On pensait le sentier complètement bouché, les principaux concernés affirmaient eux-mêmes que n’existaient plus que les ruines fumantes ou les anciennes gloires à perdurer sans que rien de nouveau n’émerge, rien de sérieux ni de viable sur le long terme.
Dani
Filth, Nick Holmes ou même Steve Harris le disaient, il n’y a plus de scène metal anglaise. Ces derniers avaient bien embarqués
Bullet for my
Valentine avec eux mais, premièrement, une partie du groupe était galloise et il est difficile de considérer
Bullet comme un projet viable sur le long terme, malgré toute l’objectivité et le bien que l’on peut penser d’eux. Reste les mastodontes des années 80, les maitres des années 90 (
Paradise Lost,
My Dying Bride, Cradle of
Filth,
Bal Sagoth…) mais bien peu de noms viennent spontanément à l’esprit lorsque l’on évoque les années 2000.
Cependant, les choses changent…une nouvelle ère moderne a émergé et des artistes tendent à créer une unité, une diversité capable de porter un genre vers le haut. Nous pensons à TesseracT, à
Architects qui a livré en début d’année un opus de metalcore balayant très loin les clichés…et aussi à
Helloween qui propose aujourd’hui un album au concept ambitieux et rare, à la musique riche et coloré et surtout à la personnalité qui, si elle reste encore à parfaire, pose les lignes d’un futur déjà tracé.
"
The Amanuensis" évoque le voyage de l’esprit à travail le bouddhisme, il représente le cycle de la vie : à savoir la vie, la mort et la renaissance. Onze compositions d’un mathcore très progressif, définition même du metal de demain, mélangeant des riffs syncopées à une très forte (poli)harmonie, des vocaux clairs et éthérés mais parfois très extrêmes, des sensations passant de la douceur pure à la brutalité sans équivoque. Si
Helloween ne possède pas encore un line-up stable (pour preuve, le changement de vocaliste juste avant l’enregistrement de l’album), il possède en revanche une personnalité qui pourrait les aider à se démarquer dans les mois à venir.
Parlons d’ailleurs du changement de chanteur, car Chris Barreto est une sacrée perle qui est pour beaucoup dans la personnalité du disque. Si son chant scream est relativement traditionnel et écorché, c’est particulièrement dans ses nombreuses interventions claires qu’il tire son épingle du jeu, évoquant certainement des schémas déjà utilisés dans
Periphery mais avec une émotion et une identité bien plus forte. "
Origin of Espace" est une jolie preuve de cet exploit tant les contrastes y sont importants. Les riffs sont syncopés et mécaniques, le chant extrême abreuve une violente rage mais le travail mélodique en arrière-plan est simplement fabuleux. Il faut plusieurs écoutes pour déceler les multiples mélodies, le chant clair et les lignes de chant parfois triplées, les nappes synthétiques très pop pouvant même évoquer Muse mais dans un contexte bien plus moderne et technique.
Évidemment, les noms de
Meshuggah ou The Dillinger Espace Plan ne seront jamais loin mais de la même façon qu’un groupe de speed aura toujours des réminiscences d’
Helloween ou un groupe de thrash des traces éparses de
Slayer.
Helloween a bien plus à proposer qu’une simple copie, bien que le travail d’interprétation pour adhérer à l’album soit assez difficile. On ressent un fort potentiel, pas complètement exploité mais qui semble annoncer un futur encore meilleur.
"
Saga City" par exemple, propose le penchant le plus mélodique du groupe, bardé d’arpèges, de multiples changements de rythmes, de petites cassures mais toujours dans un esprit aérien, un imaginaire où la batterie est « caressé » plutôt que frappé, à la manière d’un
Cynic, avec un feeling tout en groove. Cela n’empêche pas aux anglais de délivrer un "The
Alchemist" d’une brutalité inouïe dans le cadre du disque, notamment dans sa première partie. Le jeu des huit-cordes, la perfection du son (merci les homes studio !) et la lourdeur des riffs écrasent littéralement l’auditeur avant qu’un refrain entrecoupé de quelques magnifiques parties claires ne le fasse sensiblement sortir la tête de l’eau (cette partie semi-acoustique à deux minutes…).
Helloween devra en revanche faire attention à ne pas en faire trop, quitte à parfois lasser sur des titres redondants ou manquant singulièrement d’originalité. "Horcrux" tombe un peu dans ce travers, bien qu’il soit sauvé par le chant clair, ses couplets entrant trop dans un moule metalcore déjà entendu trop souvent ces derniers temps.
Terminant son périple initiatique sur le dépaysant "
Samsara" (contraction du prénom du personnage principal « sam » et son penchant féminin « sara » évoquant la dualité homme/femme ainsi que le ying et le yang), "
The Amanuensis" est une expérience à vivre car elle est très certainement les prémices de quelque chose de plus grand.
Pas encore exempts de défauts, que l’on fera passer pour des péchés de jeunesse, ce second disque est en revanche une belle porte pour découvrir le monde en plus grand, partir en tournée et se forger une plus grande renommée. Car si
Helloween parvient à corriger ses petits défauts, améliorer sa pertinence entre les chants et éviter de tomber parfois dans un piège trop démonstratif, alors ils s’ouvriront un monde infiniment plus grand et riche. Celui où les artistes y côtoient la perfection et le graal…
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