« La peur est un cri, la terreur un murmure »
Incarcération. Incendies. Violences démagogiques et spirituelles. Le règle de la terreur instauré par la scène black metal norvégienne au début des années 90 n’a connu aucune demi-mesure et reste à ce jour l’extrême revendication d’un art dédié au satanisme et à la parole démoniaque des esprits.
Quinze ans après ses débuts,
Gorgoroth, l’un des principaux fers de lance du mouvement, continuait encore d’abreuver de sang et de haine son périple black metal vindicatif et brutal, particulièrement avec un "Ad Majorem
Sathanas Gloriam" impressionnant d’intensité et de négativité. Les débuts du groupe étaient désormais loin, mais l’idéologie guidé par
Infernus, guitariste, perpétuait dans l’héritage des nouveaux membres influents de la horde, à savoir
King Ov Hell (bassiste et principal composition de ce dernier et "
Twilight of the
Idols") et Gaahl (chant).
Mais malgré cette même ferveur spirituelle guidée par l’aura du groupe, les membres en arrivèrent à s’entredéchirer pour aboutir à un procès foncièrement grotesque, où chaque partie de
Gorgoroth luttait pour obtenir les droits qui, à leur goût, leur revenait respectivement de plein droit. Suite à cette grotesque mascarade, pleinement financière et à mille lieux de la quête idéologique du combo,
Infernus fut finalement déclaré propriétaire légitime du monstre, malgré le fait que les derniers opus composés par
King furent ôtés de la discographie officielle du groupe.
Après quelques mois où deux
Gorgoroth s’affrontaient respectivement,
King ov
Hell et Gaahl donnèrent finalement un nom à leur nouveau méfait, à savoir
God Seed, mais le vocaliste décida pendant un temps de se retirer de la scène musicale (ce dernier avait vécu une incarcération de plusieurs mois pour violence sur autrui et désirait prendre du recul). Les compositions écrites aboutirent donc à un album sortant sous le propre nom du bassiste, répondant au patronyme de "The Underworld Regime", avec notamment Shagrath (
Dimmu Borgir) au chant et moult musiciens reconnus aux instruments (
Frost*, Ice Dale…).
C’est aujourd’hui l’heure d’un véritable départ pour
God Seed, qui, mis à part un album live enregistré au Wacken avec des compositions de
Gorgoroth, ne disposait encore d’aucun album original. "
I Begin" voit aujourd’hui les ténèbres du jour, et s’apprête à démontrer sa suprématie incontestable sur l’empire black metal que s’est lui-même créé le talentueux bassiste, l’un de ces grands musiciens des dernières années.
Délaissant très loin les comparaisons avec le désastreux "Quantos Possunt Ad Satanitatem Trahunt" de
Gorgoroth (malgré le retour de
Pest aux vociférations), "
I Begin" est un album rejetant toutes les conventions, les barrières stylistiques et les stéréotypes du black metal pour s’affranchir complètement de quelconques influences et s’imposer comme une entité unique et hypnotique.
Enregistré par des musiciens expérimentés mais moins reconnus,
God Seed prend la voie de l’expérimentation en s’éloignant du black metal cru et minimaliste de ses influences. L’intervention massive de claviers (interprétés par Geir Bratland, l’actuel claviériste de
Dimmu Borgir) y est également pour beaucoup, apportant une vision expérimentale et non-conventionnelle très importante, s’enlisant parfois dans les tréfonds d’une musique industrielle et noise.
I Begin reprend là où l’expérimentation de "
Twilight of the
Idols" s’était arrêtée (particulièrement dans le rendu vocal infernal et maladif de Gaahl) avec une production plus proche d’"Ad Majorem
Sathanas Gloriam", mais avec un aspect plus organique et vivant.
"
Awake", portant très bien son nom, laisse éclater la haine viscérale de Gaahl sur un blast beat très tendu et ses hurlements d’outre-tombe reconnaissables entre mille. On ressent dans la production un aspect sale mais pourtant presque moderne, avec énormément d’effets sonores apportant une vision hypnotique et presque surnaturelle. Charismatique et dogmatique, Gaahl impose son aura démoniaque tandis que les claviers apparaissent de plus en plus tout au long de la composition. "This from the
Past" poursuit sur un riff relativement proche de "
Wound Upon Wound" mais avec, une fois de plus, une prépondérance des claviers. Néanmoins, ils ne se relèvent jamais symphonique ou « easy-listening », ils sont au contraire un vecteur pour rendre la musique encore plus sombre et possédé, mystique même.
Le black metal de
God Seed prend une tournure résolument unique et non-conformiste sur les compositions suivantes, où le rythme se ralenti pour donner plus de consistance aux ambiances infernales composées par
King ov
Hell. "Aldrande Tre" est ainsi une longue descente aux enfers aboutissant sur un riff impitoyable et incroyablement intense, sur lequel Gaahl ne fait que susurrer ses tourments dans une interprétation saisissante et exorcisante. "Lit", plus lente et mélancolique, se veut plus sombre encore par l’intermédiaire du chant clair du norvégien, emplie de souffrance et de haine. Les claviers sont au centre du break, alors que les guitares s’effacent pour offrir un pont presque progressif avec une descente de gammes au piano. Dans un esprit similaire, "Alt Liv" délivre de véritables trésors d’interprétations autant dans la ligne de basse que dans le chant toujours aussi impérial, entre narrations, déclamations claires et hurlements d’animaux. La batterie, élément fondamental de la composition, permet une aération totale des parties et une intelligence de chaque instant. Se rapprochant volontairement de l’ambiant ici dans l’approche, cette vision trouve son paroxysme dans le terminal "
Bloodline", entièrement électronique et industrielle, terminant sa révérence sur des cris de jouissance, des samples de perversions et une boite à rythme glaciale. Le black metal n’est désormais plus, une nouvelle page se tourne et le règne de
God Seed se trouve déjà à feu et à sang, diabolique et pervers, abyssal et résolument obscur.
Obscur. C’est le terme qui convient le mieux à ce "
I Begin" (intitulé de plus fort symbolique) car, si la violence est bien présente, ce n’est plus le chantre de
King ov
Hell. L’ambiance, l’obscurité et les émotions dissidentes que procurent l’écoute de cet album ne sont que les premières étapes d’un psyché résolument tourmenté et, en frisant la schizophrénie, entrouvre les portes du génie face à lui. "
I Begin" est certainement l’album de black metal m’ayant le plus intrigué, impressionné et passionné depuis le "Ylem" de
Dark Fortress, une création unique et personnelle, osant s’afficher sur les sentiers de l’anti-conformité. Une création ultime d’un black metal que l’on osera qualifier d’évolutif.
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