Originalité. C'est un mot qui fait généralement défaut dans la conversation lorsque l’on évoque des groupes émergents de labels tels que Rise Records. Du générique breakdown toutes les cinq secondes, au couinement de cochon du chanteur pré pubère, certains peuvent penser qu'il n'y a plus d'espoir dans le genre. Et c'est là que les
Sleeping With Sirens entrent en jeu.
Sleeping With Sirens est jeune et composé de cinq membres qui savent écrire de la bonne musique. Leur premier album,
With Ears to See and Eyes to Hear affiche déjà un talent en devenir. Cet opus garni de dix pistes montre tôt l’énorme potentiel de cette musique un peu plus innovatrice que d‘habitude.
Tout d’abord, la production sur cet album est assez géniale. En Post-Hardcore souvent, et aussi sur tous les types de musique moderne d‘aujourd’hui, la production est trop exagérée et laisse le sentiment aux auditeurs d’avoir eu une écoute artificielle (I.E. Isles & Glaciers). Néanmoins, la production ici est claire, concise, et pas exagérée. Quel bonheur d‘entendre cette basse, identifiable entre mille, sur de nombreux moments de l’album ! Son travail, admirablement audible dans le genre, renforce le rythme et pose une des bases les plus solides de l’album.
Cependant, le batteur sur ce disque n'a rien de spécial. Il est à moitié intéressant sur quelques chansons. Et même s’il a des éclairs de génie par intermittence notamment dans
With Ears to See and Eyes to Hear et Captain Tyin Knots vs Mr. Walkway, il est malheureusement normal et inoffensif.
Ensuite, attaquons-nous à la meilleure chose que ce groupe possède : le chant.
Kellin Quinn met en valeur sa capacité vocale tout au long de cet album tantôt en criant, tantôt en chantant l‘amour (Let Love
Bleed Red). Lorsqu’il chante, il atteint des notes incroyablement aiguës et élevées comme dans If I'm James Dean, You're Audrey Hepburn, une chose qu'aucun homme avec des testicules intacts devrait être capable de faire.
Mais sa voix de contre-ténor ne l’empêche pas de pousser de grands cris qui lui servent à montrer sa hargne soudaine. La capacité naturelle de Kellin à atteindre des notes aussi aiguë et quasi féminines est un point positif de démarcation face à tous les chanteurs synthétiques de Post-Hardcore. Ces vocalises claires brille particulièrement dans Let Love
Bleed Red, If I'm James Dean, You're Audrey Hepburn et
With Ears to See and Eyes to Hear.
Sur ce disque,
Sleeping With Sirens a tendance à s'éloigner des riffs
Metal et des breakdowns, mais tout en ne franchissant pas la ligne de se faire étiqueter
Metal Progressif. Ils créent ainsi leur propre style, qui est parfois très proche de
Circa Survive ou
Closure in Moscow.
If I'm James Dean, You're Audrey Hepburn affiche le talent qu'ils possèdent en composition musicale, avec le refrain le plus accrocheur de l'album, la chanson suivante, The Bomb Dot Com V2.0, semble très plagiée du groupe
Broadway avec les mêmes riffs bateaux, mais en ajoutant la petite touche qui leur est personnelle.
L'album prend une pause à la quatrième piste, et nous arrose avec une des chansons acoustiques plus belles et sincères que tout ce vous entendrez venant de chez Rise Records. Le talent vocal d'Aaron Marsh (Copeland) ajoute à la chanson encore un plus. Dès la fin de la chanson, l'album reprend là où il s'était arrêté avec la piste suivante, Captain Tyin Knots vs Mr. Walkway, qui commence avec une intro lourde contrastante, et presque dérangeante à cause de la chanson précédente. Ici, David Stephens crie, beugle, grogne comme il sait si bien le faire avec
We Came As Romans, et ajoute la sensation Hardcore que cet album n'a pas. David, égal à lui-même, est la force de cette chanson un peu typer mais excellente.
Cependant, je ne suis pas là pour vous dire que cet album est parfait, car à ce stade, l'auditeur peut commencer à se demander "Cet album peut-il faire mieux ?" et la réponse est non. Il n'y a pas de morceaux hors-concours sur la fin de l'album (sauf la chanson-titre).
Bien qu'ils affichent beaucoup de talent sur la première moitié de l'album, l'autre moitié laisse beaucoup de place à l'amélioration. Des chansons comme In Case of
Emergency, Dial 411 et Left Side of Everywhere font glisser l'album vers le bas. Ces deux derniers titres (sans compter Outro) sont tout à fait inutiles.
Il y a beaucoup de chansons très solides sur cet album, mais d'autres vous montrent que vous vous seriez mieux senti sans elles. Idem pour certains riffs de guitare, classiques, et les quelques breakdowns sont très « start-and-stop ».
Ce groupe a beaucoup de potentiel, et dans l'ensemble, le disque est assez amusant à écouter. Le travail vocal de Kellin est impressionnant, et l'écriture des chansons est étonnamment bonne pour un premier CD. Cependant, avec seulement 10 chansons et une longueur de 33 minutes, je trouve cela incroyablement court, et personnellement je suis resté à en vouloir plus. Si vous êtes fan de Post-Hardcore, vous aimerez certainement cet album, et si vous ne l’êtes pas, qui sait, vous pourriez être surpris.
Enfin,
With Ears to See and Eyes to Hear suit à l‘excès la ligne directrice que le groupe s’est fixé, à un tel point qu’en dehors de quelques pistes notables, les chansons de l'album sont très similaires et n'ont pas la diversité nécessaire pour faire de ce disque un album mémorable. Cependant, l'espoir vit toujours. Les membres du groupe, quoique jeunes, sont clairement qualifiés avec leurs instruments respectifs.
Seul le temps nous dira si on peut récolter ce talent afin de transformer leur musique en quelque chose de grand.
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