On ne présente plus
Ond Spiritism - Djafvulens Skalder, troisième et dernier full length d’une formation désormais moribonde,
Armagedda. Après deux albums de true black efficaces mais classiques, Petterson et Graav signent leur offrande la plus personnelle, proposant sur leur testament sonore un chant en suédois, un rythme plus lent et une ambiance morbide accrue qui en font pour beaucoup le meilleur opus du duo et un incontournable du genre. Eh bien, sachez que l’opus en question a tout juste quinze ans. Et pour fêter ça, nos deux compères se contentent de ressortir l’opus en toute simplicité histoire de lui offrir une seconde jeunesse et de le rappeler au bon souvenir des blackeux les plus jeunes ou les plus ignares.
Helvetestoner commence par cette introduction de basse délicieusement morbide qui sonne comme un glas et qui suffit d’emblée à nous mettre six pieds sous terre, avec ces notes froides et sales qui nous fouillent les tripes. Avec ces cloches qui résonnent au loin, l’appel du vide se fait plus inéluctable, et lorsque le premier riff bave cette saturation si chère au style, on est déjà envouté. Les guitares, la double pédale et le chant grondant et grinçant de Graav font le reste et nous achèvent, coup de pelle rouillé derrière la nuque. Une ambiance très épaisse de sépulcre s’installe dès ce premier titre et ne nous lâche plus des 49 minutes que dure l’album, nous plongeant dans des ténèbres d’une noirceur abyssale.
Le coup de la basse vous a bien plus sur Helvestoner? Tant mieux, car sur Afked, son frottement metallique et entêtant sur le refrain est tout simplement jouissif, et on remet aussi le couvert sur Döpt I Oheligt Vatten, avec ces notes glaciales comme la mort qui viennent habiller le chant de corbeau du hurleur. En soi, ce morceau n’a rien d’extraordinaire, titre plutôt minimaliste, lent et dépouillé, mais pourtant, la magie opère, notamment grâce à ce petit riff aux dissonances hypnotiques qui vient nous titiller l’oreille tout en subtilité dès 1,33 minutes. Et si vous voulez quelque chose d’un peu plus énergique, enfilez-vous donc l’excellent
Ændalykt dont les 9,32 minutes passent comme une lame effilée sur une grosse veine bleue, avec sa batterie qui claque inlassablement, ses riffs tranchants et désolés et les éructations rauques de Graav plus possédées que jamais.
L’exploit de ce Ond Spiritism est finalement de réussir à jouer une musique presque tout en mid tempo sans aucun artifice mais dégageant une intensité incroyable. Oui, on peut affirmer qu’
Armagedda évolue dans le true black metal, mais les Suédois se réapproprient le genre, en proposant une version plus lente, traînante et dépressive, finalement bien plus morbide que vindicative, mais réellement torturée et malsaine, et qui au bout du compte fait plus mal que beaucoup de groupes qui jouent la carte des trémolos picking et des blasts à tout va. Alternant riffs dépressifs et parties plus énergiques et groovy intelligemment rythmés par la batterie et rehaussés par la basse, les Suédois nous enveloppent dans un brouillard glacial et humide sans jamais relâcher la pression, même sur les interludes ambiant que sont Gravgaardspsalm et Utfærd.
Histoire de ne rien gâcher,
Armagedda se paye même le luxe d’apporter une touche mélodique bien présente dans le riffing, et qui éclaire ce charnier musical d’une timide lueur grisâtre finalement encore plus aliénante que les ténèbres totales, un peu à la manière d’un
Watain. Le son est parfait, laissant percevoir parfaitement chaque instrument, assez sec, clair et clinique pour le style mais pas trop, évitant le piège fatal de l’album surproduit et portant parfaitement cette ambiance nauséeuse de cimetière sans en faire trop. Mine de rien, tout ça fait de Ond Spiritism un très bon album, peut-être un peu trop homogène et minimaliste pour certains, mais indéniablement inspiré et habité, et force est de constater que 15 ans après sa sortie, l’opus n’a pas pris une ride. A réécouter sans modération en rêvant à une hypothétique reformation du groupe - on me souffle dans l’oreillette que les affreux auraient sorti un single il y a trois mois, alors qui sait… Quoi qu’il en soit, wait and see, et en attendant, skål
Armagedda !
Merci pour cette chronique et pour la découverte! Je crois que jamais un album de black mid-tempo ne m'aura autant plu que celui-ci! Pour du raw, le son n'est vraiment pas dégueu en plus.
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