Une jeune formation russe d'obédience
Metal Symphonique que l'on n'attendait pas forcément vient à son tour taquiner les cadors de ce registre, au demeurant de plus en plus prisé. Influencé à la fois par le riffing cinglant et l'orchestration emphatique d'
Epica, par les accords bien distribués et l'atmosphère émoustillante de
Xandria ou par les traversées mélodiques enjouées de
Delain, le quintet issu de Saint-Pétersbourg nous offre ses premières gammes à l'instar de cet humble EP auto-produit de quatre titres, pour un quart d'heure d'écoute à peine.
Créé en 2013, le groupe se compose de : Lyubov Antropova, chanteuse au timbre aérien et finement ciselé, qui n'est pas sans rappeler les charismatiques inflexions de
Anneke Van Giersbergen ; Ivan
Kaiser, maître d'oeuvre aux claviers ; Denis Geit à la basse ; Dmitriy Popov, guitariste émérite et Igor Borodin, batteur à la claque sèche. Précisons que les sessions d'enregistrements de batterie ont eu lieu en Finlande au Astia Studio, celui-ci ayant également reçu
Children Of Bodom à cet effet. De plus, la production et l'ingénierie du son sont l'oeuvre de Vadim "Wayland" Parshutkin de "Soundway Records", ce qui se ressent sur la qualité de l'enregistrement d'ensemble. Une parenthèse pour souligner l'artwork soigné de la pochette, mettant en lumière une jeune artiste en habits de soirée face à elle-même, symbolisant l'univers musical de prédilection du combo. Ainsi armé, le groupe nous livre alors un
Metal Symphonique mélodique et épique bien enlevé, parfois mêlé d'une touche folk.
L'EP annonce la couleur sur l'orientation typiquement
Metal Symphonique du combo russe tout en distillant de fines notes mélodiques, et ce, sur plusieurs plages. A commencer par l'entame « Anna », titre aux arrangements bien agencés, mêlant harmonieusement samples de hautbois et de violoncelle. On remarquera aussi la qualité du mixage, équilibrant efficacement les parties vocales et orchestrales dans l'espace sonore. Ainsi, on décèle une dense empreinte instrumentale, sur les traces de
Delain. De son côté, un flux vocal enchanteur délivré par la jeune déesse n'est pas sans rappeler
Darkwell, avec une pointe de
Dark Princess. Des choeurs chatoyants s'invitent au micro, comme pour renforcer le relief du champ vocal d'ensemble. Ainsi, un joli filet mélodique, bien servi par ces derniers, notamment sur les refrains, s'avère immersif à souhait. Par ailleurs, un pont au son d'un solo bien infiltrant au synthé se fait happer par une reprise époustouflante du corps vocal global. Et aux violoncelles et hautbois de conclure comme ils avaient commencé, tout en finesse.
L'exercice semble se répéter sur l'outro «
Sacrificed », mais des subtilités techniques le différencient du morceau sus-cité. On y trouve, cette fois, des samples d'orchestrations où dominent cuivres et violoncelles aux ondulations et aux correspondances bien pensées. S'inscrivent dans cette mouvance des riffs musclés ainsi qu'une roborative rythmique, où évoluent de déchirantes percussions. Sur le plan vocal, le timbre de la belle est fluide et charmeur, dans la lignée d'
Anneke Van Giersbergen. Des choeurs s'insinuent également pour ajouter encore un supplément de puissance vocale, parallèlement aux riffs fougueux et à une instrumentation emphatique régnant sur toute la piste. L'influence d'
Epica peut ainsi se faire sentir.
Le combo a également panaché sa proposition symphonique avec une empreinte heavy et une touche progressive, tout en veillant à se montrer plutôt entraînant. Ainsi, «
Find the Answer », plage souriante à la pénétrante et puissante orchestration heavy, nous conduit vers des couplets pleins d'allégresse, véhiculés notamment par une patte vocale à la fois roborative et claire de la jeune déesse. Ces impulsions apparaissant plus prégnantes encore sur les refrains, ceux-ci se faisant, dès lors, incitatifs à l'adhésion. Des changements de tonalité s'observent également et contribuent à rendre cette pièce envoûtante, à la manière de
Nightwish. Difficile aussi de passer outre la progressivité de la section rythmique accouplée à des riffs bien acérés. On n'oubliera pas non plus le solo de guitare fuligineux, ni la reprise instrumentale heavy, ni même la partie vocale évoluant crescendo. Bref, un moment privilégié de pure jouissance auditive.
Pour compléter le tableau, une empreinte folk vient s'inviter à la danse et enrichir l'espace symphonique du son samplé d'une cornemuse virevoltante. Ainsi, «
Merry Song » nous accueille par de savoureux arpèges au piano et par un fond d'orchestration apaisant. C'est alors que la cornemuse se fait ouïr, conférant une pointe de dynamisme à l'ensemble. Aussi, de fluides couplets apparaissent ainsi que des refrains rafraîchissants. D'autre part, des riffs grincheux parsèment la piste de leur présence, contrastant avec une sirène enjouée, fouettant chaque note de son cristal de voix haut perché, comme le ferait
Atargatis. Au passage, les arrangements sont de bonne facture et la guitare sait nous convaincre de la qualité de ses accords, avant l'ultime reprise vocale de cette piste vivifiante.
On ressort de l'écoute de cette petite galette avec l'agréable sentiment de découvrir un groupe qui, techniquement et artistiquement, en a sous le pied. D'autre part, il n'hésite pas à se fondre dans le sillage de ses sources d'influence, mais avec subtilité tout en y imprimant sa marque. Cela dit, on aurait souhaité davantage de pistes pour le voir nous proposer d'autres types de morceaux encore, tels que des ballades, des instrumentaux, des duos, des variations de durées. Par ailleurs, malgré des couplages stylistiques assez convaincants, l'exercice au demeurant convenu tend à se répéter, comme pour rassurer l'auditeur de la capacité du combo à rester fidèle à son registre. Du coup, on y perd un peu en intensité émotionnelle, en coups de théâtre, en prises de risques, et au final, en originalité.
On conseillera cette production aux amateurs de
Metal Symphonique à chant féminin, pour le plaisir de la découverte, et pourquoi pas, de l'adhésion, l'accessibilité mélodique des titres contenus dans cette œuvre initiale aidant. A condition de densifier encore le contenu de sa prochaine rondelle, le combo russe devrait pouvoir éveiller chez un public varié d'authentiques plaisirs. A cet effet, comptons sur son habileté à nous séduire pour nous transporter vers quelques rivages enchanteurs dont il semble détenir les clés...
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