Gigaton

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16/20
Nom du groupe Pearl Jam
Nom de l'album Gigaton
Type Album
Date de parution 27 Mars 2020
Style MusicalGrunge
Membres possèdant cet album20

Tracklist

1.
 Who Ever Said
 05:11
2.
 Superblood Wolfmoon
 03:49
3.
 Dance od the Clairvoyants
 04:25
4.
 Quick Escape
 04:46
5.
 Alright
 03:43
6.
 Seven O'clock
 06:14
7.
 Never Destination
 04:18
8.
 Buckle Up
 03:36
9.
 Comes Then Goes
 06:02
10.
 Retrograde
 05:22
11.
 River Cross
 05:54

Durée totale : 53:20

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Pearl Jam


Chronique @ JeanEdernDesecrator

23 Avril 2020

Le retour du songwriting en chemise de bûcheron au coin du feu

Quelle ironie cruelle pour un genre comme le Grunge, raillé pour être une musique pour ados dépressifs en haillons, d'avoir été décimé à ce point de ses têtes de proue. Andrew Wood de Mother Love Bone, Kurt Cobain de Nirvana, Lane Staley d'Alice In Chains, Chris Cornell de Soundgarden, autant d'artistes anti-héros qui ont fui dans l'autodestruction. Eddie Vedder est toujours bien vivant en 2020, et Pearl Jam fête ses trente ans de carrière avec un onzième album studio.

Quelle ironie pour Pearl Jam d'avoir eu longtemps l'image de groupe commercial du Big Four, pas celui du Thrash, hein, mais celui du Grunge.
Pearl Jam compte pourtant parmi les pionniers de la scène de Seattle, avant même sa formation en 1990, puisque ses membres fondateurs, le guitariste Stone Gossard et le bassiste Jeff Ament, ont écumé les scènes depuis 1984 avec Green River, qu'on peut considérer comme un ancêtre du genre. Après deux EP chez Sub Pop, label pépinière du grunge, puis un album "Rehab Doll" enfanté dans la douleur, le split de Green River a donné naissance à Mudhoney d'un coté, et pendant que Stone Gossard et Jeff Ament rejoignirent Malfunkshun de l'autre. Après leur arrivée, le groupe changea de nom pour Mother Love Bone, dont le chanteur Andy Wood décèdera d'une overdose en mars 1990, quelques mois avant la sortie de leur premier LP, "Apple".
Le chanteur de Soundgarden, Chris Cornell, ancien co-locataire d'Andrew Wood, monta le projet Temple Of The Dog en hommage à celui-ci, avec son batteur Matt Cameron, et fît appel à Stone et Jeff, qui amenèrent le guitariste Mike Mc Cready, et un certain… Eddie Vedder qu'ils venaient d'auditionner pour leur groupe, comme invité sur quelques titres. Tous les membres actuels du line up de Pearl Jam de 2020 étaient donc déjà réunis pour Temple Of The Dog. En octobre 1990, Gossard et Ament entérinaient Pearl Jam, avec Mc Cready en lead guitar, Eddie Vedder au chant, et enfin le batteur Dave Krusen, avec en poche un contrat chez Epic Records.

Leur premier album "Ten", enregistré en mars 1991 et sorti en août de la même année, sera un des albums marquants du grunge, et osons le dire, des années 90, pendant plus clean et rock du "Smells Like Teen Spirits" de Nirvana. Il faut dire qu'avec sa technique vocale déjà bluffante, sa gueule d'ange et ses trop-beaux-cheveux à faire baver du shampoing à ta petite sœur, Eddie Vedder alliait coolitude suprême en chemise de bûcheron et prises de positions engagées. Tout ce qu'il faut pour déclencher jalousies et défiances en matière de crédibilité. Même si ce premier album presque parfait est bardé de hits comme "Alive", "Once", "Even Flow", "Jeremy" et rien à jeter pour le reste, il reste le plus saturé et le plus noir de la carrière du groupe. Mais il avait déjà une richesse mélodique éblouissante, dans le chant de Vedder et le jeu de la paire de guitaristes Gossard/Mc Cready, qui sera leur marque de fabrique sur le reste de leur discographie. Cela se confirmera sur les albums suivants, "Vs" et "Vitalogy", qui posèrent Pearl Jam comme emblème mainstream du grunge, et par extension de la musique de jeunes, ma bonne dame.

