Där Skogen Sjunger Under Evighetens Granar

Liste des groupes Metal Progressif Vildhjarta Där Skogen Sjunger Under Evighetens Granar
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17/20
Nom du groupe Vildhjarta
Nom de l'album Där Skogen Sjunger Under Evighetens Granar
Type Album
Date de parution 30 Mai 2025
Labels Century Media
Style MusicalMetal Progressif
Membres possèdant cet album4

Tracklist

1.
 Byta ut Alla Stjärnor på Himlen mot Plustecken
 03:45
2.
 Två Vackra Svanar
 05:13
3.
 Sargasso
 06:45
4.
 Ylva
 04:41
5.
 Där Mossan Möter Havet
 03:48
6.
 Röda Läppar, Söta Äpplen
 03:48
7.
 Kristallfågel
 04:03
8.
 ? Regnet, the ?
 03:30
9.
 Hösten som Togs Ifrån Mig
 03:49
10.
 Viktlös & Evig
 06:39
11.
 Stjärnblödning
 03:28
12.
 Den Spanska Känslan
 07:26

Durée totale : 56:55

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Vildhjarta


Chronique @ Groaw

02 Août 2025

« Les ténèbres s’entrelacent, les éclats de lumière sont frêles et composent avec une beauté fascinante »

Il existe des mots qui ne demandent pas à être compris mais ressentis. Le thall en fait partie : brut, opaque et insaisissable, il incarne à lui seul l’aura étrange de Vildhjarta, entité suédoise née en 2005, là où les forêts se confondent avec les rêves. Le groupe développe un projet rare, méticuleux et profondément radical qui a su imposer un langage propre, entre djent fracturé, ambiances cinématographiques et dissonances telluriques. Avec une discographie volontairement éparse qui comprend Måsstaden (2011) et Måsstaden under vatten (2021), l’ex-quintet n’a jamais couru après la productivité. Chaque sortie semble au contraire polie dans l’ombre comme un cristal noir. Et pourtant, malgré les longues périodes de silence, le groupe n’a jamais cessé d’influencer la scène, notamment via ses liens étroits avec Humanity’s Last Breath, l’autre projet abyssal du batteur et producteur Buster Odeholm ainsi que du guitariste Calle Thomér.

Après quatre années de perfectionnement dans l’ombre, nos Suédois dévoilent leur troisième album + Där Skogen Sjunger Under Evighetens Granar + publié sous la maison de disques Century Media Records. L’opus marque la fin de l’ère originale puisque le dernier fondateur de la formation Daniel Bergström a annoncé son départ en début d’année. Toutefois, ses contributions compositionnelles sur plusieurs titres témoignent d’un lien maintenu jusqu’à la toute fin de son parcours avec le collectif. Ainsi, le trio actuel composé de Calle Thomér, Vilhelm Bladin et Buster Odeholm reprend pleinement l’identité du groupe et allie une production toujours aussi soignée, une impressionnante complexité rythmique mais surtout une profondeur narrative captivante.

Dans son écriture et ses atmosphères, les musiciens ont presque tout repensé grâce à des riffs encore plus labyrinthiques, couplés à une densité rythmique et une esthétique sonore radicales. Ce travail d’orfèvre associe avec caractère la lourdeur du djent et la clarté presque ambiant sur un canevas désormais plus mélodique et poignant qu’auparavant. Ce tableau énigmatique, en témoigne d’ailleurs une pochette très abstraite qui rompt totalement avec l’imagerie linéaire et sombre de Måsstaden under vatten, intègre de multiples textures électroniques, des synthétiseurs et des passages presque méditatifs qui permettent de ponctuer une violence presque sauvage. La progression du récit est toujours présente mais elle est plus subtile, moins centrée sur un concept strict comme le précédent ouvrage.

Le morceau + hösten som togs ifrån mig +, littéralement “l’automne qui m’a été arraché”, opère magnifiquement cette évolution. Dès ses premières secondes, il plonge l’auditeur dans une atmosphère hostile, faite de riffs dissonants, de tensions rythmiques et de guitares qui s’étirent comme des branches mortes dans le vent. Tout y semble rêche, inhospitalier presque claustrophobe.
Mais au fil des minutes, le morceau se fissure et s’ouvre sur une dernière partie d’une délicatesse mélancolique saisissante, portée par une ligne mélodique, des notes de piano douces-amères ainsi que des accords suspendus dans le vide. Le basculement semble presque irréel et la violence cède la place à une tristesse nue, bouleversante, comme si, sous les décombres sonores, quelque chose se mettait soudain à saigner. Une faille s’ouvre, et sans prévenir, le morceau nous prend aux tripes, nous laisse là, suspendu entre beauté fragile et douleur sourde.

À l’inverse, + sargasso + incarne une face plus brute et massive de l’album. Ici, le combo renoue avec la violence tellurique de ses débuts et se rapproche nettement de l’univers de Humanity’s Last Breath. Les riffs sont poisseux, écrasants, et la production ultra-dense porte une lourdeur quasi industrielle. Le chant se montre particulièrement viscéral et flirte souvent avec les codes du deathcore, entre growls abyssaux et cris granuleux. Tout semble peser plus lourd, plus bas, plus menaçant comme si la terre elle-même vibrait sous la tension.
Et pourtant, des brèches s’ouvrent. À travers des sections plus aérées, les guitares s’aiguisent dans les aigus, les synthétiseurs s'invitent en arrière-plan et la voix, soudain, s’éclaircit. Une mélodicité inattendue émerge alors, fragile sous ses couches de violence. C’est dans ces instants que nos artistes laissent transparaître une vulnérabilité rare, sans jamais sacrifier l’intensité comme si dans ce maelström sonore une main tremblante cherchait encore la lumière.

