Klone

Une petite révolution. Voilà ce qu’est « Here Comes the Sun » pour Klone, un album charnière changeant radicalement l’orientation musicale des poitevins.
Aldrick, guitariste depuis 2012 dans la formation, nous explique un peu plus la création de l’album, son rôle dans sa conception et les aspirations de Klone pour l’avenir.
Instants choisis d’un entretien de plus d’une heure.

[Par Eternalis]

interview Klone1 – Comment vas-tu en cette période de sortie d’album ?
Je t’avoue que la pression monte avec les échéances et les concerts qui arrivent. On va essayer de proposer des choses nouvelles sur la scénographie et c’est beaucoup de nouveautés.

On va défendre l’album le mieux possible et nous sommes en plein renouveau. Beaucoup de remises en question en tout cas.



2 – Tu étais arrivé juste avant la sortie pour l’enregistrement de « The Dreamer’s Hideaway ». L’album a très bien fonctionné, a eu un joli succès donc que retiens-tu de cette arrivée et de ta première tournée avec Klone ?
Tout a été très vite car quand je suis arrivé, tout était déjà écrit. C’est Flo (batterie) qui m’a appelé pour venir les rejoindre donc le projet autour de l’album était très avancé. Je les connais depuis toujours et ce fut très naturel de les rejoindre car je les adore depuis leurs débuts.

Personnellement, cela m’a beaucoup enrichi professionnellement car je n’avais jamais enregistré un album diffusé aussi largement ni participé à une réelle tournée donc je dirais que ça m’a « upgradé » dans ma vie de guitariste (rires). Ça a répondu à beaucoup d’attentes.



3 – De ce fait, ton rôle dans « Here Comes the Sun » a dû être bien différent ?
J’étais dans le processus car je fus plus comme un exécutant sur le précédent. A l’inverse, j’ai été très rapidement à l’aise car il y avait un côté « gros son » avec des rythmiques massives qui correspond complètement à mon jeu alors que « Here Comes the Sun » a été comme un chamboulement pour moi (rires).

4 – Justement, il est bien plus ouvert, plus universel...Sans aucune barrières et il ne s’adresse pas qu’aux fans de metal...
C’est vraiment difficile puisque comme tu dis, le genre n’est absolument pas marqué. On ne sent plus du tout affilié à un univers en particulier. Tu auras de la pop, du prog, du rock...mais plus forcément du metal. Le terme de rock progressif pourrait correspondre car elle est un peu fourre-tout (rires). Quand on dit « progressif » aujourd’hui, on le donne un peu à toutes les sauces.

Je dirais plus simplement que c’est un album de rock qui ne veut pas subir le poids des années, qui ne sonnera pas « 2015 » et qui pourra être réécouté sans contraintes dans plusieurs années. Il peut aussi rassembler diverses générations.

Ce n’était pas le point de départ mais nous avions cette envie de transcender les écarts générationnels sans que l’on puisse nous dire « ça sonne années 90, ça sonne moderne des années 2010, etc... » où nous avons des sons spécifiques, des clichés. Que l’on ne puisse pas le quantifier, ou se dire à l’écoute « ça sonne comme ça ou ça ».



5 – On pense plus facilement aujourd’hui à Steven Wilson, Anathema ou Pain of Salvation dans leur carrière récente. Est-ce que des albums/groupes qui vous ont marqué ces derniers temps ?
Pas forcément. Il n’y a pas eu d’albums références ou de groupes vers lesquels nous avons voulu spécifiquement album. Bien sûr, il y a des références à des grands artistes mais ça n’a pas été une démarche consciente et c’est très naturellement que Guillaume a écrit un album dans cette veine. Nous écoutons beaucoup de musiques différentes et c’est aujourd’hui la digestion totale de tout ce que nous écoutons. Ce qu’il y a de plus épuré possible.

