Il fait froid, très froid, et la nuit est d’un noir si dense qu’elle semble palpable.
Des créatures rôdent, issues des profondeurs de la terre, de l’histoire et de l’âme humaine ; sentiments morbides, humeurs sordides… Elles sont séculaires, autant que les mythes et légendes qui les mentionnent ou que les craintes qu’elles inspirent.
Dans ce climat hostile, femmes et hommes s’abritent dans des cabanes en rondins de bois, isolées ou regroupées dans des hameaux perdus.
Alors réapparaîssent de sombres pensées refoulées avec les doutes et la méfiance, cependant que tout est calme en apparence. Car le froid engourdi, et la nuit restreint le champ d’activité… Les proies sont usées, fatiguées, vulnérables.
Khold inspire cela, en partie déjà du fait qu’il s’agirait d’un jeu de mot entre “kald” (“froid” en norvégien) et “old” (“ancien” en anglais), mais aussi de par ses sources d’inspiration. En particulier les textes de la poétesse et romancière Hildr, la femme de Gard (le vocaliste guitariste), qui signe les paroles du groupe.
À travers la mythologie norvégienne sont abordés les thèmes de la peur de l’inconnu, de la méfiance et de la solitude qui en découlent, et qui amène à la torpeur, la mélancolie, la souffrance et la mort dans l’indifférence la plus totale.
L’ambiance glaciale et nocturne qui paralyse l’entrain, se traduit musicalement par un Black
Metal mid-tempo, sobre, pesant, répétitif, mais captivant, groovy, voire Rock N’ Roll. Pour lutter contre l’apathie et retrouver un peu de chaleur humaine, pour combattre l’amertume et la dépression, il est bon d’aller se réchauffer en dansant le quadrille dans la salle des fêtes (comme dans le clip vidéo de “Blod og Blek”, titre présent sur l’album précédent,
Krek).
Khold ne fait pas dans la technique, ni dans l’épique, cela reste classique, naturel, rustique. Country, dans une interprétation noble du terme. On a l’image d’un patelin avec ses habitants simples, au quotidien rude mais paisible - tant qu’ils ne sont pas visités par ces créatures nocturnes, symboles de leurs vices cachés. Sans fioriture donc, comme l’emballage en carton rugueux et l’artwork qui se résume à des photos d’une cabane en rondins de bois, où l’on retrouve, suspendu à un mur, le crâne d’un gibier de trappeur, similaire à celui du logo du groupe.
Cette cabane sera d’ailleurs le décor du clip vidéo de “Hundre å Gammal” (qui se traduit par “âgé d’une centaine d’années”), troisième titre de cet album éponyme.
Un morceau bien choisi puisqu’il illustre parfaitement le côté sombre de l’album, rustique et authentique, sans aucun excès nihiliste ou agressif habituellement associé à la scène Black
Metal norvégienne. Mais peut-on encore parler de Black
Metal avec ce chant plus rauque que criard, ce son lourd, ces compos carrées ?
Quelle que soit l’étiquette qu’on donne à ce groupe cela reste très addictif à l’oreille de ceux qui aiment de temps en temps un peu de simplicité. Car il ne s’agit pas de facilité pour autant. Si
Khold fait des albums qui se ressemblent, en revanche les titres ne se ressemblent pas, même si la recette reste la même ; des titres différents dans la continuité des précédents, en somme, avec leurs lots de riffs et leitmotiv entêtants (à l’instar de grands groupes comme Motörhead pour le Heavy Rock N’ Roll et
Bolt Thrower pour le Death
Metal qui font la même chose sans se répéter - ou du moins sans qu’on s’en lasse).
Pour ne pas risquer de lasser, justement, les titres ne dépassent pas et n’atteignent même pas les quatre minutes ; hormis “Rekviem”, inquiétant et envoûtant, qui reprend la formule hypnotique de “Hundre å Gammal” : notes qui sonnent sur un fond ronflant de guitare et basse.
Néanmoins, tous les riffs et toutes les mélodies ne sont pas graves et angoissants. Le premier morceau, “Der Kulden Rår”, ouvre efficacement l’album, de manière festive, en ce sens qu’à défaut de pogoter on irait bien guincher sur un parquet en bois. De même avec “Troløs”, terriblement Thrash N’ Roll ! Et “Villfaren”, propice au headbanging. Sans vouloir vexer personne, certains peuvent parfois songer à du Sodom (“
Die Stumme Ursel”). Avec “Sann Ditt Svik” et “Straff” on peut trouver une touche de
Sludge.
Accrocheur, agréable, direct, sans artifice, un album au style à (re)définir. Black
Metal pour les uns malgré l’absence des caractéristiques bruitistes et brutales du genre, Thrash
Doom N’ Roll pour d’autres… Quant au groupe, il ne se prononce pas ;
Khold précise juste qu’il tient à être sincère dans sa démarche artistique. Et ça se ressent.
Un pote les a vu au Brutal Assault l'année dernière et les a trouvé dantesque (c'est son mot).
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