Putain,
Anal Vomit ! Avec un nom comme ça, le groupe ne peut s’illustrer que dans deux styles bien distincts : soit le porno gore grind inaudible et gras soit le proto death régressif, complètement primaire et sauvage en provenance d’Amérique du Sud. Et c’est vers la deuxième option qu’il faut s’orienter car le trio est l’une des hordes metalliques les plus reconnues et respectées du Pérou.
Ce Pesta Negra, Muerta Negra est le troisième full length de la troupe barbare emmenée par
Possessor et sort initialement en septembre 2014. Nous avons ici affaire à une réédition de
Gates of
Hell, munie d’un nouvel artwork des plus subtils qui a le mérite de revisiter la pochette originale en nous offrant une vue d’ensemble encore plus bucolique et ragoûtante.
Comme le laissent à penser leurs origines et leur goût prononcé pour les peintures romantiques, nos amis latins s’illustrent dans un metal hybride et blasphématoire très cru, simple et rythmé, mélangeant allègrement death et thrash avec une pincée de black en un fourre-tout sataniste et barbare des plus jouissifs, à l’image des vétérans brésiliens de Sarcofago,
Vulcano ou
Holocausto.
On peut s’en doute,
Anal Vomit n’est pas trop le genre de groupe qui évolue, et c’est sans surprise que Pesta Negra, Muerta Negra reprend les choses à peu près là où
Gathering of the Putrid Demons les avait laissées, avec une différence notable néanmoins, le son : les neuf titres de cette orgie satanique sonnent bien plus clairs, puissants et moins étouffés que par le passé, les instruments se détachant plus nettement, surtout les échappées de guitare dont les soli déchirent délicieusement les tympans, alors qu’ils émergeaient difficilement de la bouillie sonore dans l’opus précédent. Evidemment, certains déploreront que le groupe perd une partie de son aura sulfureuse, et n’auront pas tout à fait tort, ceci dit, il gagne en « musicalité » - le terme est à prendre avec des pincettes ici… - avec des titres plus lisibles voire mélodiques (le début de A
Savage Fornication) qui nous amènent à un constat étonnant : contre toutes attentes les Péruviens savent jouer, et ces 39 minutes de carnage auditif sont finalement parfaitement carrées.
Brebaje de Muerte débarque sur un riff simple, lourd et entêtant, appuyé par ces stridences hurlantes de guitare qui rajoutent un côté foutrement chaotique et spontané à l’ensemble, puis la rythmique s’emballe, la basse gronde, et la voix de
Possessor résonne lugubrement, débitant avec fureur ses blasphèmes en espagnol, rappelant inévitablement les Mexicains de
Morbosidad. Ici, pas de chichis, aucune fioriture, pas non plus d’originalité, on nage en terrain connu, les Péruviens misent tout sur l’efficacité et nous balancent un metal de la mort cradingue, explosif et entraînant fleurant bon les années 80, quelque part entre Sarcofago,
Possessed et
Hellhammer. Les riffs, ultra simplistes, sont de véritables incitations au headbang, lourds, accrocheurs et presque groovy, aérés par ces soli fulgurants et bordéliques joués à toute blinde. Le tout est soutenu par des rythmiques rapides mais rarement blastées (Obssessive Sexual
Slaughter, plus rapide et violent que l’ensemble et aux relents de death brutal de l’époque assez marquées avec cette basse vibrante et ces blast tonitruants, Venganza
Obscura), ainsi que les parties de doubles indispensables lorsque le tempo se ralentit et que le climat se fait plus pesant (Valle de Tenieblas qui se fend même d’un petit pont acoustique aux résonnances inquiétantes). Quant à la basse, vous ne pouvez pas ne pas l'entendre, elle nous viole littéralement les tympans de ses secousses obscènes et rajoute uen profondeur non négigeable à l'ensemble.
On remarquera aussi que les titres sont plus longs et travaillés que par le passé (il n’y a que deux morceaux qui font moins de quatre minutes), dégageant peut-être moins ce sentiment d’urgence quasi punk des débuts, mais toujours aussi noirs, crades, régressifs et brutaux dans l’esprit, même si bien mieux maîtrisés qu’auparavant : Venganza
Obscura, du haut de 6,15 minutes, est un parfait condensé de la musique du groupe avec ces nombreux changements de rythmes et cette alternance intelligente entre parties lourdes et headbangantes comme le début du titre, et passages plus rapides ou la rythmique s’emballe. On a bien sûr le droit à notre lot de soli vibrants et supersoniques, et on a même un riff blackisant à 1,35 minutes avant que le morceau ne reparte sur un thrash survitaminé avec ce cri suraigu et cette rythmique qui tabasse sans aucune subtilité.
Vous l’aurez compris, cet album n’est pas vraiment pour les mélomanes, et si vous êtes à la recherche de la nouvelle sensation progressive du moment,
Anal Vomit n’est pas pour vous. La musique du combo péruvien est probablement plus audible qu’auparavant notamment grâce à un son qui lui enlève une partie de sa rugosité et de son aura démoniaque, ceci dit, le tout reste tout de même violent, noir, poisseux, blasphématoire et sans concession, et c’est indiscutablement ça que l’on aime. Allez, vous reprendrez bien une petite louche de vomi anal ?
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