6 – J’avais parlé avec Florent pour « The Dreamer’s Hideaway » qui m’avait dit que tu avais beaucoup apporté sur le riffing dans l’album. Or, il n’y a pour ainsi dire pas de riffs mais des notes, des arpèges et des mélodies sur ce nouveau disque. Comment as-tu appréhendé ça en tant que guitariste ?
Ça m’a vraiment bouleversé (rires). Beaucoup de jeu au doigt, de jeu clair et j’ai dû beaucoup travailler là-dessus car ce n’est pas du tout ce que je pratique habituellement. Sur l’album, c’est Guillaume (Bernard – guitare) qui a enregistré la plupart des guitares car il était naturellement beaucoup plus attiré par le jeu, il avait les mélodies dans les doigts et comme le feeling joue énormément dans l’album, il était logique qu’il interprète les choses comme il le voulait. J’ai de mon côté beaucoup travaillé pour que le rendu sur scène soit possible et donne bien. Il est finalement peu important de savoir qui a fait quoi sur l’album studio, je n’ai aucun complexe sur le fait que Guillaume soit responsable d’une grande partie des guitares de l’album tant que sur scène, le public puisse voir ce qu’il entend sur disque. Pas loin de 90% a été fait par lui mais c’était plus efficace et naturel et je suis très fier du disque dans sa globalité.

A l’inverse, presque toutes les guitares rythmiques du précédent étaient de moi donc c’est le feeling qui prédomine et c’est comme ça que nous continuerons à travailler.



7 – La plupart des groupes écrivent leurs morceaux en partant d’un riff pour ensuite former la mélodie mais il n’y en a quasiment aucun sur l’album. Comment ont été écrites les compositions ?
Guillaume procède très simplement car il trouve un thème et cherche des notes dessus. Quand il parvient à en extraire une ligne mélodique, il va chercher une nouvelle harmonie et ainsi de suite jusqu’à avoir une structure et ensuite greffer les multipl
interview Klonees éléments de la musique de Klone. Il lui faut simplement une petite matière de base pour partir et étaler ses différentes idées.

A partir du moment qu’il écrit des mélodies, il a directement les arrangements qui lui viennent en tête. Il est à l’antithèse complète du riffeur de metal qui va composer gros et éventuellement épurer ensuite. Lui, il écrit de manière très fine et ensuite épaissi l’ensemble car plus la matière principale est fine et épurée et plus tu pourras jouer sur les arrangements et les effets sonores.



8 – Yann Ligner est également très en avant dans le mixage cette fois-ci. Il est véritablement l’élément central de l’album et celui qui fait que « Heres Comes the Sun » ne serait pas s’il n’était pas présent.
Pour lui aussi cela découle d’une évolution logique. Les années ont passé et il n’a plus voulu chanter en hurlant ou en growl et le cap est désormais passé où il n’y a plus une seule note éraillée du disque. Il n’y a vraiment que du chant et par là, le mixage et sa manière de poser sa voix s’est faite très naturellement avec la musique composée. Quand tu as une musique éthérée, fine et gracieuse, tu dois forcément avoir une voix très en avant dans le mix et le point fort de l’album est clairement le chant de Yann.

C’est une grosse fierté d’avoir un tel chanteur dans le groupe qui puisse faire ce qu’il veut de sa voix. L’album s’ouvre directement sur sa voix et ça a été un sujet de discussion au début, pendant quelques semaines même (rires). Commencer par la voix était assez culoté et c’était étrange quand on connait le personnage très timide et réservé de Yann mais ça fonctionnait tellement bien, comme des portes qui s’ouvre, qu’on l’a gardé ainsi.



9 – Un peu comme si Yann disait « Bienvenue » et ouvrait les portes du disque avec son premier souffle...
Complètement. Il créé un dépaysement total dès les premières secondes et on est tout de suite happé par le son et le climat du disque. Même si c’est moins lourd, le message et le fond sont surement plus forts que tout ce que Klone a fait précédemment. Cette intro donne envie de rentrer dans l’univers de l’album.

Yann entre vraiment dans le rôle d’un chanteur et pas uniquement d’un instrument supplémentaire. Le mot chanson porte son nom ici, cela tourne autour du chant et Yann ne se font pas dans le reste. Les instruments sont là pour le servir et nous ne sommes pas comme beaucoup de groupes récents ou le chant n’est pas distinct du reste et où il est uniforme avec le reste. Il y a un texte qui est vécu et nous ne voulions pas d’un chant rythmique ou mécanique.



