Nous ayant laissés sur le souvenir ému d'un poignant et romantique «
Mystery Timeline », son premier album full length, le duo espagnol revient dans les rangs quelque deux années plus tard. Et ce, muni d'un second effort de même acabit répondant au nom de «
The Most Attractive Force » ; une galette distribuée, à l'instar de sa devancière, par le label étasunien
Metal Hell Records, où 9 pistes s'égrainent sur un ruban auditif de 35 minutes. Ce faisant, quatre ans après sa fondation, sous l'impulsion du pluri-instrumentiste et vocaliste Jesús Pinilla, avec le concours de sa comparse, la chanteuse au gracile filet de voix Maria Jose Martos, le duo madrilène disposerait-il dès lors de l'arsenal suffisant pour lui autoriser l'accès au rang de valeur montante du metal atmosphérique gothique à chant mixte ?
Dans le sillage de son prédécesseur, ce propos d'obédience rock'n'metal atmosphérique gothique est, lui aussi, empreint de romantisme, de mysticisme et de mélancolie. La noirceur du climat de naguère se faisant toutefois moins présente aujourd'hui qu'hier, c'est dire que ce méfait se singularise de son troublant devancier. De plus, tout en conservant une touche pop-rock, une fibre progressive tend cette fois à prendre le pas sur la pointe jazzy d'antan. Aussi, les sources d'influence seraient davantage à chercher du côté de
Beseech,
Lacrimas Profundere,
Theatre Of Tragedy et
Darkwell que de celui de
Draconian. Une évolution stylistique qui a pour corolaire une production d'ensemble de bonne facture : à nouveau produit, méticuleusement enregistré, finement mixé et mastérisé par Jesús Pinilla, ce set de compositions fait montre de finitions cette fois passées au crible. A l'aune de ce second mouvement, il semble que l'on soit passé dans une tout autre dimension...
Un tantinet moins pulsionnel que son aîné, ce second élan n'en recèle pas moins quelques pistes aptes à déclencher un headbang quasi ininterrompu. Ce qu'atteste, en premier lieu, « Somewhere Else », mid/up tempo à mi-chemin entre
Lacrimas Profundere et
Darkwell ; doté de riffs crochetés adossés à une frondeuse rythmique, d'un fin legato à la lead guitare et s'écoulant le long d'une sente mélodique des plus avenantes sur laquelle se greffent les pénétrantes modulations du maître de cérémonie, l'enivrant effort ne saurait être éludé. On pourra également retenir « Before
Sunrise », mid tempo progressif dans le sillage coalisé de
Beseech et de
Lacrimas Profundere ; pourvu de riffs grésillants doublés d'ondulantes rampes synthétiques et mis en exergue par les impulsions tout en profondeur du vocaliste patenté que relayent les angéliques inflexions de sa comparse, ce hit en puissance poussera assurément le chaland à une remise du couvert sitôt l'ultime mesure envolée. Dans cette mouvance, « Romance II » imposera sans ambages tant ses couplets finement ciselés que son entêtant refrain encensé par les félins médiums de Jesús. Mais le magicien aurait encore d'autres tours dans sa manche en réserve...
Quand il retient un tantinet les chevaux, le combo trouve à nouveau matière à aspirer le tympan du chaland. A commencer par «
The Most Attractive Force », mid tempo énigmatique à la confluence de
Darkwell et de
Draconian. S'esquisse alors une piste des plus grisantes, reposant sur une mélodicité toute de fines nuances cousue et recelant un refrain immersif à souhait, mis en habits de lumière par deux interprètes en parfaite osmose. Par ailleurs, « Unfinished
Desire » se pose telle une ''floydienne'' ballade progressive, recelant de soyeuses nappes synthétiques et nous invitant à suivre un infiltrant cheminement d'harmoniques ; en outre, une saisissante densification du corps orchestral s'observe sur cette apaisante offrande mise en habits de soie par la caressante empreinte vocale de Jesús. Se chargeant en émotion au fil de sa progression, l'instant privilégié comblera, à n'en pas douter, les attentes de l'amateur du genre.
Lorsqu'ils ralentissent encore le rythme de leurs frappes, et comme ils nous y avaient déjà sensibilisés, nos compères se sont avérés particulièrement à leur aise. Ce qu'illustre, d'une part, « Romance I », chavirante ballade gothique dans la mouvance de
Beseech ; pétrie d'élégance, la tendre aubade se voit encensée par les suaves ondulations de nos deux tourtereaux et enrichie d'un bref mais fringant solo de guitare. On ne saurait davantage esquiver « Deeper Than You Know », ballade atmosphérique d'une confondante légèreté, témoignant d'arrangements instrumentaux de bon aloi. Calée sur l'un des sillons mélodiques les plus enchanteurs qu'empruntent les troublantes patines d'un vocaliste bien habité, l'aérienne offrande ne se quittera qu'à regret.
Plus difficile encore d'ignorer « The Wall of
Darkness », ballade romantique jusqu'au bout des ongles, sous-tendue par un duo en totale osmose ; voguant sur un tapis synthétique de velours porté par les vents ascendants, nous plaçant, de fait, bien au-delà du plancher des vaches, et nous gratifiant en prime d'un subtil legato, l'instant ouaté fera plier l'échine à plus d'une âme rétive. Enfin, unissant un violoncelle mélancolique à de délicats arpèges au piano, le laconique et classieux instrumental a-rythmique « Light Vein » refermera sereinement la marche.
En définitive, ce second mouvement nous imprègne de ses enivrantes séries de notes, mises en relief tant par les subtils schèmes d'accords les habitant que par les empreintes oratoires d'un duo parfaitement harmonisé et ayant gagné en aura ce qu'il n'a nullement perdu en sensibilité. Une technicité tout en discrétion mais des plus efficaces, des mélodies travaillées en profondeur et des plus immersives, une ingénierie du son plutôt soignée et des arrangements aux petits oignons sont autant de qualité à mettre à l'actif du duo ibérique. Aussi éprouve-t-on le désir d'y revenir en fin de parcours, histoire de plonger à nouveau dans cet océan de félicité.
D'aucuns, pour se sustenter, auraient probablement espéré un propos moins prévisible et un poil plus vitaminé qu'il n'apparait ainsi qu'un zeste d'originalité supplémentaire ; de relatives carences partiellement compensées par l'absence de bémols ou d'une quelconque zone de remplissage. Bref, un second élan profondément intimiste, apte à éveiller d'authentiques plaisirs, qui ne saurait empêcher nos acolytes de se hisser parmi les valeurs montantes du metal atmosphérique gothique. Du moins, on ne peut que le leur souhaiter...
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