Près de trois années envolées déjà depuis leur second et frissonnant EP «
Above Chaos »... Une éternité pour la fanbase du quintet brésilien ! Le temps de peaufiner ses gammes comme ses arpèges et d'affiner encore sa production d'ensemble, voici l'expérimenté combo revenu plus boosté que jamais dans la bataille. Ce dont témoignent précisément les onze pistes de leur deuxième et présent effort de longue durée, «
Children of the Abyss » : enregistrées et mixées par le vocaliste (
Karma,
Noturnall, ex-
Arena, feu-
Shaman...) et producteur (
Angra, Ignited,
Silent Cry...) Thiago Bianchi au Estúdio Fusão, les 48 minutes de la galette se voient à leur tour dépoussiérées de toute sonorité résiduelle tout en faisant montre d'une péréquation de l'espace sonore entre lignes de chant et instrumentation. Aussi, 15 ans suite à sa fondation, à
Santa Maria, le collectif disposerait-il de l'arsenal artistique et technique requis pour se hisser dès lors parmi les valeurs confirmées du si concurrentiel espace metal symphonique gothique à chant mixte en voix de contraste ?
Dans ce dessein nous embarque l'équipe du précédent effort au grand complet, soit : Luana Palma (Churril), mezzo-soprano dont le grain de voix peut rappeler celui de Judith Rijnveld (
Kingfisher Sky), avec un soupçon de Marjan Welman (
Autumn) dans les médiums, et dont les growls glaçants renvoient, eux, à Adrienne Cowan (
Seven Spires) ; Fernando Back, à la basse et aux growls ; Bruno Portela (
Human Plague), aux guitares ; Guilherme Pereira, aux claviers ; Pablo de Castro (Apoteom), à la batterie. Avec le concours de Pablo Greg et d' Evandro Dörner aux orchestrations, le groupe nous replonge dans un environnement metal symphonique aux relents dark/death gothique, toujours greffé sur le classique schéma oratoire de la belle et la bête, nous replaçant ainsi dans la veine coalisée de
Tristania,
Fortaleza,
Draconian, Elessär et
Autumn. Se dessine alors un set de compositions à la technicité instrumentale et vocale aguerrie et aux mélodies finement esquissées, nous éloignant encore un peu plus des tâtonnants débuts du combo brésilien. Mais montons plutôt à bord du navire pour une traversée dans une mer volontiers houleuse...
Une fois n'est pas coutume chez nos acolytes, le bal s'ouvre sur une laconique et cinématique entame instrumentale ; ce faisant, l'a-rythmique « Womb of
Night » dissémine des arpèges au piano et au clavecin d'une infinie délicatesse auxquels vient s'adjoindre une soufflante muraille de choeurs samplés. Mais l'arbre, aussi majestueux soit-il, ne saurait cacher la forêt bien longtemps...
A la lumière de ses passages les plus enfiévrés, la troupe trouve aisément les clés pour aspirer le tympan. Ce qu'atteste, tout d'abord, le chevaleresque et ''fortalezien'' up tempo «
Quicksand », tant au regard de ses hispanisantes séquences d'accords et des poignantes impulsions de la sirène que de ses fulgurantes accélérations et de son fringant solo de guitare. Dans cette dynamique, on ne saurait davantage éluder «
War Curse », up tempo death gothique aux riffs roulants adossés à une sanguine rythmique, au confluent de
Draconian et de
Tristania ; inoculé de growls ombrageux se mouvant dans une atmosphère résolument crépusculaire que relaie un corpulent et enivrant solo de guitare, l'obscur effort ne se quittera qu'à regret. Enfin, n'ayant de cesse de nous asséner de véloces et virulents coups de boutoir, le ténébreux « Fortuna », quant à lui, poussera assurément le chaland à un headbang bien senti et quasi ininterrompu.
Lorsque la cadence du convoi instrumental se fait plus mesurée, nos acolytes parviennent là encore à nous retenir, un peu malgré nous. Ce que révèle, tout d'abord, « Goddess of Disharmony », ''tristanien'' mid/up tempo aux riffs acérés. Recelant de forts contrastes vocaux et atmosphériques – passages gorgonesques et plages luminescentes alternant à l'envi –, et offrant un grisant et substantiel pont techniciste sous-tendu par un fin legato à la lead guitare pour finir sa course, l'intrigant méfait ne relâchera pas sa proie d'un pouce. Dans cette mouvance, s'inscrivent également «
Witch's Laugh » comme «
Gates of Oblivion », théâtralisants mid/up tempi aux riffs crochetés ; alternant judicieusement growls caverneux et chant lyrique, et dévoilant d'insoupçonnées montées en régime de leur corps orchestral, ces angoissants manifestes se font tous deux des plus ensorcelants. On pourra encore se voir happé tant par les sémillantes séries d'accords que par le final en crescendo que nous injecte le ''fortalezien'' mid tempo progressif « Sketch Art ». Mais le magicien aurait encore quelques tours dans sa manche...
Quand ils nous mènent en de plus apaisantes contrées, nos compères trouvent également matière à nous assigner à résidence. Ce qu'illustre, en premier lieu, «
Dead Seeds », power ballade aux accents dark gothique, à mi-chemin entre
Fortaleza et
Tristania. Glissant le long d'une radieuse rivière mélodique qu'empruntent les pénétrantes oscillations de la maîtresse de cérémonie et instillé d'un seyant solo de guitare, l'instant privilégié comblera à n'en pas douter les attentes de l'aficionado de moments tamisés. Par ailleurs, en dépit de la brièveté de son message, l'a-rythmique «
Prophecy » dévoile de pénétrantes envolées lyriques dispensées par la belle, dans la lignée d' Alejandra Barro (ex-Elessär). Guère plus rythmé et à peine plus opulent, mais instillé d'hispanisantes sonorités empreintes de sensualité et encensé par les caressantes ondulations de la diva, le low tempo « Mermaid Melody » se fait des plus enveloppants.
Marchant sur les traces de ses prédécesseurs, ce nouvel élan se fait à la fois volontiers pulsionnel, souvent empreint de mystère, un tantinet anxiogène, un brin romanesque, se savourant à chaque fois davantage au fil des écoutes. A la lumière d'un propos pourvu d'une qualité de production difficile à prendre en défaut, d'une technicité instrumentale et vocale ayant gagné en maturité, de mélodies plus finement esquissées aujourd'hui qu'hier – parfois doublées d'une enivrante touche latina –, le collectif brésilien déploie désormais une panoplie argumentative susceptible de le porter parmi les valeurs confirmées de l'espace metal gothico-symphonique à chant mixte en voix de contraste. Et ce, en dépit d'exercices de style tendant à une certaine stéréotypie et de prises de risques encore timides. A l'aune d'un mouvement ne manquant ni d'allant ni de panache, c'est en pente ascendante que s'effectue le vol de l'escadron sud-américain...
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