10 – Vous avez une fois de plus enregistrez l’album par vous-même, avec les moyens du bord, malgré l’excellente production du disque. Quels sont les avantages du procédé et si vous aviez le choix, est-ce que vous préféreriez vous enfermer dans un studio avec un grand producteur ?
Petite rectification, les parties batteries sont enregistrés dans un vrai studio car Flo préfère travailler de son côté et travaille de cette manière depuis déjà quelques albums.

En revanche, pour le reste, effectivement, tout a été fait directement à la maison. Je dois t’avouer que m’enfermer dans un grand studio avec un producteur de renommé, et je pense parler au nom de tout le monde, ça nous branche énormément. On aimerait le faire et évoluer mais c’est surtout niveau finances que cela est difficile. Tout ce qu’on fait nous-même, c’est des sous que l’on peut-être ailleurs dans la promotion, le pressage, etc...Il y a aussi une contrainte de temps car nous aimons beaucoup prendre notre temps (rires). On refait nos arrangements, nos parties beaucoup de fois et tu ne peux pas faire ça dans un studio où tout est beaucoup plus calibré et professionnel.

En résumé, l’expérience nous intéresse vraiment mais est-ce que c’est complètement compatible avec notre manière actuelle de travailler je ne sais pas. A l’inverse, il y a plein de soucis techniques que nous avons aujourd’hui qui ne nous arriverait pas, comme des plantages informatiques qui nous rendent parfois fous.



11 – Et le producteur rêvé serait ?
Et bien Steven Wilson (rires). On y pense car on a tourné avec Orphaned Land qui a été produit par lui et on les tannait pour qu’ils nous donnent les contacts (rires). On ne lui a honnêtement rien demandé mais c’est clair que c’est quelqu’un à qui on ferait confiance à 3000%.

Le son reste très subjectif car cela ne dépend pas seulement du producteur. Il y a le temps que tu y passes, le matériel que tu utilises, la façon de jouer...on pense souvent qu’un producteur fait tout mais si tu joues mal, ça ne donnera rien (rires). Ce que tu mets dedans est primordial et le meilleur ingénieur du son ne pourra rien y changer. C’est ta patte qui est importante et on oublie parfois ça, surtout dans le metal où on a des énormes prod surdimensionnées avec beaucoup de distorsions. Quand tu joues en clean comme nous sur l’album, si tu te plantes, tu ne pourras pas rattraper le truc avec des effets cools, ce sera juste moche (rires). Attention, je ne dis pas que les musiciens avec un gros son jouent mal car il y en a énormément que j’adore. Je dis juste que la vision de l’auditeur est parfois biaisée et qu’il ne perçoit pas toujours toute la précision d’un jeu de guitare.



12 – Beaucoup de groupes actuels plongent dan
interview Klones un revival 70s, comme Opeth ou Steven Wilson justement et on voit l’émergence de jeunes groupes n’ayant pas connu cette époque comme Blues Pills. On aurait pu croire que Klone allait s’y frotter avec cet aspect rock progressif mais absolument pas. De quel œil vois-tu cette nouvelle mode ?
En toute honnêteté, il y a des choses que j’aime beaucoup comme Blues Pills justement et d’autres que je n’aime vraiment pas car ça ne semble pas vraiment honnête. Il y a toujours eu des modes et on est un peu dans une époque où certains veulent retrouver un grain naturel d’antan, même s’il faut passer par un ordinateur dernier cri pour l’avoir. Tu vois le paradoxe ?

La démarche est un peu absurde mais des gens aiment ça, en ont besoin et le veulent, notamment car ils ne l’ont jamais connu. Personnellement, je ne suis pas forcément touché car j’ai connu quand j’étais gamin les premiers groupes de cette époque-là. C’est une falsification, c’est du faux « vieux » et je préfère écouter la puissance du discours des vrais artistes de cette époque-là. La démarche de Klone ne va pas du tout dans cette démarche car nous n’avons pas ce besoin d’aller dans ce type de son pour sonner pur ou naturel. On est plus des enfants des années 90 en général mais tu sais, dans quelques années, c’est Pantera et Faith no More qui sonneront vintage (rires).



