Nous ayant laissés sur le souvenir ému d'un troisième album studio aussi diluvien que sensuel du nom de «
Blue Blood », le collectif cofondé en 2016 par le producteur, guitariste, bassiste et vocaliste néerlandais Sander Gommans (
Trillium, HDK, ex-
After Forever, ex-Kiske/Someville...) et la chanteuse brésilienne aux toniques et félines inflexions
Marina La Torraca (
Exit Eden, ex-vocaliste live d'
Avantasia et Alarion) revient quelque deux années plus tard dans la course, à pas de loup cette fois. Aussi nos acolytes nous livrent-ils, tout d'abord, trois singles («
Sangre Mala » en 2024, suivi de «
Good Guy » et «
Slow Burn » en 2025), soit trois des six pistes de leur premier et présent EP, «
Mantis », signé chez
Blood Blast Records. La menue rondelle serait-elle à considérer comme une simple parenthèse, une respiration nécessaire dans le processus créatif du groupe ou encore telle un heureux trait d'union entre passé et présent, comme pour mieux préparer l'avenir ? Ce faisant, les 18 laconiques minutes de la galette seraient-elles à même d'asseoir plus encore la troupe parmi les valeurs confirmées du metal symphonique moderne à chant féminin ?
Dans ce projet, le line-up a subi un léger remaniement. Si l'on y retrouve
Marina en qualité de frontwoman, Max van Esch aux guitares ainsi que Joeri Warmerdam (Civil
Discourse, Fakie Faceplant, ex-System
Overthrow) derrière les fûts, le bassiste de
Blackbriar, Siebe
Sol Sijpkens, viendra grossir les rangs. Avec la participation, pour l'occasion, de Jules Mitch, chanteuse aux rocailleuses impulsions du groupe de post hardcore allemand Setyoursails. De cette fraîche collaboration naît un mouvement rock'n'metal alternatif conjuguant metal moderne, hardcore et rap, se calant davantage dans le sillage d'
Amaranthe, Metalite et Setyoursails que de
Lacuna Coil, Volturian ou encore
Delain, soit à quelques encâblures de leurs précédentes offrandes ; une prise de risque en soi, qui a pour corolaire une production d'ensemble de bonne facture, à commencer par une qualité d'enregistrement difficile à prendre en défaut. Il ne nous reste plus qu'à suivre nos quatre intrépides compères dans leurs pérégrinations...
Se dessine une œuvre éminemment sanguine, essaimant quelques moments de pure jouissance auditive. Ce qu'atteste «
Slow Burn », étourdissant mid tempo d'obédience metal moderne aux effluves hardcore, à mi-chemin entre
Amaranthe et Setyousails ; mis en exergue par un duo féminin en voix de contraste en alternance des plus saisissants – les impulsions de la frontwoman s'unissant alors à celles de Jules Mitch dans un vaste champ de turbulences –, couplets entraînants et refrains entêtants glissent avec célérité dans nos tympans alanguis. Bref, un hit en puissance d'une redoutable efficacité mélodique et recelant d'insoupçonnées et galvanisantes accélérations, propice à un heabdbang bien senti et quasi ininterrompu.
Dans une même dynamique, et aux fins d'une diversification du champ des possibles en matière d'exercices de style, le groupe a instillé une fibre rap au cœur de certaines plages estampées metal alternatif à la colorature heardcore. Ainsi, l'intrigant mid tempo « Nectar » nous mène volontiers dans un espace rap metal des plus oppressants, environnement déjà exploré par nos acolytes dans leur précédent essai ; de fait, ses couplets à la colorature rap et des plus linéaires contrastent avec son rayonnant et immersif refrain qu'encensent les poignantes oscillations de la déesse. On pourra encore se voir happé par l'effet de contraste stylistique nourrissant le tortueux «
Sangre Mala » et le frondeur «
Good Guy », le flow rap dont s'abreuvent certains de leurs passages trouvant un écho hardcore des plus inattendus et frissonnants sur d'autres, et ce, sur fond de screams démoniaques.
Enfin, se prêtant au délicat exercice de reprise de ses propres mesures, le collectif nous immerge au sein d'un espace metal moderne dont l'audace va jusqu'à flirter avec d'organiques espaces. Ce qu'illustre la version DNB Remix de « Sangra Mala » : une alternative électro rock d'une durée écourtée par rapport à l'originale, laissant entrevoir des arrangements instrumentaux de bonne facture. Ayant troqué la touche hardcore qui, précisément, conférait toute l'originalité de l'initiale version, pour d'inaliénables et linéaires rampes synthétiques, ce regard alternatif demeure en deçà de nos espérances dans ce secteur là,
A l'issue d'une traversée éminemment tumultueuse, force est d'observer que ce modeste mais saillant opus ne relâchera pas sa proie d'un iota. A condition d'éluder le dispensable interlude semi-instrumental d'inspiration électro « Intermission », l'amateur de metal alternatif à orientation hardcore et rap y trouvera assurément matière à se sustenter. Tout aussi pulsionnel et bodybuildé que son prédécesseur, ce nouvel effort, en l'état, s'avérera cependant plus déconcertant pour un auditorat déjà sensibilisé aux vibes symphoniques antérieurement disséminées par nos acolytes. Ce faisant, ballades et/ou fresques manquent à l'appel au profit de pistes calées sur une dynamique rythmique assez soutenue, quelque peu stéréotypée. Une ingénierie du son plutôt soignée, des lignes mélodiques entêtantes, quelques prises de risques consenties et une signature vocale aisément identifiable et des plus sensuelles permettent au groupe de compenser partiellement ces carences. Bref, une œuvre bouillonnante et tortueuse, synonyme de changement de cap amorcé pour
Marina La Torraca et ses compères...
Note : 13,5/20
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