Quoiqu'en pensent certains esprits critiques, il n'existe qu'une marge très étriquée dans laquelle les musiciens peuvent affirmer une personnalité propre. Cette affirmation de soi, parcours initiatique fondateur, passe essentiellement par le particularisme de musiciens particuliers ou par le singularisme d'une musique singulière. Et, soyons francs, peu réussissent véritablement dans cette quête.
Pourtant, parfois, la lumière jaillit de ces ténèbres où nombres de groupes se complaisent négligemment en un terne marasme. Les Américains de
Steelheart sont indéniablement de ces éblouissements dont, même le temps, ne parviennent pas à ternir l'éclat. Formé en 1981, il apparaît des plus complexe d'évoquer la carrière de ce groupe sans parler d'emblée des exceptionnelles qualités de ses musiciens, et notamment de son chanteur, Mike Matijevic, dont l'organe remarquable évolue en des hauteurs admirables avec une aisance et une facilité déconcertante. De plus la tenue notable de ces aigus ne se fait non sans puissance et sans corps, réussissant en ce défi osé alors que nombres d'autres échouent. Cette voix extraordinaire offre évidemment un caractère instantanément spécifique, et personnel, à un groupe, dès lors, singulièrement séduisant. Pourtant le talent seul, même distinctif, ne suffit pas à exceller au sein d'une scène où nombres ont déjà marqué de leurs empreintes indélébiles les esprits repus d'un auditoire exigeant.
Après avoir écumé les nombreuses scènes, même improbables, de sa terre natale durant de nombreuses années, et, aussi, à force de persévérance ; le quintette verra ses efforts récompensés par la signature du premier contrat et par la sortie d'un premier album éponyme prometteur. Il faudra encore attendre deux ans avant que ne sortes ce
Tangled in Reins.
Toujours mû par cette volonté de proposer un
Hard-US racé, duquel transpirent les ascendances notoires de groupes tels que Motley Crue,
Tora Tora ou, dans une moindre mesure,
Skid Row ; Mike Matijevic et les siens nous proposent une œuvre à la dynamique communicative délicieuse. S'égarant dans les méandres d'influences variées, mais assez symptomatiques de la musique de ces années-là,
Steelheart déambule en des lieux plus accorts les uns que les autres. Des délicieusement entraînants
Loaded Mutha ou Sticky Side Up, en vagabondant par les détours des efficaces et excellents Late For The Party, Love'Em
And I'm Gone, Dancin'in the
Fire aux riffs énergiques, en divaguant par les paysages moins allègres d'un plus pesant Electric Love Child ; le groupe nous propose un parfait récital du genre. Et même les exercices de style obligatoires que sont les ballades All tour Love et la jolie
Mama Don't you
Cry, qui s'achève sur une charmante chorale enfantine, ne parviennent pas à obscurcir l'horizon, décidément, aveuglant que nous propose cette œuvre.
D'autant plus qu'à ce récital, à mon sens suffisamment irréprochable pour mériter de reconsidérer le statut de ce quintette sur le vieux continent, il faut encore ajouter la perfection du sublime morceau
Steelheart. Ce titre éponyme, inhabituellement nerveux et rapide pour le genre sur lequel Mike Matijevic se déchaîne véritablement, vaudrait, en effet, à lui seul, nombres d'éloges suffisant à remplir encore quantités de lignes.
Tangled in Reins demeure donc un album ignoré qui pourtant, au vu de ses nombreuses qualités, mériterait une juste reconnaissance. Révélateurs des capacités incroyables de son chanteur, cette œuvre reste éminemment séduisante par bien des aspects. Gageons qu'un jour, qui sait, elle aura, enfin, l'opportunité de se hisser à une place bien plus méritoire que croupi au fond de cet oubli dans lequel elle ne finis plus d'agoniser.
Vous devez être membre pour pouvoir ajouter un commentaire