13 – L’album sort toujours chez Klonosphere, évidemment, le label de Guillaume, mais le pressbook parle d’un partenariat avec Warner. Quand est-il exactement ?
On collabore avec Vercycords et Warner en fait pour étendre la distribution mais pour le fond exact, Guillaume serait plus à même de te répondre. Ça ne change pas grand-chose pour nous mais c’est surtout que cela va dégager du temps pour Guillaume qui pourra se concentrer sur la musique et les concerts car il a quand même un rôle important. Il est musicien, compositeur et patron de label donc je pense qu’il cherche à un peu se délester car il a énormément de travail et de casquettes différentes.

14 – Le vinyle est un support qui revient en force et « Here Comes the Sun » est le premier Klone qui verra le jour en vinyle. Qu’est-ce que ça te fait ?
Une grande fierté. Autant je suis un peu réfractaire pour le vintage abusif, autant le support vinyle est représentatif de la musique. On plonge mieux grâce à la grande pochette, au son et à l’objet. Je suis très fier de sortir un disque qui sort en vinyle, un peu comme si on rentrait au panthéon du rock (rires). Je ne suis pas forcément collectionneur mais c’est cool de vendre un si bel objet et je pense qu’il colle parfaitement à la période et à l’album. Il y aura plus de chaleur et certaines micro-saturations de guitares ne seront audibles que sur ce support. Et avec cette pochette, ce sera vraiment géant.

15 – Justement, la cover est parfaite. Elle ne possède aucune inscription et retranscrit une ambiance parfaite pour le disque...
Il n’y a pas forcément de concept. On est parti de la phrase « Here Comes the Sun » pour définir le concept graphique de l’album et Yann est tombé sur cette photo d’un artiste canadien dont je ne me souviens plus du nom (rires). Il a communiqué avec lui pour effectuer quelques modifications mais globalement, ça correspondait très bien. Il y a des couleurs chaleureuses et chaudes mais, en toile de fond, il y a un orage menaçant comme pour dire qu’il faut se méfier de l’album, qu’il n’est pas si léger et positif que ça.

Comme tu dis, il n’y a pas de nom ou de mot. C’est juste de la musique. On ne veut pas toucher les gens à travers le nom du groupe mais juste à travers le message que véhicule l’album.



16 – Le ep « High Blood Pressure » est aussi réédité avec une nouvelle pochette. Que peux-tu dire dessus ?
C’est plutôt une décision de Yann et Guillaume pour celui-ci. Je n’ai pas joué dessus donc j’ai été un peu moins focalisé sur cette sortie. Je sais que les gars voulaient mettre un coup de jeune, un renouveau pour ce ep et la nouvelle pochette est vraiment belle.

En revanche, le gros point fort de la réédition est qu’il y a quasiment un live entier en plus de l’album. Il n’y a vraiment aucune arrière-pensée derrière ça, juste qu’il n’était plus dispo et qu’ils en ont fait une nouvelle version. Idem pour « The Dreamer’s Hideaway » qui est réédité avec des morceaux acoustiques. Je trouve vraiment important de rajouter du matériel pour que ce soit plus attractif d’acheter l’album.



17 – Quel serait le groupe parfait de première partie pour cette tournée ?
Au risque de me répéter, je dirais que Porcupine Tree, Anathema et Opeth seraient parfaits (rires). Je ne peux pas dire mieux, sincèrement, tant on cherche à aller vers ces groupes-là. On apprendrait en plus tellement à côtoyer de tels musiciens que ce serait enrichissant à tous les niveaux.

18 – Merci beaucoup à toi ! Une dernière chose ?
Merci déjà à toi. J’espère que les gens vont apprécier l’album, le comprendre et l’accepter et qu’ils seront nombreux à venir en concert. On s’est pris un peu la tête pour créer une setlist cohérente mais je suis certain que les spectateurs vont être surpris. On va s’attendre à un set gentil et minimaliste mais les versions live de l’album vont surprendre par leur intensité j’en suis certain.

Venez nombreux !


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interview réalisée par Eternalis

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Arthron - 26 Avril 2015: Magnifique interview, merci beaucoup. J'ai particulièrement apprécié les parties qui s’intéressent à la composition et surtout les parties de guitare en son clair. Aldrick a l'air super sympas. J'ai découvert le groupe assez récemment, j'adore.
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