Phanerozoic I: Palaeozoic

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17/20
Nom du groupe The Ocean
Nom de l'album Phanerozoic I: Palaeozoic
Type Album
Date de parution 02 Novembre 2018
Style MusicalMetal Expérimental
Membres possèdant cet album38

Tracklist

1.
 The Cambrian Explosion
 01:54
2.
 Cambrian II: Eternal Recurrence
 07:51
3.
 Ordovicium: The Glaciation of Gondwana
 04:49
4.
 Silurian: Age of Sea Scorpions
 09:36
5.
 Devonian: Nascent
 11:05
6.
 The Carboniferous Rainforest Collapse
 03:08
7.
 Permian: The Great Dying
 09:22

Durée totale : 47:45

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The Ocean


Chronique @ Haereticus

09 Décembre 2018

Avec Phanerozoic, The Ocean transforme l’essai marqué avec Pelagial

Quelle claque ! Je vais tenter de rester objectif sur cet album qui est pour moi l’une des meilleures sorties de cette année 2018. Et pour cause, The Ocean est un groupe qui s’est longtemps cherché mais qui semble avoir trouvé sa voie depuis Pelagial, son album précédent sorti en 2013. Les douze premières années d’expérimentations du leader Robin Staps et les multiples changements de casting (une quarantaine de personnes ont transité dans le groupe) ont porté leurs fruits. Phanerozoic I: Paleozoic démontre que le groupe est enfin stable et en pleine possession de ses moyens.

L’essence de The Ocean est une dichotomie tourmentée entre un metal atmosphérique planant et un death metal brutal et primitif. Le groupe a très bien choisi son nom puisque l’océan peut être tantôt calme et paisible, tantôt violent et déchaîné. Ce qui caractérise The Ocean, c’est aussi cette profondeur abyssale et cette lourdeur qui invite à la transe : une plongée dans les profondeurs de l’océan. La musique est toujours arrangée et orchestrée de manière chirurgicale, rendant l’expérience profondément immersive. Il ne faut pas s’arrêter à la musique car les textes sont tout aussi profonds et travaillés. Robin Staps est un homme qui s’interroge et qui réfléchit beaucoup sur l’Homme et sa place dans l’univers. Farouchement opposé au créationnisme et au dogme religieux, Staps a choisi les sciences et la philosophie comme arme. Dieu n’est pas le bienvenu dans The Ocean et l’Homme est remis à sa place d’animal nuisible pour lui-même et pour son environnement. Pas de provocations satanistes contrairement à la plupart des groupes de métal opposés à la religion ! Staps justifie tous ses arguments en usant de la science, et plus particulièrement de la géologie qui est la mieux placée pour démonter les théories créationnistes.

C’est justement la géologie qui est au cœur de cet album. Elle est la clé pour comprendre le concept de cet album. Phanerozoic I: Paleozoic fait suite à l’album Precambrian (2007), et sera suivi l’année prochaine par un Phanerozoic II. Les noms barbares de ce triptyque font référence à la charte stratigraphique des géologues. Les historiens ont leur frise chronologique avec la préhistoire et l’histoire ; les géologues ont leur charte stratigraphique avec les temps précambriens et les temps phanérozoïques. Pour résumer simplement, le précambrien est une longue période de quatre milliards d’années qui s’étend entre la formation de la Terre (il y a 4,56Ga) et le début du Cambrien (il y a 541Ma). C’est l’équivalent de la préhistoire des historiens puisque la géologie et la vie de cette époque y sont encore très primitives. Les temps phanérozoïques sont l’équivalent de l’histoire des historiens, et s’étendent du Cambrien (il y a 541Ma) au présent. Cette période correspond à l’explosion de la vie sur Terre et à la mise en place de cycles climatiques et géologiques modernes. Paleozoic dans le titre de cet album correspond à la première partie des temps phanérozoïques (entre 541Ma et 252Ma avant notre ère). Enfin, chaque titre de morceaux correspond à une sous période de ce calendrier géologique. Il y a donc fort à parier que le titre du prochain album sera Phanerozoic II: Mesozoic and Cenozoic ou Phanerozoic II: Meso-Cenozoic. Cette charte stratigraphique est en quelques sortes l’argument ultime en faveur de l’évolution et contre le créationnisme puisqu’elle est étayée par une myriade de preuves scientifiques démontrables et indéniables.

