Liste des groupes Grunge Screaming Trees Even If and Especially When

Deux ans déjà que les Screaming Trees nous envoient un hard-rock à tendance psyché et commencent à "s'imposer" comme un des pères fondateurs du grunge avec ceux que nous connaissons actuellement. Les idées fusent, à tel point qu'en seulement deux petites années, trois productions sont sorties (en comptabilisant celle-ci) avec quelques surprises, des révélations, mais aussi des choses beaucoup plus dispensables, fragiles. Ce qui prouve aussi que la formation n'en est qu'à sa première période d'avant-succès où le rythme des publications n'en finira plus de tourner et où globalement, pour chaque nouvelle idée, ces groupes-ci s'empresseront de rentrer en studio et de se mesurer à leurs potes de Seattle. Qui donc sortira vainqueur de ces "affrontements" et surtout, qui nous dit qu'ils ne seront pas laissés à l'abandon ou noyés dans la masse une fois le cap de 1991 passé ? Il est encore trop tôt pour le dire... Alors laissons plutôt Lanegan et sa bande profiter de cette fougue insouciante qui les touche sur ce second opus du nom de « Even If and Especially When » qui sent bon la verdure et les plantes, encore !

En fait, la galette reprend plus ou moins là où le EP « Other Worlds », sorti en 1985, s'était arrêté. Les douze morceaux que nous avons sous le coude sont globalement moins longs, mais à peine plus nombreux que le premier album du combo « Clairvoyance » délivré un an plus tôt. De ce côté-là, on peut même dire que le retour chez SST Records a nettement amélioré la production, plus inspirée, mais qui suit aussi un fil directeur plus fluide et certes un peu plus cohérent. De ce fait, même avec la présence de quelques titres assez dispensables et en dessous des autres (« Cold Rain », « Other Days and Different Planets », « The Pathway »), ce second opus s'en sort bien mieux que le précédent, en témoigne un contenu et des idées parfois très intéressantes. Et en parallèle de la sortie du nouvel album studio de Steve Fisk « 448 Deathless Days », on retrouve ce même personnage associé à la production, de la même manière que sur les travaux précédents d'ailleurs.

D'emblée, avec « Transfiguration » on repère assez bien la pointe de hard fleuri sans doute venue de « Other Worlds », même si en fin de compte, le charme si particulier qui planait sur ce petit EP était peut-être plus fort dans son contexte. Mais ces mêmes éléments seront d'autant plus mis en avant sur le « World Painted » associant, en intro, les futurs riffs qu'on connaîtra plus tard à Nirvana avec cette voix psyché très reconnaissable et la touche post-punk/expérimentale qui fait souvent la différence chez les Screaming Trees. Tandis qu'à côté de ça, les compositions puisent leur inspiration dans les albums ou les productions antérieures et non se renouveler, la formation semble à nouveau faire du surplace ici. Car effectivement, pour enrichir avec d'autres exemples, on a un « Straight Out to Any Place » (même chose pour « Back Together » aussi) à l'orientation punk classique mais qui passe comme une lettre à la poste, puis, entre autres, ce « Flying » qui est l'oeuvre d'un bordel garanti, rappelant pas mal les morceaux de « Clairvoyance » dans leur ensemble.

Cependant, des efforts sont à noter. Pour commencer, une reprise de Iggy Pop sur « Don't Look Down », qui, si elle n'apporte rien de novateur ou de fou dans sa ré-interprétation possède un riff d'entrée très inquiétant qu'on ne soupçonnait pas tellement au groupe. L'ambiance change étonnamment de ton, à défaut de faire varier les mélodies suivantes qui se révéleront plutôt anodines. Un peu de fraîcheur ne fait jamais de mal, et c'est pourquoi le quatuor proto-grunge réalise avec « You Know Where It's At » une compo un peu rêveuse, planante et facilement pop dans ses atmosphères. Maintenant, ce sont vraiment de petits détails sur un disque comptabilisant un peu plus de trente-cinq minutes de musique, c'est certain. Screaming Trees nous fera d'ailleurs plaisir à l'écoute d'un « Girl Behind the Mask », un des meilleurs morceaux de cet album. La progression du titre est agréable, l'ambiance nous apaise très vite et les vocaux semblent ressortir correctement, comme il aurait fallu, pour marquer davantage l'auditeur. Mark Lanegan se laisse emporter dans le mélancolique, tandis que les petites guitares country de Gary Lee Conner faciliteront grandement les choses, tant elles inspirent l'homme. Après coup, certains choeurs du « In the Forest » feront plutôt bien penser à ceux de Jerry Cantrell dans quelques années et on notera également la petite intro barrée du titre, mélangeant narration, piano et rythme punk qui arrive par-derrière.

D'un album comme celui-ci, l'auditeur ne retiendra jamais plus que deux ou trois morceaux tout au plus car « Even If and Especially When » est avant tout un travail bateau (mais honnête) de Screaming Trees. Jusqu'à quand pourra encore durer cette stagnation artistique ? Plus que trois ans à tenir...