Si une région nous a régulièrement habitués à un savoir-faire, une créativité et un talent éclatant dans le domaine du deathmetal technique et progressif, il s’agit bien de la province du Québec, respectivement poussée par le talent d’
Obliveon,
Gorguts,
Martyr ou
Augury au fil des années. Sur les traces de ses brillants ainés, le jeune
Beyond Creation se forme en 2005 à Montréal autour du guitariste chanteur Simon Gérard, du batteur Benoit G.Begin et du fameux bassiste Dominic Lapointe connu pour ses participations au sein d’
Augury,
Quo Vadis ou
Negativa. Le trio est rejoint deux années plus tard par le second guitariste Kévin Chartré, puis enregistre sa première démo en 2010.
Sous l’œil bienveillant de l’ingénieur Christian Donaldson (
Mythosis,
Cryptopsy),
Beyond Creation rentre en studio en tout début 2011 pour l’immortalisation de son premier album
The Aura, idéalement mis en image par Marco Hasmann qui multiplie les illustrations de qualité pour les groupes deathmetal du moment, comme
Fleshgod Apocalypse et bien d’autres encore. Difficile en revanche de dégoter le disque autrement qu’en import dans nos contrées européennes, tant les épaules de son jeune label PRC Music paraissent encore bien frêles.
Evoluant à la base dans un registre brutaldeath, à l’aide d’un batteur s’emballant régulièrement dans des blast-beats fracassants et des doubles pédalages tout aussi meurtriers,
Beyond Creation s’oriente plus précisément vers des sphères techniques et progressives, ne se fixant délibérément aucune limite et se posant des défis bien difficiles sur le papier. Nos deux guitaristes usent chacun d’une sept ou huit cordes, bénéficiant d’une assise rythmique sans faille de la part de Dominic Lapointe, débordant de feeling et désarmant de maîtrise sur sa basse fretless six cordes.
Dans ce domaine comptant finalement peu de prétendants à un tel niveau de jeu, le plus difficile reste la conciliation entre une technicité hors norme et une sensibilité donnant la vie à chacun des morceaux, et il s’agit bien là du fabuleux pari remporté par
Beyond Creation dès son premier effort. Loin d’un assemblage froid et purement mathématique, le quatuor crée un ensemble polyphonique et polyrythmique brutal et somptueux, emmené par un couple basse/batterie riche & solide ainsi que par deux guitaristes entremêlant leur lignes avec une apparente facilité & une fluidité remarquable, fruit d’une maîtrise instrumentale et d’une force d’interprétation peu communes.
L’enchevêtrement magique des riffs de l’instrumental Chromatic
Horizon, le somptueux interlude acoustique Elevation
Path, les passages centraux tout aussi enivrants de
Coexistence, les montées en puissance du morceau éponyme et son final tout aussi poignant, l’équilibre incroyable de la pièce finale The Deported s’étalant sur 11 minutes n’ayant jamais parues aussi courtes, le tout magnifié par les lignes de basse tantôt folles ou mélancoliques de Dominic Lapointe et les soli saisissants de nos guitaristes, sont autant d’éléments mettant le deathster sur les genoux au fil des écoutes, faisant oublier le chant guttural et les cris de Simon Girard manquant un peu du même éclat.
Oeuvre death technique indispensable de ce premier semestre 2011, panel d'émotions assorti d’un discours sobre & posé,
The Aura crée ainsi la surprise pour un premier essai, jouissant d’une créativité et d’une qualité d’interprétation que quelques ténors pourraient bien lui envier, à l’image d’un
Pestilence pourtant aguerri s’essayant plus difficilement aux guitares sept cordes sur son album Doctrine paru à quelques jours d’intervalle. Proche d'un univers enivrant que
Necrophagist et
Obscura sont parvenus à créer dès leur second effort,
Beyond Creation ne manque plus que du soutien d'un label solide pour se hisser définitivement au premier plan du style.
Fabien.
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