Dans l'histoire du Speed/Thrash
Metal nombreuses sont les formations qui se sont tirées une balle dans le pied (quand ce n'était pas dans la tête !), alors qu'elles étaient en pleine ascension.
Les exemples ne manquent pas que ce soit
Metal Church, qui en se séparant en 1988 de son emblématique vocaliste David
Wayne perdit une partie de son public.
Deathrow, dont le radical changement de style opéré sur "
Deception Ignored" (1988) traumatisa les adeptes de "Riders Of
Doom" (1986) et "
Raging Steel" (1987).
Ou encore
Agent Steel, au sein duquel le comportement égocentrique (voir paranoïaque) du chanteur-leader John Cyriis donnait régulièrement lieu à des évictions sommaires, ce qui finira par tuer le groupe en 1988 (qui se reformera dix ans plus tard, mais sans lui !).
A cette liste on se doit impérativement de rajouter le groupe anglais
Sabbat qui a eu l'extravagance de cumuler les trois situations exposées ci-dessus (une véritable prouesse) !
En 1990 après la violente dispute qu'il vient d'avoir avec son chanteur Martin Walkyier concernant la structure de ses nouveaux morceaux, le guitariste-leader Andy Sneap le vire sans ménagement (on retrouvera le vocaliste au sein de
Skyclad) ainsi que le guitariste Simon Jones et le bassiste Fraser Craske (seul le batteur Simon Negus échappe à la purge).
Ces derniers sont remplacés par Ritchie Desmond (chant), Neil Watson (guitare), et
Wayne Banks (basse).
Si parfois des changements de line-up peuvent s'avérer salutaires (l'éviction de
Paul Di'Anno d'Iron Maiden et de Neil Turbin d'
Anthrax) d'autres ont l'effet inverse (le remplacement de
Bruce Dickinson par
Blaze Bayley dans Iron Maiden et celui de Rob
Halford par Tim Owens dans
Judas Priest), et c'est ce qu'on allait découvrir à l'écoute du nouvel album "Mourning Has Brocken" qui sort en mars 1991.
A la surprise générale sur ce disque
Sabbat abandonne son singulier Thrash
Metal qui avait marqué "
History of a Time to Come" (1988) et "
Dreamweaver" (1989) pour se jeter à corps perdu dans un Heavy/
Power Metal Progressif, et cela au grand dam de ses fans les plus fidèles !
Bien que déroutant l'album est cependant de qualité tout en possédant des défauts qui nuisent à son écoute, à commencer par la production un peu brouillonne d'Andy Sneap qui ne rend pas justice aux différents titres.
A cela s'ajoute la prestation de Ritchie Desmond, le nouveau chanteur dont le registre oscille entre
John Arch (
Fates Warning) et James Rivera (
Helstar).
Cela peut paraître étonnant, mais l'excellence de son chant est paradoxalement l'un des points faibles du disque !
En effet conscient de posséder une très belle voix Ritchie Desmond en fait parfois trop, surchargeant certains morceaux d'exubérantes vocalises.
Ces imperfections ne doivent pourtant pas éclipser la bonne tenue des différents titres de "Mourning Has Brocken" ainsi que leur complexité.
Car à l'écoute de l'épique "The
Demise Of History", du lyrique "Theological
Void" (sur lequel l'influence de
Fates Warning est plus qu'évidente), et de "The
Voice Of Time" dont certaines parties de guitares nous rappellent que
Sabbat fut (jadis) un groupe de Thrash
Metal, on a droit à des morceaux extrêmement riches et variés.
Si sur le superbe et austère "Paint The World Black" Andy Sneap démontre qu'il reste un talentueux compositeur, sur "
Dreamscape" (où l'on retrouve les typiques accélérations de guitares d'autrefois) ainsi que sur l'instrumental "Dumbstruck" le leader de
Sabbat prouve qu'il est également un excellent guitariste doté d'une technique impressionnante.
On tient peut-être ici l'explication des motivations qui ont poussé ce dernier à s'éloigner du Thrash
Metal, style dans lequel il devait se sentir quelque peu bridé.
C'est sur le mélancolique interlude acoustique "Mourning Has Brocken" que se clôture cet insolite et dernier album de
Sabbat qui, faute de succès, splitte quelques mois après la sortie du disque.
Une disparition dont, aujourd'hui encore, certains n'ont toujours pas fait le deuil.
Ce qui est surprenant, c'est qu'après son départ de Sabbat le chanteur Martin Walkyier a sorti les disques de son nouveau groupe Skyclad également chez Noise (peut-être était-il encore lié à ce dernier par un accord ?).
C'est d'ailleurs ce qui était arrivé à Peter Steele lorsqu'il créa Type O Negative, Roadrunner Records (la maison de disques de son précédent groupe Carnivore) l'obligea à sortir ses albums chez elle sous peine de poursuites pour non respect du précédent contrat.
A savoir que Walkyier (avec un "i" après le "y" mon cher Greg) avait une petite fille de quelques mois alors et vivait dans un studio avec sa compagne, l'obligeant quelque peu à prioriser les revenus aux tournées.
A part cela, un mot sur la partie publique du site au sujet ce qui advint au groupe lors de sa reformation de 2007.
Sous l'impulsion de Dani de Cradle Of Filth, dont la reprise de "For Those Who Died" sur l'édition limitée de Midian fut un clin d’œil à une de ses influences, le groupe se reforma sous son patronyme d'origine (à ne pas confondre avec la mouture vite oubliée Return To The Sabbat). S'en suivirent une tournée en première partie de Cradle Of Filth, avec de nombreuses dates au RU, et un clash (encore) entre Walkyier et Sneap au sujet des rentrées liées aux ventes de T-Shirts pendant cette tournée, où Martin proposait du merch de son groupe The Clan Destined (cf : chronique d'un EP dans la veine de Skyclad), ce qu'Andy n'apprécia guère.
Bref, aucun projet de rabibochage n'étant à l'ordre du jour, cet album là restera le testament officiel du groupe, qui n'a de Sabbat finalement que le nom.
Pour l'anecdote, le batteur d'origine Simon Negus revend parfois des goodies d'époque du groupe.
Pour le reste, à part la carrière de producteur de Sneap, et le EP de The Clan Destined qui date quelque peu, aucun projet musical n'est à l'ordre du jour.
Merci Greg pour ce texte qui manquait sur SoM.
En effet Jérôme j'avais écorché le nom de famille du vocaliste.
Sinon j'attendais avec impatience ton commentaire, sachant que tu détestes ce disque (ce que confirme ton 6/20).
Ce qui est toujours intéressant c'est de ressortir des albums qui lors de leur sortie ont été à la fois descendus par la critique, et détestés par les fans.
En général ça passe beaucoup mieux car avec le recul (et une fois la polémique oubliée) on comprend mieux les raisons du changement d'orientation, et surtout on l'accepte plus facilement.
J'ai posté un commentaire sur la chronique de l'album "Promise" (1996) de Massacre qui lui aussi avait dérouté les fans de "From Beyond" (1991), mais qui au final est un bon disque.
Ceci dit si demain Céline Dion buvait un mélange d'eau de javel et d'acétone puis avalait une poignée de sable, et allait ensuite enregistrer un album de Death/Grind je comprendrais aisément que ses fans n'apprécient pas son nouveau style, alors que de mon coté je serais curieux d'écouter son disque.
M'enfin, on ne peut pas tout aimer, et tant mieux. Cool que tu aies fait ce texte en tout cas, Greg, beau boulot !
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