2011. La popularité d'un artiste ne se mesure plus en ventes de disques mais en nombre d'abonnés Twitter, site internet grâce à lequel connaître ses états d'âme au quotidien est devenu d'une banalité incroyable. On peut maintenant découvrir un artiste et en donner son appréciation en moins de temps qu'il en faut pour se rendre dans un magasin de disques. Si l'internet est une formidable révolution pour plusieurs amateurs de musique, il s'en trouvera plusieurs, nostalgiques, pour décrier qu'une certaine magie s'y est peut-être perdue à jamais. Pour ces derniers, voici un disque qui détonne complètement avec son époque. Difficile en effet de collecter des information sur ce groupe Britannique qui maintient volontairement une aura de mystère, quitte à demeurer relativement inconnu. Ainsi, la seule photo officielle du groupe connue à ce jour montre de dos la silhouette d'Uncle
Acid, vêtu d'un veston et chapeau rappelant Ritchie Blackmore dans une pose rendant hommage au poster de l'Exorciste.
Culte. C'est le mot juste pour décrire la démarche du trio complété par les énigmatiques
Kat à la basse et
Red à la batterie. La superbe pochette illustre parfaitement l'ambiance contenue sur le disque. Enregistré sur de vieux systèmes analogiques, le groupe utilise des amplis à lampes défoncés et des instruments tout droits sortis d'une vente de garage de
Black Sabbath. L'illusion est parfaite et je mets au défi quiconque de deviner sans indice l'année d'enregistrement de cet album. Bon d'accord, le concept n'a rien de révolutionnaire en soi direz-vous, plein d'autres l'ont fait avant; mais attention, cette fois-ci c'est génial!
L'album racontant le rituel occulte du sacrifice d'une vierge s'ouvre sur I'll Cut You
Down et sa superbe introduction. Accord dramatique suivi d'un riff d'ouverture magnifiquement accompagné d'une grosse caisse donnent le ton. Ensuite vient ce décollage groovy et la voix de Monsieur
Acid, assez haute, complètement déroutante. Et voilà le travail, le public cible est déjà conquis par cette attention du détail et cette beauté dans les imperfections. Rien de trop rapide, sans jamais tomber dans la ballade, la musique de
Blood Lust ne perd jamais de vue son concept, cette ambiance remémorant les images de vieux films d'horreurs démoniaques de la fin des années 60 et l'intérieur de la pochette d'un célèbre album de Coven. La section rythmique est bien pesante et crade, rappelant immanquablement les plus grands: Butler, Ward, Bonham; la guitare, Hendrix et
Iommi. On se laisse troubler par la dérangeante
Death's Door, on hoche la tête inconsciemment sur les plus rapides Over and Over
Again et I'm Here to
Kill You avant de se laisser envoûter par la magnifique
Ritual Knife, promettant à la pauvre femme qu'elle sera mieux traitée cette fois! L'album se conclut sur une étrange piste bonus, très lente:
Down to the
Fire. Ce titre ne figurant pas sur la tracklist des premières éditions s'y trouvait quand même. Pourquoi la qualifier de bonus alors, je ne pourrais dire.
Impossible aussi de passer sous silence les vidéoclips à l'esthétique impeccable réussissant l'exploit de mettre en image leur ambiance sonore d'une époque révolue où l'attention maladive du trio aux détails s'y traduit en images. Décors, maquillages, costumes, éclairages, effets psychédéliques, tout y est. Notons par contre la qualité sonore décevante des vidéos par rapport à l'album original.
Outre ces vidéos, le groupe ne fait à peu près aucune promotion et semble compter sur le bouche à oreille pour financer son propre label et payer un pressing vinyle ridiculement limité qui atteint déjà des sommes astronomiques sur les sites d'enchères. Sans compter que Vol.1, leur premier album est pratiquement introuvable, et que je n'ai jamais entendu le moindre écho d'une quelconque prestation live, c'est à se demander si ils tiennent à faire un minimum d'argent. Semblerait qu'il existe encore des musiciens pour qui l'art et l'intégrité de son concept sont plus importants que les billets verts!
Un album que j'apprécie un peu plus à chaque écoute.
Cucrapok
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