Impulsé par son introductif et frissonnant EP, «
Behind the Veil », le quartet français cofondé en 2017 par la chanteuse au cristallin grain de voix Victoria Hove, le fin guitariste
Silver Croze (
All Dogmas We Hate, Podonok) et le bassiste Florian Bestion ne reviendra que deux ans plus tard dans la course. Le temps pour le collectif de peaufiner ses compositions tout comme sa production d'ensemble, et le voici muni, cette fois, de son premier album full length, «
Enochian Keys - Chvpter I » ; une auto-production de dix pistes inédites, égrainées sur une bande auditive de 40 minutes. A l'aune de cette fraîche livraison, nos acolytes seraient-ils dès lors en mesure de se hisser parmi les valeurs montantes du metal symphonique à chant féminin ?
A l'instar de son devancier, cet effort metal symphonique gothique aux relents power et dark se fait à la fois pulsionnel, intrigant, un brin évanescent ; un message musical prégnant, empreint de délicatesse, à la technicité instrumentale maîtrisée et aux sentes mélodiques parfois complexes, où les influences de
Darkwell,
Draconian,
Tristania,
Atargatis,
Xandria et
Nightwish se font à nouveau sentir. Jouissant à son tour d'arrangements de bon aloi et laissant entrevoir l'une ou l'autre prise de risque, cet opus bénéficie également d'un enregistrement soigné et d'un mixage bien ajusté entre lignes de chant et instrumentation. Tous les voyants seraient au vert pour nous assurer une traversée des plus sécurisées dans cette mer houleuse...
Ce serait, là encore, à l'image de ses passages les plus incisifs que la troupe marque ses premiers points. Ainsi, passée la laconique et somme tout dispensable entame d'inspiration dark gothique, « The
Purgatory », les éléments ne sauraient tarder à se déchaîner et, par là même, à nous happer. A commencer par «
It's Alive », ''tristanien'' up tempo au martelant tapping ; recelant des growls glaçants, ne relâchant que rarement son étreinte tout en se parant d'une mélodicité finement ciselée et agréable, le propos poussera assurément à une remise du couvert en fin de parcours. Tout aussi torrentiels et un poil plus tourmentés, les ''darkwelliens'' « No Candle to
Ignite » et « The
Baphomet Cult » se plaisent à nous bringuebaler pour mieux nous retenir, in fine ; un break judicieusement placé et surmonté d'un fin picking à la guitare acoustique vient toutefois tempérer, et de bien belle manière, les ardeurs de chacun de ces deux brûlots.
Quand il en vient à varier ses phases rythmiques, le combo trouve parfois matière à nous assigner à résidence. On retiendra, d'une part, le ''draconien''' mid/up tempo « The Mark of the Goat » pour la fulgurance de ses accélérations et les claires inflexions de la sirène. Par ailleurs, à mi-chemin entre un
Nightwish des premiers émois et
Darkwell. sur fond d'enveloppantes nappes synthétiques, « A
Forked Tail and
Horns » se pose tel un complexe et polyrythmique propos symphonique gothique aux couplets évanescents que relayent de fondants refrains, mis en exergue par les troublantes patines de la déesse. Enfin, à l'aune de son insoupçonnée théâtralité, de son pont mélodique d'inspiration ''nightwishienne'' à mi-morceau et de son final sur fond de délicats arpèges au piano, l'obscur « You
Nephilim » tire également son épingle du jeu.
Sur un même modus operandi, d'autres pistes peinent cependant à nous aspirer dans leur tourmente. Ainsi, jouant sur les effets de contrastes atmosphériques et vocaux pour tenter de l'emporter, mais nous menant bien souvent sur des chemins de traverse, les tortueux «
Infernal Flames » et « In a Dreary Coffin » se feront moins aptes à nous retenir malgré nous. Difficile également de suivre le cheminement d'harmoniques comme le sillon mélodique imposés par le mid/up tempo « Philosopher's
Stone ». On passera donc son chemin, une fois encore.
Au final, le combo nous immerge au cœur d'une œuvre à l'ingénierie du son plutôt soignée, où se mêlent impulsivité, évanescence, noirceur et sensibilité. D'aucuns auraient peut-être souhaité des exercices de style plus variés qu'ils n'apparaissent, par l'octroi de l'une ou l'autre ballade et/ou d'une fresque, par exemple. Se faisant un poil plus sombre, voire insaisissable, que son prédécesseur, ce nouvel arrivage pourra interpeller l'aficionado du genre, au risque de décontenancer un tympan de la première heure. Si quelques bémols émaillent l'offrande, comme dit, cette dernière compense cette carence par des arrangements de bonne facture et quelques prises de risques. Bref, une proposition à la fois tourmentée et complexe, un brin déstabilisante...
Je trouve cette note vraiment trop à la baisse. Le fait que l'album soit tortueux est ce qui fait qu'il est passionnant et que la réécoute est intéressante.
Un point de moins seulement par rapport à un poignant 'Behind the Veil', l'écart me semble relativement faible entre les deux opus. Lui ayant attribué une note assez satisfaisante, cela signifie que je trouve tout de même à ce disque des qualités (interprétation, technicité instrumentale, production, arrangements). L'univers plus tortueux dans lequel le groupe nous immerge cette fois m'apparaît simplement moins en phase avec ses aspirations premières. Ce faisant, ce full length m'embarque, de fait, plus difficilement dans la tourmente, Mais je comprends parfaitement que l'on ne partage pas forcément mon point de vue. Une démarche que je respecte. Merci pour le comm.
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