Il en existe des machins bizarres dans le
Metal quand même... Et s'il y a bien une frange du métal où certaines aberrations musicales existent, c'est bien le
Doom Metal, ou le Black
Metal c'est selon. Quel genre étrange, le
Doom : il n'a pas réellement d'origine, même si d'aucuns disent qu'il provienne des toutes premières chansons de
Black Sabbath, ce qui remonte aux années 70... Tandis que le Black possède ses grands comme
Mayhem,
Immortal,
Gorgoroth,
Burzum,
Hellhammer/
Celtic Frost avec une filiation musicale relativement claire et nette, le
Doom est un genre pustuleux : il en pousse quelque part ici et là, sans qu'on sache trop pourquoi. Il faut dire que c'est un genre un peu bizarre, le : une musique lente, très lente, lourde, très lourde (
Burning Witch), qui pourrait rebuter l'amateur de
1349 ou de
Origin, et puis avec des arborescences plus qu'étranges (comme le
Drone Doom, vous savez, les curiosités de
Sunn O))), les moines sombres qui utilisent leurs guitares comme bourdons qui vous bousillent les oreilles, ou encore... le funeral doom).
Bah oui, on y arrive. Ils sont forts les Norvégiens pour nous sortir des trucs pas possibles ; c'est dans la charmante ville norvégienne de Drammen que naquit le groupe
Funeral, originellement Thomas Angell et Anders Eek, qui se sont formés une petite réputation avec leur superbe démo "
Tristesse" (en français je vous en prie), et pas n'importe laquelle puisqu'on disait quand même que
Funeral était le groupe le plus dépressif du moment. Avec
Tragedies, il a redoublé d'imagination et nous a placé en plus de la voix caverneuse et profonde ayant déjà opéré sur
Tristesse la jolie petite voie lyrique de Toril Snyen et les membres du groupe avaient affirmé vouloir faire un album plus mélodique. Et, finalement, qu'est-ce qu'il en est?
On ne sera pas dépaysé par les sublimes introductions des chansons de cet album, qui font honneur à celles de l'album précédent ; on regrette même qu'elles ne durent pas très longtemps, elles posent tellement l'ambiance moyenâgeuse qui fait le charme de ce combo, entre le baroque et le romantique, auquel les membres de
Funeral ont ajouté une voix lyrique féminine, pour mieux évoquer un oratorio. Mais l'illusion ne dure pas très longtemps avant que
Funeral nous entraîne dans les abysses de la
Tristesse...
De manière similaire à ce que
Funeral nous avait annoncé, le disque est un peu moins lourd que le précédent mais plus mélodique et la
Tristesse ne vient plus d'un écrasement de désespoir mais plutôt de la sérénade de la chanteuse et du duo de guitares qui jouent leur mélodie chacun de leur côté pour malgré tout faire un combo parfaitement complémentaire, se rapprochant des anciennes incarnations d'
Opeth comme
Orchid et Morningrise ; le growl est, quant à lui, très réussi, bien ténébreux et glacial comme il faut, formant un magnifique tandem avec la voix lyrique de Toril.
Ce qui est d'abord déconcertant, c'est réellement l'apparent déphasage mélodique entre les deux guitares d'une part, et par ailleurs le déphasage mélodique provenant des guitares et de la voix féminine. En réalité, cette alliance est véritablement épatante, et preuve d'un très grand travail d'écriture, même s'il est réellement déroutant au début, et n'ajoute pas à l'accessibilité de la musique, dont la lenteur et l'atmosphère a déjà réussi à en rebuter plus d'un. Cependant, mine de rien,
Tragedies accroche à l'oreille, posant une atmosphère bien particulière à
Funeral, une espèce d'angoisse macabre et suffocante qu'on retrouvait déjà dans
Tristesse, mais à laquelle le côté plus mélodique ajoute une situation temporelle déjà soupçonnée mais ici confortée, ainsi qu'une ambiance moyenâgeuse dans son côté le plus noir, au fond d'un tombeau avec son tas de pleureuses, de cantiques et des growls provenant des entrailles des enfers. Musicalement, les riffs accrochent quand même méchamment à l'oreille, et on compte des riffs réellement sublimes, très beaux mais assez difficiles à appréhender dans la mesure où finalement la musique est apparemment déstructurée, au fil du désespoir et sans but précis ; mais du coup, on ne s'ennuie pas une seconde au point de vue musical, même si à la première écoute c'est très ardu de tout apprécier d'un coup, la lassitude s'installe assez vite (en plus c'est profondément déprimant comme musique, quoi!). Pourtant on y revient, et peu à peu on explore le monde souterrain de
Funeral, on creuse et découvre petit à petit le trésor : immense variété de riffs mais sans que ça déborde de partout, maintenu par une grande maîtrise (il y a quelques solos quand même magnifiques et très bien calés), grande richesse musicale avec un très beau tandem growl/chant, et c'est tout de même vachement ambiant et désespéré, à filer les chocottes. Ainsi, mine de rien, après deux ou trois écoutes, c'est bon, on adhère.
Au début, on trouve ça indigeste, trop lent, sans intérêt, voire peut-être ridicule! C'est vrai que j'ai rarement vu dans le
Metal un groupe aussi relativement peu accessible. Personnellement, à la première écoute j'ai trouvé ça sympa mais bon, une chanson ça suffit. Et, au fur et à mesure, j'ai avancé dans le disque, je l'ai conquis, et maintenant cet album me tient vraiment à cœur après une découverte assez laborieuse (avant de l'aimer j'ai bien dû l'écouter quatre ou cinq fois). Donc, si j'ai un conseil à vous donner, si vous n'aimez pas, attendez un peu et redonnez-lui une seconde chance. Vous risqueriez de passer à côté d'un trésor (même si, bon, je préfère quand même
Tristesse, mais c'est le même topo). Et, dans la mesure du possible, plus le temps est dégueulasse, mieux c'est!
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