Après un solaire «
Phoenix », suivi d'un seyant «
Seven », plus remarqué encore, le groupe germanique né en 2017 à Aschaffenbourg sous l'impulsion commune de la chanteuse Nastassja Giulia et du lead guitariste Evangelos Koukoularis (dit ''Evan K'') n'allait pas s'arrêter en si bon chemin... Aussi réinvestira-t-il les studios quelque quatre années plus tard, pourvu d'un troisième opus de longue durée dénommé «
Venom », signé chez le puissant label étasunien Reigning
Phoenix Music. Quels seraient alors les arguments techniques et esthétiques des 10 pistes de la galette pour espérer voir nos belligérants tenir tête à la féroce concurrence dont ce registre metal continue de faire l'objet ? Par ailleurs, les 31 brèves minutes de la rondelle seront-elles à même de propulser nos acolytes parmi les valeurs confirmées du metal moderne à voix féminine ?
Dans ce dessein, nos deux maîtres d'oeuvre ont à nouveau sollicité les talents de David Hadarik à la guitare rythmique et de Dominik Stotzem à la basse. De cette étroite collaboration émane un propos metal mélodique moderne adjoint d'une touche rock gothique, à nouveau dans la veine coalisée d'
Amaranthe,
Delain,
Angelical Tears,
Lacuna Coil,
Evanescence et
We Are The Fallen, la petite touche personnelle en prime. Avec la participation, pour l'occasion, de : Zak Tell, lead vocaliste du groupe de rap metal suédois
Clawfinger ; Mirza Radonjica, chanteur du groupe de rock danois Siamese ;
Davey Suicide, chanteur américain du groupe de rock éponyme. Produit et enregistré par Evan K au
Epsilon Studio, à Aschaffenbourg, mixé et mastérisé par Christoph Wiczorek, chanteur et guitariste du groupe de post-hardcore allemand
Annisokay et producteur aux Sawdust Recordings, l'opus ne concède pas l'once d'une sonorité résiduelle. De quoi nous intimer d'aller fouiller le navire de fond en comble dans le secret espoir d'y déceler quelques pépites.
Comme il nous y a accoutumés, le combo révèle, là encore, sa capacité à essaimer ces séquences d'accords aptes à nous aspirer dans la tourmente sans avoir à forcer le trait, à commencer par ses plages les plus éruptives. Ce qu'atteste, d'une part, «
Venom », up tempo aux riffs acérés à mi-chemin entre
Amaranthe et
Delain, qui, tout en n'ayant de cesse de nous asséner ses cinglants coups d'olives, ne décoche pas moins un refrain catchy mis en habits de lumière par les poignantes impulsions de la déesse. Difficile également de résister à l'envie d'esquisser un headbang bien senti sous le joug des invitantes séries de notes dont se nourrit l'organique « I'd Rather Be
Dead » ; infiltré par la puissante et saisissante empreinte vocale de
Davey Suicide et s'écoulant au fil d'une sente mélodique, certes, déjà courue mais des plus efficaces, ce hit en puissance ne se quittera qu'à regret.
Dans une même dynamique, mais dans un souci de diversification atmosphérique, nos acolytes ont alors misé quelques espoirs de l'emporter par un soupçon d'originalité dont certains passages s'abreuvent. Aussi, on ne saurait davantage esquiver le rageur et intrigant «
Sayonara » tant pour son énergie aisément communicative que pour son inattendue et avenante touche nipponne. Dans une optique rap metal, cette fois, le pulsionnel et synthétique «
Fuck That Party » met en regard les claires ondulations de la belle et les serpes oratoires de Zak Tell ; un étourdissant méfait poussant à un headbang bien senti et quasi ininterrompu.
Lorsque le convoi instrumental ralentit un tantinet sa cadence, la troupe trouve à nouveau matière à nous retenir, un peu malgré nous. Au carrefour entre
Amaranthe et
Angelical Tears, les mid tempi «
Should Have Known Better » et «
Don't Call Me an Angel » se font des plus entraînants tout en décochant une insoupçonnée mais grisante montée en régime du corps orchestral. Et dans un cas comme dans l'autre, la sauce prend sans tarder. On pourra non moins éluder l'organique «
What We Used to Be » tant pour son seyant paysage de notes que pour son ''lacunacoilesque'' couplet, que relaye un refrain immersif à souhait mis en exergue par les fluides oscillations de la sirène. On retiendra encore l'enivrant mid tempo progressif « Dirt on My Mind », au regard de son chavirant et ''delainien'' refrain et d'un duo mixte en voix claire unissant les limpides modulations de l'interprète patentée et les chatoyantes inflexions de Mirza Radonjica.
Plus en retenue encore, d'autres espaces d'expression parviendront non moins à nous assigner à résidence. Ce qu'illustre, en premier lieu, « Unburn », power ballade aux riffs émoussés, à la confluence d'
Amaranthe,
Delain et
We Are The Fallen ; pourvu d'un fondant refrain mis en habits de soie par les pénétrantes patines de la maîtresse de cérémonie et glissant le long d'une radieuse rivière mélodique, le moment ouaté recèle, par ailleurs, une accélération des plus inattendues. Et la magie opère, une fois encore. Dans cette énergie, on optera encore pour « Let Me Go », ballade électro pop atmosphérique que n'aurait sans doute reniée Volturian. Voguant sur d'ondoyantes et magnétiques nappes synthétiques et se faisant éminemment sensuelle, cette féline offrande poussera assurément à une remise en selle sitôt son ultime mesure envolée.
A l'issue de cette traversée ô combien mouvementée, force est d'observer que nos compères ont concocté une œuvre à la fois rayonnante et des plus efficaces, se savourant à chaque fois davantage au fil des écoutes. Bénéficiant d'une ingénierie du son et d'arrangements instrumentaux de bonne facture sans concéder l'once d'une irrégularité, ce saillant et solaire opus se suit de bout en bout sans encombre. A la différence de son aîné, le méfait varie non seulement ses atmosphères et ses phases rythmiques mais aussi ses lignes de chant, pour un résultat des plus saisissants.
Pas encore totalement affranchis de l'empreinte de leurs sources d'inspiration mais instillant un zeste d'originalité à leur troisième élan tout en ayant savamment sculpté leurs sentes mélodiques, nos acolytes détiendraient là l'arsenal suffisant pour espérer se hisser parmi les valeurs confirmées du metal moderne à voix féminine. Affaire à suivre, donc...
Note : 15,5/20
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