The Meads of Asphodel est un groupe qui a décidé de ne pas s’arrêter à ses principales influences et à transformer son Black metal en quelque chose de plus étrange.
Après plusieurs démos en 98’ et 99’, le groupe anglais signe chez Supernal Music pour réenregistrer quelques titres, en composer des nouveaux, et compléter son premier album en 2000 par une reprise, et autres "instrumentaux" samplés.
Trois membres sur la pochette, du moins officiellement, car jusqu’à aujourd’hui le groupe emprunte à plein temps des "guest-stars" d’horizons musicaux différents se partageant compositions et écritures. Ici, il s’agit du groupe gothique History of Guns, le claviériste Kobold (de
Old Forest, ami du guitariste
Jaldaboath), l’ingénieur du son Andy
Marshall, et leur référence, le regretté Huw Lloyd Langton, ex-
Hawkwind, présent sur "Bene Ha Elohim" et la reprise, justement.
Le point fort de The Meads of Asphodel est que tous les morceaux sont composés à la perfection, compensant ainsi largement la production (que je trouve relativement mauvaise sur cet album, le son étant trop granuleux). Ainsi le titre "Bene Ha Elohim" est un petit chef d’œuvre car malgré un début des plus classiques (disons par rapport au reste de l’album), il embraye sur une sorte de jam durant lequel
Jaldaboath s’éclate à additionner les soli de guitares et de claviers, (d’après le livret, Huw Lloyd Langton jouerait aussi sur ce titre, mais il n’est pas précisé s’il se contente d’un solo, ou de toute la partie électro acoustique), tout comme sur la fin de "Agrat
Bat Malab".
Et comme souvent dans ce style, les variations de rythme dans le même morceau sont nombreuses ("Weeping Tears of
Angel Light" a un break central excellent, rappelant un peu celui de "Angelwhore" en plus rythmé, sur lequel
Metatron scande une sorte d’hymne à l’amour des anges…).
L’intro est une prière en latin (d’exorcisme ?) récitée par un italien (A.C.
Wild, du groupe
Bulldozer) sur un chœur de chants d’église et de sons de cloches.
Vous comprenez que The Meads of Asphodel n’hésite jamais à utiliser la moquerie pour donner son point de vue sur la religion (ou la nature humaine pervertissant les philosophies religieuses), et à retourner ses propres armes contre elle, quitte à la ridiculiser.
Les textes sont donc parfois hermétiques (tel que la citation du nom des anges et des nephilim de "Bene Ha Elohim", les dieux déchus de "
The Watchers Of Catal Huyuk"…), mais parfois tout de même plus compréhensibles, comme sur "Angelwhore", "Weeping tears of
Angel Light" ou "Falling with
Lightning Rays…".
Décrire leur musique est ardu, The Meads of Asphodel mélangeant ses influences punks et métal et les agrémentant des sons électro, de samples, bref le groupe complexifie sa musique pour enchainer des passages tour à tour planants ou violents, additionné d’ambiances un peu orientales, les claviers jouant sur des sons médiévaux ou, justement, plus arabes.
"Angelwhore" par exemple débute par un gros riff un peu simple (le seul exemple qui me vient en tête serait
Gallhammer) avec une rythmique rapide, et par dessus des claviers ultra présents, de petites notes façon clavecin, ou de nappes, surlignant le timbre grave de
Metatron, proche de la voix de
Cronos ou de Lemmy (claviers et voix sont deux caractéristiques très importantes des Meads), bref si la sonorité du clavier est étudiée, le reste paraît classique.
Puis le titre s’arrête sur un énorme break, la voix se fait péremptoire sur les nappes de clavier, sur lesquels s’ajoutent des sons de flutes et des chœurs angéliques, et l’on se sent emporté, on croirait presque atteindre les cieux.
Puis le riff revient comme si de rien n’était, un autre tour de manège et un second couplet, pour un final rapide et extrême, agrémenté d’un solo très entrainant, tout ça en à peine plus de trois minutes.
Certes la voix de
Metatron est particulière et assez grave, et il ne fait aucun effort lyrique, mais rassurez-vous, on s’y habitue vite, d’autant qu’il n’hésite pas à varier (chuchotements, hurlements de bêtes très fréquents, passages parlés, vocaux black…) devenant chevalier, ange, démon, amant, etc… au fil des morceaux.
S’il est vrai que le groupe s’est énormément bonifié avec le temps, tout a commencé avec cet album, et presque quinze ans après je l’apprécie toujours autant.
J’attire aussi votre attention sur les autres titres, notamment "
The Watchers Of Catal Huyuk" pour son riff saccadé et son refrain aux claviers épiques à souhait (il se conclue d’ailleurs comme "Angelwhore" par un solo final joué par dessus le refrain).
La reprise de
Hawkwind sur "
Assault and
Battery", est bonne, plus proche du style de The Meads of Asphodel que du groupe original, ce qui leur permet de se la réapproprier.
Quant aux deux titres électro/goth, "Jezebel and the Philistines" ressemble un peu à un sample de film porno et est interprété par History of Guns et "
Disembodied Voices of Melchizedek", morceau moins marquant mais presque dansant, est un duo entre Kobold et
Metatron (les claviers sonnent comme des petites flutes).
Comme sur "
Assault and
Battery", les claviers s’arabisent parfois, pour des effets surprenant sur "
Pale Bread Hunger", un titre assez rapide, et encore plus sur "Rise in
Godless Hell", ainsi que des percussions (à noter les premières notes jouées à l’envers, un vrai régal) pour un final plus rapide. Bien-sur, il y a peut-être une influence du titre "Jihad : The Grisly Din of Killing Steel", du disque suivant mais composé à la même époque.
Avec son titre à rallonge, "Falling with
Lightning Rays Beamed Throught the Blazing Firmament Towards the Untended
Burial Ground of Kharsag" est un excellent morceau commençant par un blast symphonique auquel votre oreille s’est désormais habitué, puis enchainé par un long final faisant furieusement headbanger l’auditeur (un peu en rappel de celui de "Agrat
Bat Malab"), dicté par
Metatron sur un clavier à nouveau arabisée (oui, la dernière partie de l’album annonce déjà le mcd "Jihad")
Jaldaboath compose tout, et
Metatron écrit tout, puis chacun apportant son lot d’idées, les titres finissent par s’assembler et s’organiser, offrant une grande cohérence (une certaine récurrence revient dans les couplets saccadés de "
The Watchers Of Catal Huyuk", ou "Agrat
Bat Malab" par exemple), et même s'ils sonnent un peu tous pareil, chaque morceau possède son identité et son ambiance propre.
Aucun titre à jeter, mais mes préférés restent "Weeping Tears of
Angel Light", "Bene Ha Elohim", "Rise in
Godless Hell", et évidemment "Falling with
Lightning Rays Beamed Throught the Blazing Firmament Towards the Untended
Burial Ground of Kharsag".
16/20
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