Liste des groupes Metal Progressif Regardless Of Me The Covenant

Il aura fallu patienter pas moins de six longues années avant de voir la formation italienne revenir dans les rangs depuis leur second et saillant opus « Pleasures and Fear ». Dans cette même mouvance dark gothique progressif sort un troisième album full length dénommé « The Covenant », dynamique offrande de 48 minutes sortie, cette fois, chez Sleaszy Rider Records. Bien loin des débuts tâtonnants de « The World Within » (2009), l'expérimenté collectif a pris le temps de faire mûrir ses compositions et d'affiner sa plume, et surtout la qualité de sa production d'ensemble. Ce qui s'en est déjà ressenti à la lumière du précédent effort, et plus encore au regard de cette nouvelle rondelle. Cela signifie-t-il que le groupe trans-alpin aurait reproduit à l'identique les recettes de son récent passé ? Pas si sûr...

Tout d'abord, quelques changements de line up se sont opérés. Si l'on y retrouve Emiliano Sicilia à la guitare, à la programmation, aux growls et aux screams et ses acolytes, dès 2012, la frontwoman Pamela Manzo a cédé le micro à Arys Noir, dont les félines impulsions se doublent d'une empreinte rock plus marquée. Ce faisant, nos gladiateurs délivrent désormais un message rock'n'metal gothique progressif et mélodique, avec une touche dark en substance. Cette fois, les rapprochements avec Draconian ou de Tristania, s'ils ne sont pas absents, inondent moins ce méfait que son aîné. S'y percevraient davantage des sources plus mélodiques telles que Lacuna Coil, The Gathering ou encore Autumn.

De cette nouvelle collaboration, le temps de la maturité aidant, se dégagent des arrangements d'excellente facture, une technique instrumentale difficile à prendre en défaut et des lignes mélodiques plus exigeantes et surtout plus seyantes, cristallisant les dix années d'existence du combo italien. De plus, un enregistrement ne laissant échapper que peu de notes résiduelles, un mixage bien ajusté entre instrumentation et lignes de chant et des enchaînements du même acabit que la précédente livraison, achèvent de nous convaincre d'une ingénierie du son passée au peigne fin. C'est dire que le groupe a bel et bien tourné la page depuis ses premières esquisses, ayant résolument élevé le niveau de ses aspirations, nous réservant en prime quelques surprises... Mais, entrons plutôt dans le vaisseau amiral...

Contre toute attente, la pièce dark gothique nous projette d'entrée de jeu dans un espace mélodico-symphonique que l'on n'attendait plus. Ainsi, s'ouvre-t-elle majestueusement à l'aune de « The Covenant », cinématique entame instrumentale aux arrangements nightwishiens, suivant la cadence métronomique d'un tambour martial. On se surprend alors à voir glisser de sémillants arpèges au piano corrélativement à d'enveloppantes nappes synthétiques. Impression de départ qui ne tardera pas à être largement démentie...

A l'instar de son aîné, ce manifeste n'a de cesse de faire rougeoyer les fûts, livrant moult up tempi propices à un headbang bien senti, souvent calés sur le schéma de la Belle et la Bête. Ainsi, les frondeurs « We Are », « Neurotic Traits » et « This Broken World », non sans rappeler les premières heures de Draconian, avec un zeste de Lacuna Coil, développent tous trois un riffing plombant parallèlement aux assauts répétés d'une rythmique incandescente. Trois passages dark gothique jouant à plein sur les effets de contrastes vocaux et mélodiques, alternant sans sourciller couplets gorgonesques et refrains enchanteurs. Et la sauce prend. Et comment résister à la déferlante sur « Amore Nero », magnétique effort aux troublantes sonorités indiennes ? Mais le spectacle est loin d'être terminé...

Dans une même veine stylistique et une dynamique rythmique similaire, le combo milanais a su démontrer plus encore son habileté à esquisser les séries d'accords qui font mouche dès la première écoute. Ainsi, difficile de ne pas succomber aux cinglantes attaques rythmiques et aux refrains catchy du tubesque « Losing You ». A mi-chemin entre un Lacuna Coil estampé « Dark Adrenaline » et Autumn, et mise en exergue par le duo mixte en voix de contrastes, cette vivifiante offrande révèle d'infiltrantes oscillations mélodiques. Bref, un moment de pure jouissance auditive, assurément voué à une certaine addiction pour ceux qui s'y seront laissés tenter. Dans cette mouvance, on n'éludera pas davantage les delainiens refrains ni les grisants gimmicks guitaristiques de « Nothing Can Last Forever », titre aussi efficace qu'incisif dans la veine de Tristania.

Comme pour nous rappeler ses fondamentaux gothique progressif, et de bien belle manière, le combo nous livre une petite fresque susceptible de laisser quelques traces dans la mémoire du chaland. Ainsi, tant le graduel épaississement de l'enveloppe instrumentale que les fines variations atmosphériques dont se pare « A Different Way » aspireront plus d'un tympan rétif. Dans ce bain orchestral aux bouillonnants remous, évolue un duo mixte en voix claires parfaitement harmonisé, prenant l'ascendant sur un refrain d'une précision mélodique d'orfèvre. Une plantureuse proposition laissant entrevoir une saisissante profondeur de champ acoustique et des finitions passées au crible. Chapeau bas.

Lorsqu'il relâche un tantinet la pression, l'inspiré combo parvient, là encore, à trouver les clés pour nous rallier à sa cause. Il le prouve à l'aune de la power ballade progressive « This Night », un gemme que pourraient bien leur envier Lacuna Coil ou Delain. Dans cette mer limpide à la profonde agitation intérieure, les aériennes inflexions de la maîtresse de cérémonie viennent nous chercher au plus profond de nous-mêmes pour ne plus en ressortir. Et ce ne sont ni le vibrant solo de guitare ni l'entêtant refrain qui nous feront lâcher prise, bien au contraire. On ne sera pas moins aspiré à la fois par le flow et l'atmosphère feutrée de « Weightless », énigmatique et chavirant low tempo progressif aux faux airs d'un Autumn des premiers émois, avec une touche de The Gathering (première mouture) sur les couplets.

Si l'on passera son chemin sur le répétitif et linéaire « Blue Apocalypse », le reste de l'opus, lui, ne saurait essuyer une quelconque désaffection d'un auditorat déjà sensibilisé aux travaux des maîtres inspirateurs de la troupe. On effeuille alors un message musical innovant, pétri d'inspiration, varié dans ses atmosphères, ses jeux rythmiques, ses joutes oratoires, mais aussi eu égard à ses exercices de style, ce qui manquait précisément au programme de son prédécesseur. Quant à la qualité de la production, elle n'a eu de cesse de s'affiner, se situant désormais à des années-lumière de celle de leurs débuts.

Force est de reconnaître que les progrès techniques et mélodiques accomplis par le combo au fil de leurs dix années de carrière sont réels, transparaissant dans chaque portée de chacune des partitions de l'oeuvre. De plus, nos acolytes ont su faire évoluer leur projet d'un point de vue stylistique, le valorisant dès lors par une maîtrise instrumentale et vocale dont la seconde offrande s'en était déjà fait l'écho, mais qui dorénavant s'est élevée d'un cran. Bref, un troisième effort susceptible d'asseoir le collectif milanais au rang des valeurs confirmées de son registre metal. Un groupe à suivre de près, donc...