Au fil des années et des albums, après que le mouvement grunge aît périclité, Pearl Jam est resté un survivant discret devenu une institution, gardant un line up étonnement stable, avec juste quelques changements de batteurs : Matt Chamberlain en 1991, remplacé par Dave Abbruzzese la même année, Jack Irons (ex-Red Hot Chili Peppers) en 1994, et enfin Matt Cameron (Ex-Soundgarden et Temple Of The Dog) depuis 1998. Sans splitter, le groupe a mené sa carrière en bon père de famille, dérivant vers un classic rock grungy au fumet de folk rock, comme sur les deux derniers albums, "Backspacer" en 2009 et "Lightning Bolt" en 2013. J'avais déjà lâché Pearl Jam depuis des années, lassé de ne trouver qu'une ou deux pépites de petite taille par livraison sonore, mais sur ces deux derniers LP on était sur du rock à papa sans aucune surprise, en pilote automatique, atterrissage compris, garanti sans secousses. Autant dire qu'on s'acheminait vers une agréable pré-retraite, avec l'adoubement de la bande à Eddie au panthéon du Rock'n Roll Hall of Fame en 2017, sous l'œil bienveillant de leurs pairs et grands pères de l'EHPAD du Riff.

Qu'est ce qui m'a poussé à me plonger dans cet énième sortie du quintette de Seattle ? Le titre "Gigaton" qui laissait espérer la gigabaffe que j'attends depuis que ce groupe a vu le jour (un album bourrin de Pearl Jam, j'en rêve la nuit) ? Oui, je l'avoue. La magnifique pochette du photographe Paul Nicklen captée à Svalbard, en Norvège, qui montre la calotte glaciaire du Nordaustlandet ? Oui. Le single "Dance of the Clairvoyants", où Pearl Jam surprend avec un lo-fi années 80 comme sur le dernier Muse, mais avec une profondeur qui harponne votre petit cœur d'amoureux éconduit ? Oui. Enfin une prise de risques, enfin !

Pearl Jam n'a rien fait de révolutionnaire ici, je vais arrêter le suspense, il s'est juste réveillé en tant que groupe. Qu'est ce qui a changé ? Le songwriting, déjà. Il se passe des choses dans "Gigaton", chaque titre va dans une direction claire et suit une idée. Dans les morceaux les plus grunge on retrouve un Pearl Jam mordant, sur "Who Ever Said" avec son refrain où la relation entre la voix d'Eddie et les accords de cordes fait mouche, ou sur "Quick Escape", lourd, groovy et puissant, avec un solo bien amené qui se poursuit sur un final qui rappelle celui de "The Real Thing" de Faith No More. "Take the Long Way" est plus Soundgarden que nature, à la "Badmotorfinger", mais en plus léger, en partie à cause de la façon de jouer de Cameron (un comble), qui fricote sur son charley.

Quelques titres sont plus expérimentaux, comme "Dance of the Clairvoyants" cité plus haut, au risque de faire fuir les plus orthodoxes, mais Pearl Jam le fait avec un tel aplomb qu'il réussit son coup. "Alright" est parsemé de synthés dépouillés à la Bjork, et magnifié par la belle performance de Vedder, tout en sobriété. Cette façon de chanter où il n'essaie plus de faire étalage de sa maîtrise technique de son organe me touche bien plus, et laisse affleurer l'émotion avec naturel. Cette simplicité se retrouve aussi sur le jeu des autres musiciens, qui vont à l'essentiel et sont au service des chansons. La conception de l'album a pris trois ans, et comme l'a dit Stone Gossard, il ont préféré prendre leur temps. Le résultat est que chaque titre, ou presque a une vraie raison d'être, comme un enfant désiré peut l'être. Et voilà, je verse une larmichette.
Le versant classic rock, omniprésent sur les derniers LP, est aussi de mise ici, mais de manière plus convaincante ("Superwolf Bloodmoon" gentiment pêchu avec un petit coté punk rock bien coiffé, "Never Destination" dans la même veine, très ricain chromé à la Huey Lewis).

