petits moments d’harmonica sur un titre comme “La Grange” ou carrément des passages de Jean Jacques Milteau. 

Je pense qu’il s’agit d’un instrument où il faut faire attention à ne pas en mettre partout, surtout si ce n’est pas un groupe où l’harmonica est au centre des compositions. Si l’on veut que ça sonne et qu’il y ait un effet de surprise, il faut que ça reste par petites touches exceptionnelles. Sur l’ep, nous avons six morceaux et il y a un seul solo d’harmonica, avec de la saturation, pour lui donner un côté rock. Mais c’est tout. C’était un moment logique dans ce morceau qui, d’ailleurs, n’a pas de solo de guitare. 

 

Est-ce que vous imaginez un premier album complet ou plutôt un second ep ?

Sted l’a déjà évoqué. Nous avons encore du chemin et c’est évidemment dans un coin de notre tête d’avoir un album complet. Il nous faut une dizaine de morceaux, s’attaquer de nouveau à la composition.

Comme te disait Stone tout à l’heure, nous étions un peu enlisés dans ces morceaux et nous allons pouvoir enfin nous pencher vers du nouveau matos. Nous les jouerons en concert mais nous pouvons tirer un trait final sur ces titres qui ont été écrits il y a plusieurs années !

Mr Stone : Il y a forcément un côté un peu flippant parce qu’on repart forcément de zéro pour beaucoup de choses. On sera sur un exercice un peu plus particulier car certains titres ont été écrits alors que nous avions encore Six Floors Under. Là, nous allons partir, à cinq, sur de nouvelles idées. On va aussi pouvoir écrire des parties de grattes à deux. On a tous envie de ça et on espère que le chemin ne sera pas aussi long pour la suite. 

On s’est aussi rendu compte, avec le recul, que nous avions beaucoup de mid-tempos donc nous avons dans l’idée de faire des choses plus speed et d’emmener les gens vers des rythmes plus soutenus. 

Screaming Jay : je suis pour que l’on fasse des choses speed (rires). C’est le “heavy metal guy” qui crie au fond de moi. 

Mr Stone : Pas juste au fond de toi d’ailleurs (rires).

 

" Sur l’ep, nous avons six morceaux et il y a un seul solo d’harmonica. Je pense qu’il s’agit d’un instrument où il faut faire attention à ne pas en mettre partout"

 

D’ailleurs, qu’est-ce que vous écoutez aujourd’hui ? Est-ce que vous avez des groupes récents que vous écoutez ou alors simplement des trucs de vieux ? (sourire)

Screaming Jay : j’écoute beaucoup de vieux trucs et j’ai mes groupes phares. Je suis un inconditionnel de Tobias Sammet (Avantasia, Edguy). Après, j’ai écouté le nouvel album de The Unity qui est vraiment pas mal et j’ai découvert récemment Electric Mary avec une voix un peu à la Steven Tyler que j’ai trouvé très bon. C’est très rock. J’ai aussi écouté le nouveau Extreme que je n’ai pas vraiment aimé, à contrario du dernier Skid Row que j’ai beaucoup écouté et aimé, avec une vraie patate comme dans les années 90. 

Mr Stone : j’écoute beaucoup de vieux groupes pour ma part. On a tous nos groupes sur lesquels on revient. J’écoute beaucoup Rival Sons par exemple, ou encore Dead Daisies parce que j’adore Doug Aldrich. 

 

Je vous laisse le mot de la fin …

Mr Stone : c’est la fin mais pour nous, ça commence !

Screaming Jay : Now, it begins ! [ndlr : troisième chanson de l’ep]


 

interview réalisée par Eternalis

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