On le sentait venir, on le savait, cela finirait inéluctablement par arriver, sur que des millions d'ados à frange attendaient cela avec impatience, ou alors s'étaient-ils déjà délectés des étrons pondus par des ersatz de bas étage... quoi qu'il en soit il était certain que la fusion entre Metalcore et Electro finirait par se produire.
Ben en réalité ce n'est pas tout à fait nouveau, tout le monde se rappelle encore des immondes
Attack Attack! et de leur morceau Stick Stickly, improbable mélange de
Deathcore furieux ultra parodique (la posture des guitaristes qui verra le groupe taxé de « Crabcore ») et de vocaux de teenagers passés au vocoder le tout saupoudré d'un passage dance mielleux qui tombe comme un poil de cul dans votre assiette de spaghetti bolognaise. A gerber, tant cela ressemblait davantage à une opération com' pour jeunes bourgeois rebelles décérébrés qu'à une véritable innovation artistique.
Les plus connaisseurs d'entre vous ont peut être eu vent des Fear and Loathing in Las Vegas, groupe japonais composé de teenagers, mélangeant Electro typé Dancefloor et Metalcore, qui pourrait être intéressant s'il ne se sabordait à coups de singles Dance/Rock où une insupportable voix vocodée (décidément) surplombe des guitares électriques dont le mixage calibré au possible ferait passer Emma Daumas pour une activiste forcenée de l'underground.
Bref l'Electro-Metalcore (ou du moins les vaines tentatives pour y parvenir) c'était surtout de la grosse bouse... mais ça c'était avant... avant
Crossfaith. Quintet japonais (comme leurs compatriotes cités un paragraphe plus haut) originaire d'Osaka formé en 2006,
Crossfaith débarque en 2009 avec un premier album fracassant, première véritable synthèse de deux styles musicaux absolument opposés. Contrairement aux groupes hybrides d'Electro-
Metal en tous genres,
Crossfaith n'utilise pas la froideur des sonorités électroniques pour donner un apsect mécanique et autoritaire à sa musique, non
Crossfaith entend bien utiliser des éléments Electro plus « hypes » et « dansables ».
Passée l'intro de 2 minutes allant crescendo et donnant l'impression d'écouter un album de transe instrumentale, l'auditeur peut enfin goûter au génie de
Crossfaith. Mirror, véritable premier titre de l'album débute, synthétiseurs « wah-wahisés » s'apparentant à une voix humaine pitchée, à la fois très mainstream et expérimentaux donnent le ton, tout de suite imités par les guitares, la tension monte, les roulements de batterie finissent d'instaurer le suspense... puis un riff monumental, à la fois mélodique et puissant, accompagné d'une partie de double pédale meurtrière nous rappelle enfin qu'on est bel et bien en train d'écouter un album de
Metal. Le morceau s'emballe alors dans un Metalcore survolté aux riffs incisifs, de facture somme toute classique mais inspiré. Puis les éléments électro refont leur apparition, des synthétiseurs qui n'auraient pas fait tâche sur un album de Dance, mais utilisés ici d'une telle manière qu'ils collent parfaitement avec la musique, superposés par dessus la guitare et apportant une dimension totalement hallucinante et onirique aux morceaux.
Et que dire de Blue, certainement le morceau qui résume le mieux
Crossfaith? Un riff mélodique et énergique, une accélération Metalcore et un break électro monstrueux, surpuissant et expérimental, sur lequel on ne peut s'empêcher de Headbanguer comme un forcené, une nouvelle accélération Metalcore puis nos 5 japonais nous rejouent ce même break mais à un tempo deux fois plus élevé. Tout s'enchaîne à une vitesse folle , refrain, couplet, pont, nouveau break ultra lourd avec des notes de piano cristallines, puis un dernier refrain survolté... 3 min 53 secondes, ça passe vraiment vite...
Certes résumé de la sorte cela n'évoque pas forcément grand chose, mais une seule écoute suffit à comprendre le potentiel et l'intelligence du groupe. La recette de
Crossfaith s'appuie sur quelques éléments élémentaires. Tout d'abord une énergie incroyable développée par le groupe, qui se ressent notamment au niveau du jeu de batterie à la fois technique, riche et survolté (sincèrement quel batteur!), ajoutez-y des morceaux relativements courts mais avec de nombreux riffs, donnant une impression de « morceaux à tiroirs » résumés en 4 minutes au lieu de 8. Enfin un certain talent de composition est nécéssaire pour relier le tout et lui donner une cohérence. Dans ce contexte les synthétiseurs donnent à la musique du groupe toute sa dimension et sa folie, donnant un aspect volontairement expérimental et surchargé à certains passages (les mini soli de synthés sur Ficion In
Hope) mais qui sonnent tellement juste tant ils siéent à merveille à la musique dense et somme toute complexe du combo.
Nous pourrons bien évidemment rouspeter quant à la durée de l'album, incroyablement courte avec seulement 25 minutes, 8 titres dont une intro, un interlude et une outro, ainsi que pour un dernier titre, K, un poil en deça des autres en terme de qualité et d'originalité. Néanmoins on ne peut que rester bouche bée devant cet improbable mélange d'énergie, de technique et de génialissimes expérimentations sonores qui apportent une touche onirique à la musique (
Voices).
The Artificial Theory for the Dramatic Beauty est une bombe, le genre d'albums qui pose les bases d'un style nouveau et qui risque malheureusement d'engendrer de nombreux suiveurs. Juste un mot: Grandiose!
Après Enter Shikari inclut également beaucoup plus d'éléments (notamment sur leurs sorties plus récentes) hip hop/funky ce qui donne ressemble davantage à de la fusion.
Après je ne nie absolument pas le fait que cela ait pu être fait avant, mais j'admire ici davantage la qualité de composition qui permet de réaliser un mélange cohérent des éléments Metal et Electro.
J'avais hésité aussi à citer Genghis Tron dans ma chronique mais on n'était pas vraiment non plus dans la même catégorie.
@MarkoFromMars c'est définitivement Enter Shikari qui a été le premier à faire de l'electronicore
Et c'est également Attack Attack! qui a influencé bien bien d'autres, dont Fear, and Loathing in Las Vegas justement
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