S'il y a un boulot à mener pour changer les mentalités sur le metal, c'est (à défaut de faire aimer le genre à tout le monde) de le faire au moins comprendre au plus grand nombre. Même le death metal le plus brutal peut être compris, pour peu qu'on le présente comme il est pour beaucoup de formations : second degré. Contrairement au black (auquel une odeur sérieusement morbide colle à la peau) le death a souvent cet avantage fabuleux du grotesque et de l'exagération, comme le gore l'a au cinéma. Et le second degré, en 15 ans d'existence et neuf albums,
Debauchery en a fait sa marque de fabrique.
Le quatuor teuton ne s'est jamais pris au sérieux, puisant à la fois dans l'imagerie grand-guignolesque du death, une attitude rock'n'roll, et un nihilisme fêtard anarcho-punk. Les érotomanes se souviendront longtemps de la pochette de «
Back in Blood », les admirateurs de n'importe quoi de « Rockers and
War », (disque fou qui était capable de passer d'un death bien gras à un metal symphonique survolté en une mesure) ou de la reprise de «
Eight Days a Week » des Beatles... En somme, tout le monde pourra aimer
Debauchery pour des raisons plus ou moins avouables. Et les fans, eux, qu'aiment-ils ? Eh bien, depuis «
Kill Maim Burn », la saveur est peu ou prou la même et «
Fuck Humanity » la conserve : c'est le gras et la lourdeur du death'n'roll, avec un côté vintage et assuré. Le classique efficace.
"Intro" est une ouverture calme, avec une guitare seule, comme le groupe avait déjà entamé "
Kings of Carnage". Dès le vrai début du disque, "My Religion is
Hate" (quand on vous dit que c'est "second degré") lâche un riff bien thrash sur un morceau très construit (couplet, pont, refrain) et s'écoutant donc très bien, sans surprises, ni audace, si ce n'est la voix claire au refrain.
"Ironclad" embraye, quant à lui, sur un thrash plus mélodique, pas loin du heavy jusqu'à un solo avec chorus de guitare qui ne manque pas d'un certain clinquant typique des 80's. On pourra apprécier ou non... A partir de là, l'album a sa mécanique et n'en sortira pas : un death'n'roll barbu entre thrash, très léger death (honnêtement à part le growl et une double-pédale très présente...), heavy des 70-80's, et un peu de crasse à la stoner. Du
Entombed en moins death, du
Hellyeah en plus lourd et en mid-tempo.
S'ensuivent des morceaux qui ont tous leur part de coolitude et qui font passer un bon moment dans l'ensemble, avec leurs petits passages particulièrement convaincants, comme l'accent rock sudiste de "Murderbrute Minotaurs", "
King of Killing Zone", ou la partition de batterie excitée de "
Fuck Humanity". Dommage que ce dernier morceau n'ait d'ailleurs pas la dynamique rageuse que son titre implique, pas même dans sa cadence (dans le registre « J'emmerde le monde avec véhémence », "People +
Shit" de Slipknot a encore de beaux jours devant lui)... Mais c'est révélateur de la grosse faille du disque : le manque de punch réel et d'originalité. Le groupe pratiquant un death'n'roll des plus classiques sans le retravailler, «
Fuck Humanity » sonne comme un certain anachronisme (il aurait pu sortir il y a un quinze ou vingt ans, ce disque) et n'évite pas l'ennui.
Le problème de
Debauchery, c'est, en effet, que c'est cool mais répétitif, sans efforts. « For the
Emperor », par exemple, bouge bien, mais il n'y a pas grand-chose à en dire, avec un solo de guitare classique et des accords plaqués en plus de ne pas être très recherchés. Appliquée à tout l'album, cette caractéristique n'empêche pas la lassitude de pointer le bout de son nez en milieu de galette. Et ce, malgré de bons moments dans sa seconde partie avec des riffs communicatifs comme la violence fun de « Zombie Extermination
Crusader ». Différencier les pistes les unes des autres ou se souvenir d'un riff en particulier s'avère difficile, à l'issue des 51 minutes d'écoute.
S'il lassera donc les auditeurs qui chercheront une certaine complexité, une recherche et pas uniquement du « yeaaaaaaaaaaaaaaah », «
Fuck Humanity » risquera, en revanche, de plaire aux Débauchés (ceux qui aiment
Debauchery quoi) fidèles, death'n'rolleurs assurés. This is Rock'n'Roll dude !
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