Le point d’orgue de l’album reste sans doute le final, + Den Spanska Känslan + qui déploie une profondeur émotionnelle rare et mêle avec une maîtrise impressionnante mélodies sinueuses, textures aériennes ainsi qu’une rythmique complexe qui ne perd jamais en puissance ni en nuance. Chaque passage semble respirer, s’étirer, et emporte l’auditeur dans un voyage intense où mélancolie et espoir se croisent pour conclure le voyage sonore sur une note aussi poignante que grandiose. La seconde moitié de la composition, marquée par une mélodicité entre apaisement et désenchantement et une ambiance presque introspective, offre une forme de résolution émotionnelle rare dans l’univers du groupe, une danse à la fois majestueuse et fragile, soulignée par des touches qui évoquent un flamenco spectral.

Cependant, quelques baisses de régimes surviendront ici et là, à l’instar d’un + röda läppar, söta äpplen + dont la structure plus directe et le groove certes accrocheur mais classique relèvent une progression moins marquée, où les variations dynamiques et atmosphériques sont moins notables que les autres morceaux de l’album. Également moins dense sur le plan narratif, ce titre adopte une forme plus linéaire qui ne parvient pas à reproduire la richesse formelle ni l’intensité émotionnelle caractéristiques du reste de l’album.
+ ? regnet, the ? + peine tout autant à convaincre mais pour des raisons radicalement différentes. Si sa courte durée pourrait laisser présager un moment de respiration ou de synthèse, le morceau se montre étonnamment chargé en idées, trop peut-être. On y perçoit plusieurs pistes musicales, des motifs rythmiques fragmentés, des textures sombres, des élans harmoniques à peine amorcés qui semblent s'accumuler sans parvenir à construire une véritable cohérence d’ensemble. La densité de sa proposition contraste avec le peu d’espace qui lui est accordé pour se développer et engendre une forme de frustration. Tout semble esquissé sans jamais aboutir, comme si l’on assistait à un fragment d’œuvre plus vaste, amputé de ses ramifications. Ce sentiment d’inachèvement brouille la lecture du morceau, qui reste difficile à saisir, à la fois trop elliptique et trop dense pour s’imposer pleinement dans la narration globale de la toile.

Avec + Där Skogen Sjunger Under Evighetens Granar +, Vildhjarta ne se contente pas de prolonger une formule, il réinvente sa propre grammaire. Plus riche, plus nuancé, mais aussi plus insaisissable que jamais, ce troisième opus dépasse la simple démonstration technique pour convoquer une sensibilité nouvelle entre vertige existentiel et contemplation suspendue. Là où Måsstaden s’imposait par ses cassures abruptes et sa noirceur linéaire et Måsstaden under vatten par sa densité suffocante, cette nouvelle itération cherche autre chose : une voix intérieure, un équilibre fragile entre force brute et transparence émotionnelle. Porté une nouvelle fois par un travail de production sidérant, une précision rythmique chirurgicale et une exploration toujours plus fine de textures sonores, l’opus offre une traversée dense mais bouleversante, pleine de contrastes assumés et de silences habités. Même ses quelques errements participent à cette impression de chaos maîtrisé, de monde en décomposition lente où percent parfois des éclats de beauté pure.

+ La musique dans son essence la plus brute reste un mystère mais dans les mains des Suédois, elle devient ici un langage à part entière, un langage de l’instinct et de la tension, de la perte et de la lumière qui murmure à ceux qui savent écouter. +

3 Commentaires

9 J'aime

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Ensiferum93 - 04 Août 2025:

Je suis souvent scotché par ta plume mais alors là, heureusement que j'étais bien assis car elle m'aurait laissé le cul à terre. Ne connaissant du groupe que son nom, je vais me précipiter pour écouter cette oeuvre qui a mérité une telle note de ta part. Merci beaucoup pour le plaisir éprouvé à ta lecture, et j'espère à l'écoute de l'album :) 

JambonBeurreCornichons - 25 Septembre 2025:

J'ai eté happé par ton avis sur cet album. Je ne connais que de nom et je me suis precipité pour une écoute qui me semble être à la hauteur de ce que tu decris.

Bravo et merci, pour une chronique vraiment très inspirée, qui me permet de découvrir un groupe et un album à priori bien au delà du commun.

ça fait vraiment plaisir.

Groaw - 26 Septembre 2025:

@Ensiferum : désolé, je te réponds assez tardivement. Merci à toi pour ta fidélité et tes compliments qui me vont toujours droit au coeur. J'espère que ton/tes écoute(s) ont été à la hauteur de mon modeste écrit.

@JBC : si j'ai pu attisé ta curiosité et t'avoir fait découvert un groupe "à part", c'est donc une victoire totale de ma part car c'est (et ce sera toujours) l'objectif de mes chroniques, qu'elles soient dithyrambiques ou au contraire emplies de déception. Merci également pour tes compliments qui me font grandement plaisir.

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