Heureusement, Pearl Jam a réussi à sortir du Classic Rock trop plan plan pratiqué sur l'album "Backspacer", et à varier son propos, avec un "Seven O'clock" posé, avide de grands espaces, où le timbre d'Eddie Vedder se fait profond comme le grand canyon et quasi springsteenien. "Come Then Goes" rappelle ce qu'il faisait en solo sur la BO de "Into the Wild" avec juste guitare sèche et sa voix de vieux jeune buriné qui laisse couler ses souvenirs au coin du feu.
Le groupe se fait aussi joueur avec "Buckle Up", fausse ballade rock avec des notes de guitare malicieuses sautillant en ternaire sur une rythmique droite, avec un intermède mêlant cuivres printaniers et chatoyants chœurs féminins.

Je dois dire que je préfère la première moitié de l'album, enthousiasmante et variée, alors que le troisième tiers qui est très Americana me parle moins, d'autant plus qu'il ralentit progressivement sur deux dernières pistes bien folk, "Retrograde" et "River Cross" qui mènent du coin du feu au sac de couchage.

Néanmoins, ce "Gigaton", s'il n'a pas la maestria insolente et juvénile de "Ten", m'a réconcilié avec la bande à Eddie Vedder. Ce jeune frusquin qui se balançait comme un chimpanzé aux lights sous les yeux médusés de ses zicos, a vu, vécu et vaincu, il est revenu, et su perpétuer le message d'espoir qu'il lançait dans les années 90. Et rien que pour ça, on ne le remerciera jamais assez.

4 Commentaires

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Samael64 - 23 Avril 2020:

merci pour la chronique,tu m'as donné envie d'y jeter une oreille alors que j'ai lâché PJ depuis 2-3 albums (et qu'ils me désespèrent depuis même + longtemps)

David_Bordg - 25 Avril 2020:

Sans y atteindre ses glorieux aînés, Il est bon et beau avec quelques pépites, notamment quick escape, et comes then goes qui est classique pour PEARL JAM, elle me rappelle of he goes, mais sublime.

fishbelly - 02 Juillet 2020:

Je ne sais pas si je dois me forcer à écouter cet album !!! j'accroche pas vraiment ...quelques bonnes idées à droite à gauche , mais de titres forts (les solos sont pas mal)  il n'y en a pas !!!!!  Pas mauvais mais loin de mon attente ...avec le temps peut-etre. Attention au syndrome RHCP !!!! Bon je m'en vais écouter le dernier AIC

 

 
muziktommy - 19 Septembre 2022:

Ma première idée sur Pearl Jam quand j'ai entendu leur musique : une véritable batterie de casseroles. C'était pas faux (loin de là), c'était pas diffus ou étouffé mais c'était cinglant et authentique. Un truc bizarre qui m'a réveillé et plus tard me donnera envie de jouer de la musique. Pearl Jam c'est 'Jeremy' c'est 'Black' c'est 'Rearview Mirror' ou 'Do the Evolution'. Alors oui les chemises à carreaux, les cheveux tout bizarres et tout le tralala ça a contribué à la légende. La vénération de Vedder pour les Ramones ou Neil Young aussi... Mais c'est un groupe qui a toujours su évoluer sans vendre son âme au diable ni perdre son public (ou peut-être le rythme de leur évolution correspond à mon rythme à moi, allez savoir :-))... Rien à foutre du star system même s'ils sont probablement hyper blindés : ils sont ,à mon sens et sans être caricaturaux, l'incarnation du rock dans toute sa splendeur....  

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