Phanerozoic I: Paleozoic s’inscrit donc dans ce contexte géologique. Dans cet album Staps ne parle pas unique de géologie, il s’en sert pour illustrer ses réflexions sur l’Homme et plus particulièrement sur le climat. Il développe ici le concept d’éternelle récurrence en s’appuyant de la philosophie de Nietzsche. Cette éternelle récurrence est illustrée par les cycles tectoniques, climatiques et évolutifs de la vie qui se renouvellent régulièrement dans l’histoire géologique de la Terre. Les mêmes événements se répètent régulièrement de manière variable, sans que l’on puisse agir pour les empêcher. Ce concept nous amène à réfléchir sur les enjeux climatiques auquel l’homme a à faire aujourd’hui. Ordovicium: The Glaciation Of Gondwana fait référence à la première grande crise d’extinction massive de la biodiversité sur Terre due à une glaciation de la Terre. Permian: The Great Dying parle de la troisième grande crise d’extinction massive de la biodiversité sur Terre. C’est la plus dramatique qu’ait connu la Terre puisque 95% de la vie marine et 70% de la vie terrestre disparaît lors de cette crise due à un réchauffement climatique global de 5°C engendré par un volcanisme massif. Ces crises se reproduisent régulièrement et naturellement par cycles. A chaque fois, la vie y est renouvelée en profondeur. Des espèces disparaissent en nombre et de nouvelles ont alors toute la place pour se développer. C’est un peu la respiration de l’évolution. Le message pour l’Homme actuel est qu’il contribue par ses émissions polluantes à accélérer l’arrivée de la prochaine grande crise d’extinction massive (la sixième que connaîtra la Terre). L’Homme se met donc en danger de manière imminente en perturbant les paramètres environnementaux. D’un autre côté, la venue d’une prochaine crise est inévitable que l’Homme y contribue ou non. Le regard est donc pessimiste mais pragmatique sur notre avenir. Le chaos est notre destin quoi qu’il arrive : la Terre continuera de tourner que nous y soyons encore ou que nous nous éteignons lors de la prochaine crise.

Ces textes profonds sont mis en lumière par la musique qui est ici parfaitement accordée à la gravité des événements décrits. L’instrumentation est à la hauteur de Pelagial avec tout ce qu’il faut de puissance et de dramatique. Les textes et les grandes lignes de Phanerozoic I: Paleozoic ont été écrits par Robin Staps dans une maison isolée au bord de l’océan, en communion avec l’élément. L’album a ainsi été composé comme un puzzle par les membres du groupe qui ont ensuite tout assemblé au studio Sundlaugin, à Reykjavik en Islande. Les endroits choisis ne sont donc pas anodins puisque la nature sauvage y est toujours très présente. La partie batterie a été intégralement enregistrée dans le studio islandais par Julien Fehlmann, dans une grande salle propice à une acoustique naturelle tout en réverbération. Le mixage et le mastering sont l’œuvre de Jens Bogren (Katatonia, Opeth) et donnent à l’album toute la puissance qu’il mérite. Le mixage et l’enregistrement des instruments supplémentaires (violons, violoncelle, piano) a été réalisé à Berlin. Il faut noter la présence d’un invité de marque sur le titre Devonian: Nascent en la personne de Jonas Renske, frontman de Katatonia.

L’album s’ouvre sur le Cambrien, divisé en deux parties pour l’occasion. C’est la période ou la biodiversité explose. C’est aussi le moment d’introduire le fameux concept d’éternelle récurrence avec la répétition de cycles géologiques. Le tout est ainsi mis en forme par une introduction atmosphérique qui laisse place à un titre que l’on pourrait qualifier de standard du groupe avec toujours cette alternance entre metal planant et death brutal. Vient ensuite l’Ordovicien qui marque l’arrivée de la première grande crise d’extinction. Le ton devient alors plus violent, plus dramatique et plus mélancolique pour exprimer la gravité des événements. La machine à cycles se met en route sans que l’on puisse intervenir dans sa progression. Le Silurien nous parle plutôt de la dérive des continents. Ces derniers qui se séparaient depuis le Cambrien, recommencent à se réunir à partir du Silurien, toujours en suivant un cycle. Cela donne lieu à un morceau globalement très mélodique et doom ponctué de riffs death. Le Dévonien est pour moi l’un des deux titres majeurs de cet album (avec Permian). L’invitation de Jonas Renske sur ce morceau permet un mariage réussi entre The Ocean et Katatonia. L’espace est parfaitement partagé entre les deux chanteurs qui contribuent ainsi à un merveilleux épique sur une période mouvementée d’un point de vue géologique. Le Carbonifère est un interlude instrumental léger qui nous parle d’une période où la forêt était reine sur Terre. L’album se conclu avec le Permien qui retrace l’histoire de la plus grave crise d’extinction de la vie qu’ait connu la Terre. The Ocean attaque ici fortement avec un death metal emprunt de désespoir. L’issue fatale est inévitable. Permian: The Great Dying est sans doute mon titre préféré sur cet album.

