Steven Wilson est un touche à tout hyperactif aux myriades de projets tant solos qu'en groupes. Entre
Porcupine Tree, Blackfield,
Storm Corrosion, ses activités de remix et de production pour des artistes prog (Steve Hackett entre autres) ou death progressif (
Opeth), on se demande s'il a du temps pour faire autre chose.
Wilson nous livre avec
Hand.Cannot.Erase. son quatrième album solo. Si The
Raven That Refused To Sing (
And Other
Stories) était un véritable hommage au prog', bardé de morceaux aux influences clairement assumées, il souffrait cependant d'un trop plein de morceaux alambiqués. Ce nouvel opus, quant à lui, est radicalement différent, même s'il garde intacte la patte wilsonienne et l'incroyable capacité de son auteur à écrire des mélodies et à retranscrire musicalement des émotions.
Comme toujours chez l'Anglais, le son est irréprochable, le mixage à son summum, ce qui confère à l'ensemble une précision incroyable pour chaque piste instrumentale. D'une durée d'un peu plus d'une heure, l'album frôle la perfection sonore à tous les points de vue. La production et les arrangements sont tout bonnement, avec l'écriture, les meilleures qualités de
Wilson, ce pourquoi, d'ailleurs, de nombreux artistes l'ont appelé.
Steven Wilson, c'est également des concepts. L'homme n'écrit pas dans le vide, il ne fait pas des albums sans avoir mûrement réfléchi à son sujet.
Wilson écrit de sa seule main et s'entoure des meilleurs pour jouer sa musique, il se décrit comme un maniaque au sujet de l'écriture d'ailleurs. Pour
Hand.Cannot.Erase. il s'inspire d'une histoire tragique pour dévoiler onze titres qui s'enchaînent avec cohérence.
Steven Wilson s'est ainsi inspiré de l'histoire de Joyce Vincent, citoyenne britannique décédée en 2003 dont le cadavre n'a été découvert qu'en 2006 suite à des réclamations d'huissiers en raison d'impayés de loyers. Si l'album ne décrit pas exactement ce fait divers, il sert de point de départ pour son travail d'écriture.
Wilson déclare que son album ne fait pas référence à la mort mais à la disparition voulue d'une femme, il entremêle des éléments de science-fiction et, au travers de ses chansons, traite de sujets qui le touchent : la famille, les relations humaines, Internet, les réseaux sociaux qui, finalement, nous éloignent les uns des autres. La finalité est de dire qu'on peut disparaitre dans un monde hyper connecté, sans qu'une personne physique ne s'en inquiète, qu'on peut ne vivre que virtuellement.
L'album alterne les ambiances, parfois à la limite de la légèreté, parfois grandiloquentes, souvent proches de la dépression. Mais
Wilson lui-même déclare que sa musique est, par essence, dépressive. Les sonorités progressives s'allient à des sons beaucoup plus modernes et électroniques, apportant une vraie fraîcheur au travail de l'Anglais. De longs morceaux aux sonorités très prog' (Regret #9,
Home Invasion,
Ancestral) côtoient des titres plus pop (
Hand. Cannot. Erase, Perfect
Life) et d'autres aux allures folk (Happy
Return, Transcience).
Steven Wilson sait s'entourer et a convié d'excellents musiciens pour l'accompagner dans son projet : Nick Beggs à la basse, Adam Holzman pour les claviers, Marco Minnemann à la batterie, ainsi qu'un grand nombre de guests. L'ensemble exécute à la perfection la partition de
Wilson, sans aucune fausse note.
Au rayon des surprises, on trouvera la chanteuse Ninet Tayeb, invitée de luxe, apportant une touche émotionnelle supplémentaire. Pour s'en convaincre, il suffit de prêter une oreille à "Routine". Ce morceau, long de neuf minutes, a bénéficié d'un superbe clip. Totalement poignant, le morceau bénéficie de l'ajout du jeu de guitare de
Guthrie Govan qui livre un solo déchirant, illustrant parfaitement l'émotion ténébreuse dégagée par le titre. Le duo
Wilson/Govan nous refait le coup de
Drive Home du précédent album avec un long titre inspiré et grandiose.
Les deux morceaux
Home Invasion et Regret #9 sont une illustration parfaite du travail et de l'évolution de la musique de
Wilson. Deux longs titres que tout oppose. Le premier, très prog' au départ, affirme la maîtrise du garçon pour créer des morceaux à l'inspiration Led Zppelin. Le second, aux sonorités plus électro et au fantastique solo de
Guthrie Govan confirme une fois encore le talent d'écriture de
Steven Wilson.
Hand.Cannot.Erase. est donc un album puissant et moderne, bien plus actuel que les précédentes productions solos de
Steven Wilson. Parfait équilibre entre son travail passé au sein de
Porcupine Tree et son oeuvre personnelle, l'album concentre le meilleur du bonhomme. Certains morceaux sont tout simplement de vraies bombes progressives que n'auraient pas reniées de grands noms du genre.
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