Impulsé par son premier et solaire album studio, «
Maitri », le sextet italien natif de Sassari, en Sardaigne, créé en 2004 par le batteur et parolier Giorgo Pinna et son frère, revient prestement dans la course. Et ce, à l'aune de son second et présent opus de longue durée, «
What Remains of the Day », une rondelle signée un an plus tard et cette fois chez l'éminent label italien Revalve Records, égrainant ses neuf plages sur une bande auditive de près de 50 minutes. En quoi ce nouvel effort se démarquerait-il de ceux de certains loups aux dents longues d'un registre metal aujourd'hui survinvesti en formations de tous poils ? Ce second mouvement constituerait-il le digne héritier de son illustre aîné, voire le bâton de maréchal du combo sarde, au point de le propulser dès lors parmi les valeurs montantes du metal symphonique à chant féminin ?
Dans ce dessein, le line-up de son devancier est resté inchangé. Ainsi, aux côté du maître d'oeuvre, retrouvons-nous la chanteuse Claudia Barsi, dont les claires et puissantes impulsions sont apparentées à celles de Päivi ''Capri'' Virkkunen (
Amberian Dawn), Marco Fozzi et Salvatore Moretta aux guitares, Andrea Pinna aux claviers, et Renato Pinna à la basse et aux growls. S'il n'a nullement tourné le dos à ses fondamentaux, le collectif ainsi constitué continuant d'oeuvrer en grande partie dans un metal mélodico-symphonique progressif, un brin cinématique et aux senteurs méditerranéennes, toujours dans la veine d'
Amberian Dawn (seconde mouture),
Epica,
Xandria (première période),
Diabulus In Musica,
Delain,
Against Myself et
Nightwish, certaines plages, dans le sillage d'
Ancient Bards, arborent dorénavant un caractère power symphonique plus affirmé aujourd'hui que naguère. Mais tel n'est pas le seul facteur d'évolution du projet...
Dans cette aventure, et afin de densifier d'un cran l'assise orchestrale du propos, ont également embarqué la bagatelle de vingt-cinq musiciens de studio, aux cordes, instruments à vent et percussions légères, pour l'essentiel. Produit par
Massive Arts Studios,
Jack Garufi et Alberto Cutolo, l'opus jouit d'arrangements instrumentaux de bonne facture, d'une belle profondeur de champ acoustique ainsi que d'une péréquation de l'espace sonore entre lignes de chant et instrumentation. C'est dire qu'à la lumière de ce nouvel arrivage, le combo italien aurait mis les petits plats dans les grands. De quoi attiser notre curiosité et nous pousser à insérer la rondelle dans le boîtier et à enclencher sans plus attendre la touche play de la platine cd...
A l'image de son prédécesseur, cet effort se plaît à nous bousculer, pour mieux nous retenir, in fine. Aussi, c'est d'un claquement de doigts que l'on esquissera un headbang bien senti sur « The Battle of
Marduk and
Tiamat » ; un tubesque et tempétueux up tempo à mi-chemin entre
Against Myself et
Delain, mis en exergue par les toniques inflexions de la déesse, recelant d'insoupçonnées montées en régime du convoi instrumental et décochant un vibrant solo de guitare en bout de course, histoire de fermer sereinement la marche. Tout aussi efficace, le frondeur et ''lacunacoilesque'' «
Rising Soul », pour sa part, livre un saisissant corps à corps entre une guitare chevaleresque et un serpent synthétique aux fulgurantes reptations. Enfin, on ne saurait se soustraire ni à l'énergie aisément communicative ni à l'entêtant refrain, ni même aux complexes mais poignants arpèges d'accords au piano du bouillonnant et intrigant « Secular Comedy ». Chapeau bas.
