S'il est des formations désireuses de ne pas chercher à précipiter les événements pour faire entendre leur voix, cet expérimenté et talentueux quintet russe originaire de Moscou serait assurément du nombre. En effet, créé en 2008, l'exigeant combo ne réalisera son premier et encourageant album studio «
SETI Evidence » que cinq ans plus tard. S'il aura fallu patienter quatre années supplémentaires avant de nous livrer un effort du même acabit et des plus seyants, répondant au nom de «
Alien Hazard », le collectif mettra nos nerfs à plus rude épreuve quant à la date de sortie de son troisième et présent effort, «
Rebuilding the Universe » : huit années, pas une de moins, nous seront imposées avant de nous octroyer, cette fois, un set de 11 compositions inédites dispatchées sur une bande auditive de 47 minutes ! Ce faisant, nos acolytes détiendraient-ils le sésame pour les porter parmi les valeurs confirmées de ce registre metal ?
Partiellement dans la lignée de son précédent effort, cet opus nous immerge au cœur d'un metal alternatif à orientation futuriste, aux coloratures non seulement power symphonique, électro-gothique et mais aussi death mélodique. Dans cette perspective futuriste s'y trouvent mêlées des sources d'influence aussi éparses que
Amaranthe,
The Birthday Massacre,
Ancient Bards,
Delain,
Imperia et
Cradle Of Filth. Pour ce faire, le line-up a une fois encore été remanié, le projet harmonisant aujourd'hui les talents de : Alexio (ex-Crimsun, ex-
Eden) aux growls et aux claviers ; Olga
Sol (
Voiceless Void, ex-
Slavery...) ; Oksana ''Oxy'' Efremova en lieu et place de Myutel (ex-OSA), à la guitare ; Five, en remplacement de St
Odium (
Hyperomm, ex-
Odium Nova, ex-
Smothered Bowels...), à la basse ; Dmitry ''Heim'' Shirokov (Crimsun) détrônant Miran (
Hyperomm, Trine Aspect, ex-The
Suicider) derrière les fûts. Un mixage bien équilibré entre lignes de chant (calées, là encore, sur le schéma de la Belle et la Bête) et instrumentation, à nouveau signé Arkadiy Navaho (
Arida Vortex,
Grace Disgraced,
Imperial Age,
Fetal Decay...), promet une croisière des plus agréables...
Si le bal s'ouvre à nouveau sur une cinématique et laconique entame instrumentale à visée futuriste, il ne saurait s'y réduire exclusivement, loin s'en faut. Aussi, par un enchaînement finement esquissé, le bien-nommé et somme toute linéaire « Overture » cédera prestement le pas à une bien plus palpitante offrande. Ainsi, «
Ultimatum » se pose tel un diluvien et organique up tempo power symphonique aux riffs acérés, à la croisée des chemins entre
Amaranthe,
Ancient Bards et
Cradle Of Filth, jouant à plein la carte des contrastes vocaux pour tenter de nous rallier à sa cause ; les cristallines inflexions de la sirène n'ayant de cesse de faire écho aux growls glaçants de son comparse dans un étrange mais grisant ballet des vampires, le pulsionnel effort ne se quittera qu'à regret. Dans cette mouvance, disséminant leurs furieux coups de boutoir tout en voguant sur d'ondoyantes rampes synthétiques, et pourvus d'un entêtant et ''delainien'' refrain souligné par les angéliques oscillations de la déesse, l'impulsif « Dividing Lines » comme le gorgonesque «
Absolute Control » pousseront à leur tour à un headbang bien senti.
Un tantinet moins incisifs, d'autres espaces d'expression n'imposeront pas moins leurs mesures à ceux qui y auront plongé le pavillon. Ce qu'atteste, tout d'abord, «
Betrayed Alliance », mid tempo death symphonique aux riffs rageurs et ''growlé'' dans son entièreté ; doté d'enchaînements intra piste des plus sécurisé et d'un vibrant solo de guitare, et ''growlé'', cet intrigant méfait dans le sillage de
Cradle Of Filth ne relâchera pas son étreinte d'un iota. Dans une orientation metal symphonique gothique, le ''delainien'' mid tempo « Astrogation » ne saurait davantage être éludé ; pourtant non dénué d'une longue entame instrumentale et d'un break aussi inopportun qu'inapproprié, mais calé sur une sente mélodique plutôt avenante et, surtout, doté d'un refrain immersif à souhait encensé par les angéliques ondulations de la princesse, le ''tubesque'' manifeste poussera assurément à une remise en selle sitôt l'ultime mesure envolée. On pourra, enfin, retenir «
Alien Savior », polyrythmique et futuriste mouvement au carrefour entre
The Birthday Massacre et
Cradle Of Filth, et ce, davantage à la lumière de la soudaineté de ses fulgurantes accélérations qu'au regard d'un final instrumental prématurément amorcé et dénué d'une quelconque substance mélodique.
Quand ils desserrent leurs griffes, nos compères trouvent là encore les clés pour nous retenir, un peu malgré nous. Ce qu'illustre « The
Origin », low tempo électro-gothique aux airs d'une ballade atmosphérique aussi délicate qu'abyssale. Mise en habits de soie par les impulsions tout en profondeur du vocaliste patenté et décochant un ''floydien'' legato à la lead guitare à mi-morceau, la féline et soyeuse offrande n'aura pas tari d'armes pour asseoir sa défense.
En dépit de ses mérites, cet élan n'ira pas sans accuser quelques irrégularités. Ce que prouve, en premier lieu, le frondeur et tortueux «
Vindicator », qui, en dépit d'une énergie aisément fédératrice et d'un fringant solo de guitare, impose une tenace répétibilité de ses inextricables séquences d'accords doublées d'intarissables linéarités mélodiques et à des growls peu loquaces. On ne saurait davantage retenir l'enfiévré « Last Briefing » au regard de ses nombreuses zones de remplissage instillées de ponts technicistes qui ne s'imposaient pas. Et ce n'est pas le bref et fade instrumental «
Coda », alors venu conclure ce chapitre, qui sauvera le bateau du naufrage.
Au terme d'une traversée des plus mouvementées et somme toute seyante, on ressort de l'épreuve à nouveau interpellé par les qualités techniques et mélodiques déployées par le combo russe. S'il peut compter sur une belle complicité entre les deux vocalistes patentés et sur une ingénierie du son plutôt soignée, cet effort ne va pas sans concéder quelques bémols en termes d'harmoniques quand les exercices de style tendent, eux, à une certaine stéréotypie ; plus complexe au risque de se faire insaisissable, ce troisième mouvement demeure en retrait de son prédécesseur. En-deçà de ce dernier, c'est donc de justesse que ce nouvel opus permet de placer le collectif moscovite parmi les valeurs confirmées de cet espace metal. Un sursaut de la part de nos acolytes est donc attendu pour leur assurer une position plus confortable dans cette cour là. Wait and see...
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