Liste des groupes Death Mélodique Carrion Vael Cannibals Anonymous

Carrion Vael est une formation américaine qui fête déjà sa quinzième année d’existence. Après un premier opus publié presque dix ans après sa création et qui a malheureusement été condamné à l’oubli, le quintet se séparera peu de temps après avant finalement de se reformer avec une line-up quelque peu remaniée. Suite à ce renouvellement, il s'ensuit deux œuvres God Killer et Abhorrent Obsessions parues respectivement en 2020 et 2022 dont le dernier en date marque une étape de franchie avec la signature sous la maison de disques Unique Leader Records. Il faut dire que le label a eu l’œil avec le groupe qui doit son authenticité à son lyrisme qui tire ses influences des célèbres tueurs en série et des meurtres de masse de notre histoire.

Ces horreurs, nos Américains les transcrivent par une force brutale qui est fortement influencée par le death technique et mélodique mais aussi par des inspirations plus traditionnelles, vieille école et, dans une moindre mesure, par des aspects slam. Dans le cadre de son dernier ouvrage nommé Cannibals Anonymous toujours chez Unique Leader Records, Carrion Vael privilégie cette fois-ci une musique audacieuse et contemporaine avec un sérieux point d’honneur sur son tempérament mélancolique et mélodieux. On remarque de même une impulsion tournée vers le progressif, des structures moins conventionnelles, en témoigne notamment une durée des morceaux plus conséquente que son prédécesseur mais aussi d’autres curiosités amenées avec plus ou moins de réussite.

Si nous en avions déjà quelques prémices sur Abhorrent Obsessions, ce quatrième album du collectif américain met largement en avant les prestations au chant clair, au grand dam sans doute des puristes. Cette résolution est à double tranchant : si elle permet parfois d’accentuer l’apparence dramatique des compositions, elle peut aussi se montrer en dissonance par rapport à l’instrumentalisation.
Sur l’intro du premier morceau In Words Of Grimm, cette voix tiraillée s’apprête merveilleusement bien avec l’ambiance terne de l’instrumentalisation et de ces quelques accords assez moroses à la guitare acoustique. En revanche, pour ce qui est du refrain de Discount Meats, cette particularité est bien moins compréhensible avec certes une ambiance sinistre, aussi bien dans l’orchestration que dans le somptueux riffing, dont on décèle d’ailleurs une forte influence de The Black Dahlia Murder. Pour autant, dans une composition déjà bien chargée, on ne se sent pas spécialement pris dans ce tourbillon de désolation et on est même gêné par cette palette décousue.

Ce que le quintet a en partie abandonné sur le plan de la technicité est transformé ici en un véritable effort mélodique et orchestral. Pins And Needles est la composition qui dispose du meilleur accomplissement en termes d’arrangements avec une intro qui rappelle étrangement celle de In Words Of Grimm avec cette proposition vocale attristée soutenue par ces belles harmonies programmées. L’habileté ne se fait pas prier bien longtemps avec une batterie frénétique et un riffing assez complexe. Mais c’est surtout au milieu du morceau que le point d’orgue est atteint, là où le savoir-faire ne fait qu’un avec la symphonie, un ensemble conduit par un chant growlé agressif.
Cette prédisposition d’un death mélodique et technique se retrouve aussi sur le titre final Everything/Nothing, dans une certaine suite logique de son prédécesseur. La comparaison avec les groupes modernes tels qu’Archspire ou The Faceless peut d’ailleurs refaire surface, sur une musique certes hâtive mais aussi par des couplets chantés rapidement. A l’image de ses précédentes toiles, la production de ce petit dernier est irréprochable et ne joue aucunement sur la surenchère comme le proposent souvent ses semblables. De temps à autre, nos Américains glisseront même quelques solos bien sentis comme sur le final d’un Savage Messiah ou d’un Love Zombie.

Moins frappant que son grand-frère, Cannibals Anonymous demeure tout de même un disque de bonne facture qui a le mérite de tenter de nouvelles approches avec plus ou moins de réussite. Les avantages majeures de Carrion Vael s’expriment par un lyrisme toujours bien huilé ainsi que par une ambition tournée sur la souffrance. A l’inverse, les principales irrégularités de ce quatrième méfait résident d’un chant clair qui laisse parfois dubitatif et d’une maîtrise qui se fait quelquefois très discrète. Sur ces deux abords, il s’agit surtout des goûts de chacun, de la tolérance à une palette vocale plus accessible et de l’acceptation d’une musique moins directe, plus affinée. Ainsi, selon vos attentes, vous pourriez largement chérir cette facette « 2.0 » de Carrion Vael comme vous pourriez la réprimander. A vous maintenant de choisir votre camp.