Pendant ses quatorze années de bons et loyaux services,
Shade Empire aura marqué de sa patte maléfique son passage du côté du black symphonique boosté à l’électronique, et ce dès 2004 et son premier opus «
Sinthetic », délivrant une musique puissante et impériale dans laquelle se mêlait habilement la noirceur du black metal et le côté futuriste voire spatial du duo sympho/electro. La suite de sa carrière n’a cependant pas été aussi grandiose : d’un côté « Intoxicate O.S » montrait une volonté de ne pas faire une pâle copie de «
Sinthetic » mais perdait son originalité avec une trop grande influence
The Kovenant. De l’autre, «
Zero Nexus », à la meilleure production, misait plus sur l’électro pour forger un caractère futuriste mais manquait, au final, d’accroche.
C’est donc cinq ans après «
Zero Nexus » que revient
Shade Empire. Une attente longue dans la mesure où le nouvel opus est annoncé depuis un bon moment maintenant, mais il faut dire que cela vaut le coup. Les Finlandais ont eu le temps de travailler et de peaufiner leur nouvelle œuvre, «
Omega Arcane », signée chez Candlelight. L’évolution est de mise car on découvre un
Shade Empire comme on ne l’avait jamais vu. Même s’il reprend ce qui avait fait le succès de «
Sinthetic », à savoir le côté impérial, spatial et puissant, il se dirige cette fois-ci vers le black/death symphonique presque dénué de sonorités électroniques. Ici, la force du groupe ne réside pas que dans les claviers mais aussi dans les guitares, qui ressortent mieux, ainsi que dans les vocaux, cette alternance de chant black et de growl death. La production est de plus très clean, peut-être même trop : le sextet n’a jamais eu besoin d’une énorme qualité de son pour fournir quelque chose de puissant et d’ambiancé.
Le morceau introducteur «
Ruins », ici dans sa version longue, montre des Finlandais en pleine forme misant sur les atmosphères spatiales et sur des claviers symphoniques grandiloquents mais très maîtrisés. On se situe quelque part entre
Mechina (flagrant sur « Devolution ») et
Dimmu Borgir, avec le côté impérial et ravageur de
Shade Empire ainsi que des gros riffs brutaux tantôt black, tantôt death, qui ne font pas de cadeaux.
On nous emmène de façon déconcertante dans un monde plus sombre et torturé, parfois apocalyptique, mais toujours avec cette rage et ce savoir faire propre au sextet, qui joue allégrement avec les rythmes et un côté progressif indéniable. C’est grandiose et tonitruant, empreint d’un caractère nébuleux mais toujours efficace et remplis de moments intenses.
Pas le droit au répit, que ce soit dans «
Dawnless Days » ou dans le remarquable « Until No
Life Breeds » laissant ressortir quelques notes de piano. La lumière n’a pas de place et la brutalité ne fait qu’un avec la magie symphonique.
« Disembodiment » nous transporte dans un périple long de plus de treize minutes. Même s’il souffre de quelques longueurs, le voyage est savoureux et surprenant car nous passons d’une ambiance à une autre, d’un break à un autre, entre des déflagrations black/death toujours accompagnées de ces claviers majestueux. Mais c’est sans doute « Malicious
Winds » qui enfonce le clou, avec cette force et ces chœurs pris dans une mélodie principale pas loin des symphonies arabisantes.
Les seules touches d’électro se situent dans « Traveler of
Unlight » dont l’intro rappelle les bidouilles de l’album «
Sinthetic ». La suite ne fait que nous renvoyer en pleine figure l’évolution de
Shade Empire qui abuse plus de son influence death metal et de la qualité de ses orchestrations. «
Nomad » aussi nous propose quelques éléments électroniques dans son death/black brute de décoffrage, pas si loin de son compatriote de
Vortech.
Gros coup de théâtre pour
Shade Empire qui revient avec une bombe symphonique de toute beauté, remarquable de puissance et de noirceur, forte de maîtrise et de saveur, envahie par la soif du dépassement de soi et l’envie de faire mieux que par le passé. «
Omega Arcane », sans l’ombre d’un doute, surplombe ses prédécesseurs, même si «
Sinthetic » reste à part tant dans sa singularité que dans sa force novatrice. Mais ce nouveau rejeton, sans rien révolutionner tout de même, permet au moins de se délecter d’un black/death symphonique épique et spatial, sans tomber dans le pompeux et le « sans âme ». Une belle réussite.
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