« Har
Sabbat! Har
Sabbat! » entend t-on au loin au beau milieu de la nuit, illuminée par la seule pâle couleur d’une pleine lune misanthropique. Des hurlements de ralliement ne pouvant faire attirer que les loups ou tout vil créature prédatrice issue des plus profonds terriers.
«
Opera IX » est une formation italienne oscillant et mélangeant insidieusement paganisme et satanisme. On aurait pu douter un temps de leur dessein proprement maléfique sur leur premier album «
The Call of the Woods », qui exprimait une forme de retour aux sources, au culte des esprits et des dieux païens. Ils ont, jusqu’à lors, su entretenir le doute, se jouant de notre naïveté. Sur «
Sacro Culto », 2ème réel forfait du groupe, sorti en 1998, le masque tombe brutalement, et il est déjà trop tard pour nous pauvres victimes. Nous voilà déchus en plein sabbat nocturne, sous le patronage du diable en personne. C’est une fois les convives tous rassemblés que la reine du sabbat, amenée au milieu de la scène commence la cérémonie rituelle.
Dès cet instant notre corps se fige par l’écoute d’une voix stridente haineusement poussée par
Cadaveria. La guitare et la batterie en double pédales sont frappés par la même possession démoniaque, et s’exécutent dans une mise en branle rapide et rageuse. Principalement sur « The Oak », ces instruments semblent, pendant une longue période, totalement inconscients par ce qui les entourent. Et continuent de se repaitre dans une même frénésie terrorisante, sans démordre, tels de vrais bêtes effrénées. Les vitesses finissent par s’alterner de manière très variables et de façon assez étrange, jouant sur la discordance et la confusion. Une pareille situation serait sans doute due grâce ou à cause des quelques apparitions accablantes produites par le synthé, placé sous la main de
Lunaris, leur nouveau claviériste de l’époque. Les périodes de breaks n’atténuent en rien l’hostilité. C’est un son rapace qui ne fait que tourner autour de sa proie, avant de se fondre à pleine vitesse sur elle, sous les injonctions féroces de
Cadaveria, reine du sabbat.
« The Oak » figure comme un élément plus rigide par rapport à ce qui va suivre. Et dès l’ouverture de « Fronds of the
Ancient Walnut » l’air étouffant se rafraichi. La guitare devient légère et s'affranchie de la maîtrise du chant. Néanmoins, celle-ci se montre toujours aussi véloce, offrant même parfois quelques débordements, qui auront pour effet de briser une ambiance divagante. Les instruments finiront par s’accorder à l'unisson sur le dernier tiers de piste, jusqu’à être battu en brèche par le son soudain du piano, venu aérer la scène et paralyser les autres instruments.
Le rôle du synthé, sur cet album, pourra sembler déconcertante. Il se contente d’une mission secondaire, celle de jouer une arrière musique de fond sans réelle ingéniosité. Néanmoins sa présence est nécessaire dans la création d’un contraste avec le chant, les autres instruments impitoyables ne s’illustrant que par leur agressivité. Ses apparitions produisent l’effet d’une lueur spectrale éclairant faiblement l’obscurité environnante. La voix de
Cadaveria s’emploie également de cet effet lorsqu’elle passe à des passages de chant clair. Un chant captivant dans tous les sens du terme, qui n’en reste pas moins froid et indifférent à notre condition d’être humain. Mais ce qui éclaire, même de manière équivoque, nous permet un temps de chasser nos peurs. Nos cauchemars ressurgissent à la moindre offensive énergique des guitares et de la batterie.
La puissance et la violence du black metal domine cet album, bien que la formation transalpine réalise ici des ouvertures en direction d’autres styles de metal. Par exemple avec une longue entame folk sur « The Naked and the Dance ». Une jolie escapade de guitare acoustique nous fait rencontrer un univers moyenâgeux, avant que le tranchant d’une guitare électrique ne s’abatte et nous replonge dans une réalité beaucoup plus sombre. On remarque un lien plus certain avec le doom metal qui imprègne dans des proportions différentes la majorité des pistes. Une telle ouverture se rencontre aisément sur la 2ème partie de « Cimmeries », lorsque la batterie en vient subitement à changer de tempo, suivi de suite par les guitares dans un acheminement lent sur certains endroits, se laissant même simplement dépasser par les claviers. Cette ouverture, on la perçoit de manière plus probante et affirmée sur le titre « My Devotion », plongé dans un instant de mélancolie et de torpeur. Les chants masculin et féminin adoptent un registre plus clair. Les sonorités proprement black, ne se font plus entendre que sur quelques périodes de giboulées. Les mélodies harmonieuses provenant du synthé y ont toute leur place. C’est le titre le plus envoûtant et le plus complet, perçant directement à travers notre âme.
Voilà une des manifestations les plus attrayantes et évidentes du mysticisme d’«
Opera IX ». Une griffure douloureuse au visage qui laisserait croire à un simple frottement. Elle s’imprègnera à jamais dans notre être, accaparé par l’esprit ténébreux qui règne dans ces lieux. C’est la marque du banni, distribuée aux participants du culte sacré. Un culte rendu au premier de ceux qui ont maudit leur Dieu.
16/20
Vraiment, je te le recommande grandement.
Pour rester dans la scène italienne je te conseille si ce n'est déjà fait Nazgul, l’excellent disque du nom de "De Expugnatione Elfmuth", bien que très particulier et décalé, pour moi il a été difficile à cerner mais vraiment fascinant.
Enfin pour en revenir au disque ici concerné "Sacro Culto" je compte bien me me le procurer dès que possible, et peut être le "The Black Opera : Symphoniae Mysteriorum in Laudem Tenebrarum", si on peut m’éclairer si il vaut le détours, aucune chro' de ce disque, mais il me met l'eau à la bouche.
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