Lorsque le convoi instrumental se fait un poil moins véloce, la troupe trouve à nouveau matière à nous assigner à résidence. L'aficionado du genre se verra alors happé par la qualité des enchaînements intra piste, les somptueux arpèges au piano ou encore les grisants gimmicks guitaristiques dont se pare le mid/up tempo «
Von Braun » ; une version dans la langue de
Dante suivant stricto sensu le même cheminement harmonique et rythmique nous est également dispensée, une alternative linguistique toutefois sans réelle plus-value par rapport à l'originale d'un point de vue structurel. Se parant d'un léger tapping, d'une basse délicieusement vrombissante et d'un refrain catchy mis en relief par les serpes oratoires de la belle, non sans évoquer
Ancient Bards, le sculptural méfait joue lui également dans la catégorie des hits en puissance que l'on ne quittera qu'avec l'indicible espoir d'y revenir. Lui aussi estampé power symphonique, le mid/up tempo «
Endless Sky », quant à lui, nous octroie un pont techniciste bien amené et d'une confondante fluidité mélodique, où la rythmique se fait des plus offensives et les rampes synthétiques des plus vibrantes.
Quand il nous mène en des espaces tamisés, le collectif transalpin développe des arguments des plus émouvants, nous adressant par là même ses mots bleus les plus sensibles. Ce qu'illustre « Sandy's Flight », ballade romantique jusqu'au bout des ongles et aux airs d'un slow qui emballe, que n'auraient nullement reniée ni
Against Myself, ni
Delain. Glissant le long d'une radieuse rivière mélodique sur laquelle se calent les ''siréniennes'' volutes de la maîtresse de cérémonie, se chargeant en émotion au fil de sa progression, l'instant privilégié ne saurait être esquivé par l'aficionado du genre intimiste.
Mais, là encore, nos compères surprennent par leur faculté à concocter d'orgiaques plages symphonico-progressives aptes à happer le pavillon sans avoir à forcer le trait. Ce que soulignent «
Children of the
King » et «
What Remains of the Day », deux fresques technicistes de fort bonne facture mais nullement ostentatoires. L'une, au carrefour entre
Amberian Dawn et
Against Myself, essaime ses quelque 7:20 minutes d'une traversée aussi tumultueuse qu'enivrante, où de seyantes sonorités sud-méditerranéennes viennent compléter un tableau richement orné. Au fil d'un parcours parsemé de chemins de traverse, s'observent moult variations rythmiques, une basse claquante ainsi que deux soli de guitare qui pourraient bien laisser quelques traces indélébiles dans les mémoires de ceux qui y auront plongé le tympan. Non moins impulsive et dans la veine de
Tristania, la seconde offrande, elle, joue sur les effets de contraste pour tenter de l'emporter, disséminant ses growls caverneux parallèlement aux fougueuses impulsions de la princesse. Stratégie payante, in fine, l'énigmatique propos se faisant à la fois houleux, un zeste anxiogène et des plus liants.
A la lecture de ce second mouvement, on effeuille une œuvre à la fois sanguine, volontiers fringante, parfois énigmatique, empreinte de subtils harmoniques, et romantique à ses heures, confirmant les potentiels technique et esthétique pressentis sur leur premier jet. Tout aussi diversifié que son prédécesseur sur le plan rythmique, le cadet l'est en revanche un peu moins quant à ses ambiances, la touche méditerranéenne pourtant présente, se faisant ici plus timide qu'autrefois.
Plus complexe mais non moins efficace, n'accusant pas l'once d'un bémol susceptible d'altérer l'attention de l'auditeur, ce vivace et seyant méfait se suit d'un seul tenant.
Auteurs d'un set de compositions d'un caractère plus affirmé et varié, et développant un son désormais plus aisément identifiable, nos compères confèrent dès lors davantage d'épaisseur artistique à leur projet. Ainsi de louables progrès accomplis s'observent, et même si quelques prises de risques se font encore attendre, la troupe a suffisamment affûté ses armes pour se hisser dès lors parmi les valeurs montantes de ce registre metal. Bref, une complexe mais solaire et captivante offensive à mettre à l'actif de la formation italienne pour son second essai...
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