Moins réputé que ses congénères et compatriotes «
Pentagram » et «
Saint Vitus », «
Iron Man » (qui doit son nom, rappelons-le à un titre du même nom de «
Black Sabbath ») est aujourd’hui rendu à son cinquième album, après 25 années d’existence. Sa réputation, bien qu’encore modeste, doit en grande partie au personnage d’Alfred Morris, guitariste chevronné, véritable leader de la formation. Récemment, il y a introduit deux petits nouveaux : Dee Calhoun au chant et au piano depuis 2010, un type déjà bien rodé, qui a été présent dans de nombreux autres projets ;
Jason Waldmann derrière les fûts à partir de
2012, en remplacement de Mike Rix, qui a fait un passage impromptu au sein d’«
Iron Man ». Avec cette fine équipe et épaulé par son camarade Louis Strachan, sir Morris est bien décidé à s’attaquer cette fois à la planète entière. Il obtient une signature pour «
South of the Earth » de
Metal Blade Records pour une diffusion nord-américaine, et de Rise Above pour la distribution en Europe. On ne pourra pas dire qu’il fait les choses à moitié. Il aurait été regrettable que l’hémisphère nord de la Terre soit épargné.
L’œuvre en question débute par le titre éponyme. Dès lors, nous sommes confrontés au son gras et extrêmement graveleux de la basse, prenant une forte inspiration stoner. Le tout délivré est pesant, presque étouffant, agissant par à-coups percutants, par secousses. On pourrait pratiquement voir là une sorte de mimétisme par rapport au dernier full length délivré par son ascendant «
Pentagram » qui a également grandement associé la musique stoner à son heavy doom habituel sur son forfait de 2011, «
Last Rites ». Seulement «
Iron Man » n’est pas né de la dernière pluie. Les effets de brouillage sonore que nous percevons avaient déjà été de mise sur son «
I Have Returned » de 2009. C’est surement en grande partie dû au recrutement de Louis Strachan dans les années 2000, que la patte stoner de «
Iron Man » s’est clairement affirmée, en débit des pratiques volontairement psychédéliques de son génial guitariste et leader, Alfred Morris, grand admirateur de Jimi Hendrix.
Nous relevons bien ces torsions psychédéliques à travers « A
Whore in
Confession », éminemment ténébreux au possible, et donnant une place primordiale au chant de Dee, absolument saisissant par sa puissance. Nous avons là un admirable chanteur qui privilégie d’une voix admirable, à la fois dans sa clarté et dans sa virilité. Il s’illustre éloquent, meneur sur l’extravagant et rentre-dedans « IISOEO (The Day of the
Beast) ». Les riffs bien charpentés et d’une grande solidité laisseront sortir un petit solo délectable comme affectionne tant Alfred Morris. On regrettera malgré tout quelques contre-performances du dit-guitariste, notamment sur un larvé et redondant « In the Velvet
Darkness ». Il se révèlera juste un peu trop faiblard pour certains, hormis le chant toujours aussi efficace de sieur Dee Calhoun. Le constat est un peu identique pour « The
Ballad of Ray Garraty » (morceau inspiré du récit « Marche ou Crève » de Stephen
King). L’extrait nous met longtemps en haleine, en attente, jusqu’à s’épuiser ensuite dans des longueurs laborieuses. Nous aurions espéré une composition mieux agencée.
Le groupe avait réalisé une plus belle et authentique ballade quelques pistes avant. Il faudra retenir ce très doux moment qu’est l’acoustique « Ariel Changed the Sky ». On y perçoit une guitare, légèrement mise en écho, perçant l’obscurité par sa fraicheur, comme pouvait le faire un Mark Knopfler dans ses meilleurs moments. L’ombre aura néanmoins sa vengeance avec un lourd et boursoufflé « Half-Face / Thy
Brother's Keeper » assez sympathique, malgré ses proportions ventrues, son accent groovy, que l’on retrouve fréquemment dans le doom metal nord-américain. De même on aura aucune difficulté à s’accommoder de la noirceur d’un «
Hail to the
Haze » et de ses riffs bourdonnés. Les airs ténébreux, malsains et paradoxalement attirants ont fait la renommée des groupes américains. En premier lieu de «
Pentagram », dont on aperçoit la terrible silhouette sur le très inquiétant « The
Worst and the Longest Day ». Titre particulièrement immersif, qui révèle un «
Iron Man » aux multiples visages.
Un monument du doom metal américain se révèlerait ainsi au grand jour avec une distribution internationale enfin à la hauteur du phénomène. Si beaucoup d’amateurs n’ont encore jamais entendu parler du projet «
Iron Man » d’Alfred Morris, ce n’est certainement pas dû à un défaut de talent. Il est toutefois un peu dommage que la pièce sous les projecteurs en 2013 n’arrive pas au sommet atteint par certains de ses prédécesseurs. Il donnera peut-être envie à certains curieux de s’intéresser à des pièces remarquables comme «
The Passage » ou «
I Have Returned ». Ils n’auront rien à perdre dans l’aventure. D’ailleurs «
South of the Earth » confirme les nouvelles rondeurs grasses et stoner qu’avait pris le groupe avec «
I Have Returned ». A défaut d’excellence, on peut combattre l’ignorance.
14/20
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