Les premiers succès, les premiers chèques, les premiers problèmes de drogue. L’histoire aurait pu s’arrêter à
Oriental Beats, et
Hanoi Rocks n’être qu’un drôle d’oiseau, intrigant, au sein de « l’Electric
Circus » qui émerge au début des années 80.
Hanoi Rocks aurait pu disparaître dans le magma anonyme des groupes doués d’un énorme potentiel qui n’ont pas eu le temps de faire leurs preuves, trop vite consumés par le mode de vie … inhérent à la profession. Non, le combo d’Helsinki aura droit à la totale, le plus beau reste à venir pour eux. Et le plus tragique…
En 1982, les Muddy Twins font la connaissance d’un jeune batteur, Nicholas « Razzle » Dingley à un concert de Johnny Thunders. Quel meilleur endroit pour une telle rencontre ? Et quel meilleur moment aussi, puisque des tensions commencent à ronger le groupe, nourries par les excès de drogue de Gyp Casino qui n’arrive plus à assurer ses parties de batterie. La magie n’opère plus, comme en témoigne la sortie du bien-nommé
Self Destruction Blues, composé de démos et de morceaux issus de sessions d’enregistrement des albums précédents. Fan du groupe, Razzle saute sur l’occasion, remplace Gyp et permettra au groupe de signer son retour avec Back to the
Mystery City (et doux Jésus quel retour). Razzle n’est pas encore derrière les fûts même s’il figure sur la pochette, c’est bien son prédécesseur déchu qui joue à la batterie. Que dire de
Self Destruction Blues, rejeton non désiré de la discographie du groupe ?
Love’s An Injection lance l’album avec une ligne de piano pressante, au parfum trip-qui-tourne-mal. Avec « Love’s Hot, Love’s an Injection »,
Hanoi Rocks fait du
Hanoi Rocks et le fait plutôt bien! L’entame est très sleazy, le groupe officie dans ce paradoxe du glam sale que l’on lui connait bien, où l’amour, le sexe, la drogue et la misère, formant son univers, se côtoient dans les textes de Monroe. Sa voix, pas toujours juste, peut amener à penser que la chanson a été écrite pendant l’enregistrement de Bangkok Shocks, Saigon Shakes,
Hanoi Rocks, mais qu’elle n’a pas été retenue. Peut-être à cause du piano? Car, si le premier album est dominé par le duo de guitares Andy McCoy et
Nasty Suicide, ce troisième album est marqué par la diversité des instruments, des styles et influences du groupe.
I Want You est un Rock n’ Roll entraînant assez proche de l’esprit des années 50 avec son riff de guitare caractéristique et son petit saxo du plus bel effet. Porté par un
Michael Monroe proche de la désinvolture d’un chanteur punk, ce morceau est taillé pour les live de bars miteux et autres obscures salles de concert des bas-fonds. Café Avenue complète ce tableau de jungle urbaine, sorte de fausse ballade par son thème. Sous ses airs de pop légère, la chanson évoque un retour nécessaire à la prostitution et entretient le flou entre le groupe et celle-ci. Alors, gigolo ou simple blague entre membres de groupe ? En tout cas, Café Avenue n’est pas dépourvu d’émotions, entre les chœurs du refrain et des paroles troublantes de réalisme chantées sur un ton résigné en parfaite adéquation.
Dead by X-Mas est du même esprit. Monroe prédit qu’ « il sera mort à Noël de toute façon » d’abord de manière désespérée puis colérique. A caser après « White Christmas », au Réveillon donc!
Mais le morceau le plus exotique de
Self Destruction Blues est probablement
Kill City Kills qui montre l’étendue de la palette d'influences de
Hanoi Rocks. Section rythmique Disco/Funk, percussions latines, guitares rock, ce joyeux melting-pot peut surprendre mais ne dénote pas du reste de l’album qui regroupe plusieurs chansons d’une sensibilité résolument pop, où le piano prend la place de la guitare en tant qu’instrument principal. Whispers in the
Dark en est un exemple, avec sa ligne de synthé fantomatique très FM années 80, chose assez inhabituelle pour le groupe (un hit qui ne veut pas dire son nom?).
L’album laisse toutefois l’impression d’explorer plusieurs directions mais de ne s’engager dans aucune d’entre elles. L’effet compilation se fait ressentir, car, à côté de ces compos, se trouvent de vrais brûlots comme Beer and a Cigarette, Problem Child, certainement leur chanson la plus punk, et Taxi
Driver qui annonce dans sa basse vicieuse et son atmosphère dérangée ce que sera Back to the
Mystery City. Mentionnons aussi le blues complètement déraillé qui donne son nom à l’album, où la voix et l’harmonica saturés donnent une dimension « narcotique » au genre.
En définitive, un album B?
Self Destruction Blues est très hétérogène et manque peut-être de cohérence en tant qu’album, en tant qu’ensemble. Blues, Punk, Disco, Funk, Pop... les chansons sont issues de plusieurs périodes d’écriture et ça se ressent, bien que cela ne fasse pas du tort à leur qualité intrinsèque. Quoi qu’il en soit, une galette frappée du sceau
Hanoi Rocks, reniée ou non, ne demande qu’une seule chose : just push play comme dirait le « Twin » d’une autre fratrie!
Merci pour la kro de ce disque au doux parfum de nostalgie ! :)
Le meilleur des 3 premiers albums, pour moi.
16/20
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