Si vous avez l’impression que la faucheuse vous talonne avec insistance, ce n’est pas seulement à cause de vos derniers excès culinaires généreusement arrosés de cette boisson gazeuse et alcoolisée à base de houblon indispensable pour faire passer le tout. Ce tiraillement dans votre poitrine ne lui a pas échappé ni le fait que la douleur irradie désormais dans votre bras gauche. Elle vous aurait bien tendu sa main décharnée si elle n’avait pas remarqué le dernier
Night Demon sur la table. Ce qu’elle veut, désormais, notre pauvre vieille, c’est écouter le dernier skeud des américains louant la gloire heavy
Metal des 80’s et de toute l’imagerie qui en découle d’ailleurs, dont notre Faucheuse demeure la figure de proue.
Les ventes de perfectos, de pointes, de clous, cartouchières et autres munitions antitanks ne se sont jamais aussi bien portées que depuis cette dernière décennie, qui a amené un revival de la NWOBHM, avec bons nombres de groupes talentueux… et qui arrivent à pic si vous avez épuisé tout le stock des rééditions. Il y a deux ans, le combo américain avait frappé fort avec son premier album, si intéressant qualitativement parlant qu’il ne tarda pas à trouver un public qui ne se limitait pas seulement aux farouches défenseurs de la scène des 80’s.
Night Demon fait donc plus figure de valeur sûre plutôt que d’
Outsider, capable de tailler la pige aux formations qu’il a accompagnées en tournée. Et la course à la première marche du podium est rude, entre un certain
Black Trip Aux Dents Longues, le sympathique
Audrey Horne et bien d’autres. L’efficacité musicale est de rigueur pour un heavy metal qui se doit d’être aussi archi-traditionnel qu’archi inspiré, mais c’est aussi la guerre de l’authenticité qui doit être remportée …
Et voici les armes arborées par ce «
Darkness Remains » : une sublime pochette qui n’est pas sans faire rappeler l’Artwork d’un
Grave Digger, d’un Maiden, et qui n’a que pour objectif de vous faire succomber d’avance au contenu. La production est moderne bien qu’ayant indubitablement le cul tourné vers les 80’s, et pour le reste, le cerveau fécond et le talent de nos trois musiciens suffisent amplement pour enfanter le digne successeur de «
Curse of the Damned ».
La sacro sainte introduction morbide ne vous sera pas épargnée, emphatique, froide, monotone et pesante comme un voyage vers le plus profond des abysses. Elle n’est cependant qu’un passage vers un passé que vous avez cru bel et bien révolu. Vos oreilles sont de nouveau habitées d’une inextinguible envie de heavy metal et «
Welcome to the Night » va permettre d’étancher une partie de cette soif, ce titre étant lui même tout un symbole. Une ouverture qui réchauffera très vite l’atmosphère par un heavy speed furax, couillu, énergique comme celui d’entant, mais estampillé
Night Demon, ne laissant présager le meilleur quant au reste de l’album.
«
Darkness Remains » est encore plus virulent que le premier essai grâce à une qualité sonore qui s’est grandement améliorée, cristalline sans oublier ce côté vintage. De même, les chœurs sont désormais présents, harmonisés et amenés de manière beaucoup plus naturelle, comme sur le joyau « Hallow
Ground », seconde perle alternant Mid tempo portant bien haut la bannière de la vitesse et de la puissance et qui vous rappellera probablement vos premiers émois musicaux.
Oscillant entre NWOBHM et courant américain,
Night Demon n’a pas oublié d’intégrer les bribes de punk qui jalonnaient ici et là les premiers tumultes de groupes de la Bay
Area… Il n’y en a que pour le riff et rien pour la frime, la bataille de l’authenticité étant sur le point d’être remportée. Comment un «
Life on the Run » ou un «
Dawn Rider » ne pourraient-ils rien vous évoquer, surtout si vous êtes un inconditionnel ayant été bercé par les albums
Tygers Of Pan Tang & Co ?
Le spectre de Maiden plane lui aussi énormément sur cet essai, outre l’original « Maiden
Hell », dont le songwritting ne vous échappera pas, les intros mettant l’accent sur les twin guitars amplement inspirées par les londoniens, il n’y a qu’a jeter une oreille sur l’instrumental « The Fly Of The Manticore » pour s’en rendre compte.
Seul «
Stranger in the Room » a un peu mal à décoller, possédant le charme des morceaux mid tempo des 80’s, une première partie qui peut même paraître désuète aux yeux de certains, mais qui sera cependant rachetée par un second mouvement plus rapide et inspiré, peut être un clin d’œil à un
Heaven and
Hell. Ce titre possède les atouts de l’original : une fougue et de légers arrangements aux synthés permettant de glacer cette atmosphère que les titres précédents ont embrasée.
Ce recueil s’achèvera sur un «
Darkness Remains » sombre, qui sonne le glas d’un voyage dont l’issu est le retour à la réalité, une voix qui se veut plus enivrante mais si lointaine, sonnant comme un adieu ou peut-être comme une invitation, mais pour quelle destination ?
Night Demon ne semble pas composer pour vivre mais vivre pour composer. Pour Jarvis Leatherby qui abat un formidable travail sur cet opus et pour sa bande, le heavy metal est bien plus qu’un style musical, mais une philosophie, une partie d’eux même. Il ne fait aucun doute que le passé, le présent, mais surtout l’avenir ne peuvent être envisagés sans cette noble cause, gage de persévération pour ce groupe dont en ré entendra probablement parler très vite.
Ce «
Darkness Remains » n’invente rien, mais il me rappelle ce fameux premier album que je tenais fébrilement entre les mains, il y a déjà quelques décennies, et qui aura à jamais changé ma vie.
Si vous rencontrez ce problème de douleurs dans la poitrine, allez consulter avant d’entamer ce "
Darkness Remains" car l’exaltation que vous allez connaitre risque d’être celle de trop pour votre petit cœur…
A savoir que ce disque a été classé numéro 1 du mois chez Deaf Forever, le célèbre mag old school spécialisé en heavy/thrash/speed de tradition.
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