Pour conclure, ce Phanerozoic I: Paleozoic est un album complexe mais parfaitement exécuté par un groupe au sommet de son art. Pelagial méritait déjà tous les éloges. Le défi pour lui succéder était donc difficile à relever mais The Ocean y est parvenu avec brio. Nuls doutes que cet album restera dans les annales. Au-delà de la musique divinement belle, les textes et la philosophie développés ici sont passionnants et riches. Cet album est donc une réussite à tous points de vue. A écouter et réécouter sans modération !

20 Commentaires

9 J'aime

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Hibernatus - 18 Décembre 2018:

@Icare : Ah ah ah ! Excellent !

Bon, les notes on s'en fout. C'est juste l'expression la plus réductrice qui soit des impressions d'un chroniqueur. Vaut peut-être mieux lire ce qu'il écrit, l'argumentation, ça a quand même du bon. Je ne peux pas dire que j'ai toujours été convaincu par celle d'Haereticus, mais avec moi, il aura je pense atteint son objectif : éveiller ma curiosité. Merci pour ça ;-)

J'ai jamais réussi à trouver la clef de la musique de The Ocean avec Pelagial, j'avoue. C'est esthétiquement superbe, mais j'ai du mal à ne pas décrocher à un moment ou un autre. Du coup, je me le repasse, peut-être que je vais trouver la voie. Et je jetterai une oreille sur ce Phanerozoic à l'alléchante thématique. Thanks pour la chro.

dark_omens - 22 Décembre 2018:

@Haereticus

Moi c'est ton attitude agressive qui va très vite me gonfler.

Je fais aussi parti de ceux qui pensent qu'un 20/20 est une note qui reflète un certain manque d'esprit critique dicté par un enthousiasme démesuré surtout lié aux émotions du moment. Cela étant dit, tu peux évidemment publier ici des plaidoyers partiaux sans aucun souci. En revanche Som est un espace d'échanges et si tu n'acceptes pas que d'autres qui ne partagent pas ton avis (et même sur ta façon de noter) viennent débattre avec toi, pourquoi ne pas publier tes textes ailleurs? Un ailleurs où tu serais le seul maître à bord.

Et, soit dit en passant, si tu ne parviens pas à avoir assez de recul pour comprendre que mettre 20/20, c'est, en un certain sens, se laisser complètement déborder par ces émotions et que ça peut gêner certains de tes lecteurs (parce que je te rappelle aussi que tu écris ici pour ceux qui te lisent.), ta licence et ton âge n'ont alors guère de valeur.

PS:

Dernière petite chose s'agissant de ce que tu es "libre de faire ou pas". Il y a ici une charte avec des règles concernant les chroniques dont une qui dit, notamment, que la description "track by track" est proscrite. Et une autre qui dit qu'une note extreme doit être suffisamment argumentée. Je ne sais pas si c'est le cas ici mais, par exemple, concernant ton texte sur Haken, on est très limite.

Je ne te reproche rien. Je voulais juste souligner le fait que si nous étions capable de faire preuve de souplesse en fermant les yeux sur les règles, tu devais en faire autant en acceptant de débattre même avec tes détracteurs.

Haereticus - 23 Décembre 2018:

Vous avez gagné, j'ai retiré mes notes ! Comme ça on s'intéressera peut être plus au fond qu'à la forme... Il n'y a rien de plus subjectif et réducteur qu'une note. Ça dépend du goût et de la sensibilité de chacun. Personnellement cet album fait partie de mon top 50 sacré donc ce 20 exprimait juste cela. Si cette note (qui encore une fois est personnelle et n'engage que la personne qui la donne) dérange, pourquoi permettre aux gens de mettre 20 à un album ? Faisons un barème de 0 à 19 et le problème sera réglé !

