Liste des groupes Death Technique First Fragment Gloire Éternelle

Fondée en 2007 par Philippe Tougas (Cosmic Atrophy) et les frères Gabriel et David Alexandre Brault-Pilon, First Fragment est l’une des forces montantes de la scène death technique québécoise. Contrairement à ses compatriotes tels que Beyond Creation, Neuraxis ou encore Cryptopsy, notre quintet ne se contente pas uniquement d’un death qui bombarde à deux-cents à l’heure, bourré de riffs et de blasts à en perdre la tête. Notre formation se distingue en effet avec une empreinte néoclassique omniprésente parfois semblable aux travaux de certains compositeurs classiques. Les musiciens complexifient même leurs œuvres avec des passages qui rappellent le power metal ou encore des sections qui respirent l’Andalousie et le flamenco avec l’intégration de guitares flamenca, le tout pour un résultat aussi surprenant qu’authentique.

Si l’aventure de nos Québécois a commencé il y a quinze ans déjà, hormis un EP autopublié en 2010 The Afterhought Ecstasy, il aura fallu attendre près d’une décennie avant la présentation d’un premier disque Dasein publié sous le label Unique Leader Records. L’attente ne fut pas vaine avec une première belle réussite, une ovation quasi totale et déjà une sacrée consécration pour le groupe puisque trois ans plus tard, nos artistes étaient en tête d’affiche pour la tournée d’Obscura en 2019.
Fort heureusement, nous n’aurons pas à attendre une dizaine d’années supplémentaire avant de voir notre quintet accoucher d’un second opus. En cette fin 2021, le combo québécois nous dévoile sa seconde toile Gloire Eternelle, toujours sous la maison de disques Unique Leader Records. Néanmoins, c’est avec une line-up quasiment métamorphosé qu’il s’agisse de la basse, de la batterie ou de la guitare que First Fragment fait son grand retour.

Sans grandes surprises, on retrouve nos Québécois dans un death technique de haute voltige, fulminant et toujours aussi acrobatique. Il serait inutile de comptabiliser le nombre de solos de basse ou de guitare exécutées tant ils se comptent généralement par dizaines dans une seule et même composition. Le chant reste fidèle à lui-même, en français, très impactant et toujours avec une démarche lyrique qui flirte souvent avec la poésie.
En d’autres termes, le travail vocal et de composition possèdent un équilibre entre un Spawn Of Possession et Theory In Practice. L’esprit néoclassique est quant à lui emprunté des Californiens de Cacophony. Notre quintet a ici perfectionné son art, quitte parfois à le moduler et à en mélanger les ambiances. Ainsi, nous pouvons entendre de temps à autre du jazz ou encore du funk, ce qui rend la classification du groupe complexe, voire impossible.

Nos musiciens débuteront la plupart de leurs morceaux avec des introductions fortement influencées par le flamenco et les laissent quelques fois même mener la mélodie comme pour le titre éponyme où les presque trois premières minutes nous initieront à un long mais savoureux voyage sur les terres espagnoles. La patte plus classique saura également se forger une place importante dans la partie instrumentale, et régnera même en seul maître sur Sonata En Mi Mineur où le prélude rend hommage au guitariste Jason Becker. Les Québécois nous donneront même une sérieuse leçon d’endurance et de technicité avec l’imposante pièce In’El, titre de presque vingt minutes qui nous laissera sans voix. Harmonies, passages atmosphériques ou mélodiques, solos, slaps et autres shreds nous accompagneront tout le long, tout en affichant de belles et audacieuses variations. Un vent de nostalgie souffle même sur certaines chansons comme pour Solus qui rappellent quelque peu les prémices du néoclassique.

Ce somptueux tissage musical n’est pourtant pas exempt de tout reproche. Il n’est pas rare d’avoir certains passages joyeusement bordéliques où se mêlent solos, gravity blast et growl, souvent allongés et étouffants. Le final de In’El et les quelques transitions de Gloire Eternelle sont sans conteste les exemples les plus frappants de ces confusions. L’album en lui-même souffre également de son heure-dix d’écoute avec un Mort Ephémère clairement dispensable puisqu’il reprend à peu de choses près les mêmes codes que le titre éponyme et un Soif Brûlante qui fait assez pâle figure en comparaison aux autres esquisses. Il est aussi dommageable d’avoir une prestation vocale qui manque d’émotions et qui gagnerait à être moins brut par moment comme sur Pantheum où le registre plus léger et aigu de l’instrumental pourrait laisser présager une voix plus douce.

Gloire Eternelle est une pièce solide dans son genre et First Fragment continue d’impressionner dans son tempérament sulfureux mais néanmoins original. Ce second jet n’est certes qu’une suite parfaitement logique de Dasein mais être capable de concevoir une telle pièce en moitié moins de temps que son prédécesseur témoigne d’une assurance et d’un acharnement à toute épreuve. Nos Québécois peuvent de même afficher avec fierté leur authenticité et leur personnalité atypique dans une scène technique qui privilégie de temps en temps trop l’habileté à la mélodicité. Avec moins de longueurs et un vocaliste moins homogène dans son timbre de voix, il ne fait aucun doute que le quintet pourra être qualifier comme une légende … éternelle.