Le moins que l’on puisse dire, c’est que les Belges de
Saille ont pour le moment fait un sans faute. Du très remarqué «
Irreversible Decay » en 2011 au superbe «
Ritu » en 2013, ils empruntent un chemin qui leur correspond et qui les transporte directement parmi les groupes de black sympho/épique les plus prometteurs du moment, là où certains finissent par devenir de véritables caricatures.
Saille n’aura en tout cas pas chômé depuis un an et demi, car il a enchaîné les concerts et les festivals (AMF, Vlamrock ou encore le
Black Winter Fest) alors que cette entité sombre et mystérieuse n’avait pas été conçue pour le live ! Les musiciens montrent une capacité d’adaptation débordante et le montrent de nouveau avec «
Eldritch » composé l’été dernier et mixé par Klas Blomgren.
Avec cet opus,
Saille s’intéresse moins aux différentes formes de rites funéraires («
Ritu ») mais s’attaque une fois de plus à la littérature de l’horreur et à Lovecraft. Il faut dire que leur art noir, fouillé et déroutant s’y prête bien, leur black symphonique étant particulièrement adapté, ni trop propret, ni trop grandiloquent, en d’autres termes, bien calibré. «
Emerald » ne démarre pas sur les chapeaux de roue comme l’avait été «
Blood Libel » mais met quand même l’auditeur dans le bain avec son rythme lent et ses riffs malsains, qui ne présagent qu’une déflagration de toute beauté. On n’est pas déçus puisque les guitares et les blasts prennent de l’ampleur, accompagnés des cris écorchés de Dennie. L’ensemble du titre reste plutôt classique, entre agressivité black et break inquiétant au piano, presque fantomatique, quelque part entre
Carach Angren et
Serpenthia. Il faudra attendre la deuxième moitié du morceau pour découvrir ce qui fait la force du groupe, à savoir une mélodie qui fait mouche, des claviers accompagnant à la perfection le tranchant des guitares, et un chant clair envoûtant.
Avec «
Ritu »,
Saille arrivait à diversifier les ambiances grâce à un concept qui pouvait nous embarquer aux différents coins de la planète. Sur « Elritch », il reste sur la même base et peine à varier les plaisirs. En cela, les titres restent dans le même esprit, mais les musiciens arrivent malgré tout à trouver une parade en intégrant un côté progressif bien venu. Les chansons sont plus longues, les alternances entre agressivité et breaks plus courants, ainsi que les changements de structures, que ce soit sur « The Great
God of Pan » ou «
Aklo ».
Cependant, il ne faut pas penser que tout se ressemble, puisque chaque piste arrive à se démarquer sans souci grâce à un moment fort, un instrument ou une influence. « Walpurgis » sent le
Dimmu Borgir à plein nez grâce à ses claviers, ses mélodies particulières et ses chants clairs et black, «
Cold War »joue sur le côté mystérieux et inquiétant dès son introduction et « Eater of Worlds », destructeur et puissant, montre un côté impérial et intègre des cuivres qui rappelleraient presque
Sear Bliss. Sans oublier le fait que l’ombre d’
Emperor plane à chaque seconde. A noter aussi l’intégration plus en masse de monologues mettant en avant le côté torturé des personnages ainsi que leur solitude, notamment sur le chouette « Carcosa », où le piano et le violoncelle se lamentent auprès d’un feu.
Bien que légèrement en dessous de «
Ritu », «
Eldritch » tient ses promesses. Sombre, puissant, efficace, épique et mélodique, il a de quoi tenir en haleine, même si les éléments symphoniques sont parfois happés par les guitares et la batterie et même si certaines micro linéarités pointent le bout de leur nez.
Saille met, de toutes manières, la barre très haut et montre encore une fois qu’en plus d’enchaîner les réussites, il se place parmi les meilleurs groupes actuels de black symphonique. L’art noir est toujours vivant, c’est certain.
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