Pour répondre à ta remarque sur mon agressivité dark_omen, as tu lu le fil complet des commentaires ? Je suis arrivé très récemment sur ce site, sur invitation de matai pour faire des promos. C'est uniquement la passion et l'envie de partager mes goûts qui me motivait. J'espérais pouvoir échanger avec les gens sur cette passion brûlante. Ma première chronique sur Haken n'était pas bonne, elle n'a pas échappé au syndrome des premières fois. Sur cette deuxième chronique j'ai nettement plus travaillé. Ça m'a pris du temps mais je l'ai fait en espérant pouvoir échanger et débattre sur le fond des choses. Il est évident que nous n'avons pas tous les mêmes goûts et les mêmes sensibilités et je suis tout à fait ouvert à en discuter quand c'est constructif.  Le problème c'est qu'à part me lyncher sur le fait d'avoir osé mettre 20/20, personne ne s'est réellement intéressé à cet album ou à ma chronique. Au passage, je ne suis pas l'instigateur de cette tension, certains ne se seraient pas permis de me juger sur mon prétendu manque de maturité que ma réaction aurait été moins virulente. Alors oui, quand on s'investit pour au final se faire chier sur son travail à cause de détails sans réelle importance, il y a un moment où ça agasse et où ça fait réagir. Après c'est très français, on trouve toujours à redire sur ce qui ne va pas, quitte à s'attarder lourdement sur des broutilles façon cours d'école maternelle, mais on ne dit jamais rien sur ce qui est bien. Mon agressivité est peut-être aussi due à ma déception de devoir faire face à des remarques superficielles et condescendantes, plutôt qu'à un vrai débat sur le fond comme le concept de l'album, la musique, les arrangements, les performances des artistes... J'ai sans doutes du être trop naïvement optimiste sur la possibilité d'échanger avec des gens intelligents suite à cette chronique. Les premiers commentaires désobligeants avaient déjà bien refroidi mes ardeurs au point de me désengager des promos. Je m'étais dit que je m'en tiendrais à une chronique de temps à autre. Mais face à tant de bêtise je pense que je vais arrêter tout court ma contribution sur ce forum. Merci d'avoir tué mon enthousiasme ! Rassurez vous, c'est la dernière fois que je poste quelque chose ici-bas.

Au revoir, et comme dirait Raymond Dronne, ou plus récemment Tagada Jones (c'est selon la culture) : "Mort aux cons !"

dark_omens - 23 Décembre 2018:

La problématique de la notation nous occupe depuis de longues années. Il y a ici des gens, dont je fais parti, qui pensent qu'une note doit tenir compte de nombreux critères et être le moins possible alourdie par le ressenti de celui qui la donne (même si je sais bien que ce n'est pas facile). Parmi ces critères il y a, non seulement, la place du disque en question dans la discographie du groupe (meilleur,  moins bien...) mais aussi, plus généralement, dans le genre. Ce qui donne, en un sens, une sorte de hiérarchie dans laquelle ce camp-là aime à se répérer. Et tu peux argumenter autant que tu veux, selon cette faction là, les chroniqueurs sont exactement là pour ça. Donner des repères. En face, il y les gens, dont à priori tu fais parti, qui pensent qu'une note peut être le reflet d'un seul disque, en dehors de tout autre contexte que celui des émotions qu'ils vivent au moment où ils la donnent, et qu'au fond elle n'a pas tant d'importance.

J'ai envie de dire, chacun a le droit de penser ce qu'il veut et tout le monde a raison ou tort. Mais chacun est libre aussi de dire ce qu'il veut dans les commentaires (dans le cadre de la charte, bien évidemment).

Ensuite, je suis désolé de le dire ainsi mais si tu appelles "lynchage" les quelques remarques que tu as eu ici et celle que tu as eu sur ton texte concernant Haken, c'est que tu as encore pas mal de chemin à faire sur la route de cette maturité que tu revendiques tant. Si l'adversité molle dont tu as été victime, te fait déjà renoncer, c'est que, là encore, tu n'es sans doute pas aussi armé que tu le croyais au départ. Et si tu pensais que tu pourrais selectionner ton lectorat pour avoir avec lui les échanges sur les sujets qui te siéraient le plus, tu as été d'une naiveté sans borne. La vérité c'est qu'ici nous avons des débats sur tout. Des choses très pointues. Mais aussi sur d'autres très superficielles. C'est ainsi...

Me concernant, plutôt qu'à la citation de Raymond Dronne, j'ai songé à celle de Jean Dion (ou Pierre Perret, selon sa culture) qui dit : "On est toujours le con de quelqu'un, et tant pis pour lui.".

Je ferme pour éviter les débordements. Si vous vous voulez continuez, on passe en MP. Pour une réouverture qui aurait pour but de reprendre les débats concernant le disque en question (et même entre idiots sur les choses sans intérêt comme les notes), on me MP.

Merci à tous.

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