Enfin. dix ans après sa genèse. Des années après les antiques .1 et .2, une séparation, un retour, un nouvel EP, des savons, de la sauce barbecue et une nuée de concerts un peu partout en
Europe...
Bossk nous dévoile enfin son premier album. Cet opus, intitulé
Audio Noir, aurait très bien pu ne jamais voir le jour. Mais l'aura des deux premiers EP était trop importante, le noyau de fans trop tenace, les membres de
Bossk trop passionnés pour que l'aventure de cette formation originaire du Kent en reste là. L'attente aura été longue, mais il faut dire que le serpent de mer du post-metal ne fait jamais rien dans la précipitation. Aussi, ce disque est le fruit d'une maturation lente, d'une réflexion à long terme qui s'étale sur une décennie complète.
Mais ne vous y méprenez pas, le parcours de
Bossk n'a rien d'un long fleuve tranquille. L'absence de productions musicales ces dernières années a même amené plusieurs auditeurs à se demander si le groupe faisait encore de la musique ou s'il s'était spécialisé dans son merchandising si particulier. Qu'importe, les cinq musiciens sont restés fidèles à leurs convictions, attendant le bon moment pour sortir leur poupon. Une ténacité rare et louable, qui justifie presque à elle seule l'écoute de cet album.
Un album dont l'artwork, lumineux et intimiste, démontre la voie plus spatiale empruntée par
Bossk dans cet opus, symbolisée par cette galaxie violacée en arrière plan. L'aspect végétal résonne de son côté comme un clin d'oeil au premier E.P. du groupe .1. La thématique est centrée sur le voyage spatial et introspectif d'un astronaute perdu dans l'espace, dérivant parmi les astres, parcourant les différentes galaxies de ce néant infini. On découvre, en effet, au sein de cet opus, un son plus spatial, sci-fi, qui colle parfaitement au style des cinq musiciens. Au cours de ce voyage mystique, on passe de ballades instrumentales apaisantes (The Reverie) à des déferlements de rage libérateurs (Heliopause).
L'atmosphère de cet
Audio Noir est assez unique en son genre. Le groupe expérimente pas mal au niveau sonore. Entre mélodies tantôt relaxantes, tantôt mélancoliques, riffs groovy, grunt bestial, gradations épiques... On ressent à travers ce conglomérat à la fois riche et confus une vraie recherche musicale et artistique. Un morceau comme "Relancer", par exemple, qui peut sembler assez déroutant de prime abord, évolue on ne sait comment vers une mélodie poignante, parfaitement maîtrisée. Un véritable bijou de composition témoignant du potentiel latent du quintet.
En écoutant
Audio Noir, on navigue entre le post-rock et le sludge, entre l'ataraxie et la frénésie. Le morceau mis en avant par le groupe avant la sortie de l'album, "
Kobe", est une merveille, ni plus ni moins. Une mélodie nébuleuse, douce et enivrante, qui s'étend de tout son long, jusqu'à s'élever vers une mélopée dansante. Puis, sans transition, le groupe décide de se déchaîner : la voix bestiale de Sam Marsh vient apporter un peu de fureur là-dedans, les riffs percutants et dynamiques s'enchaînent, le tout s'éteignant dans un épilogue chaotique. C'est la “patte”
Bossk tout simplement, un schéma qui rappelle d'anciennes compositions comme II ou Truth, mais avec un son un peu moins lourd, moins uniforme et contemplatif, plus énergique.
En certains points,
Bossk se rapproche de groupes comme
God Is An Astronaut ou
If These Trees Could Talk, mais en conservant cette part organique, cette basse prépondérante, cette fureur qui lui est propre. Le morceau suivant, "Atom Smasher", est un assortiment de riffs groovy et de pulsions jouissives. Difficile de ne pas secouer la caboche sur ce morceau homérique, qui constitue le reflet inversé de "
Kobe" au niveau structurel, avec son final mélodieux, empli de quiétude. C'est cette diversité dans l'album et parfois au sein même des morceaux, ainsi que son aspect “habité”, qui procurent à
Audio Noir toute sa fraîcheur. En ce sens, The Reverie II constitue un épilogue grandiose, mêlant les caractéristiques et spécificités de tous les titres précédents dans un baroud d'honneur épique et captivant. L'auditeur est transporté par ces ensembles de notes flottantes, ces changements rythmiques, ces riffs dynamiques et envoûtants.
Le groupe a expliqué dans ses interviews avoir voulu créer un album sans troncation, un ensemble fluide où les morceaux s'entremêlent, sans divisions entre la fin d'un titre et le début d'un autre. Aussi, l'impression de prendre part à un voyage mystique, avec ses périodes d'évasion spirituelle, d'impétuosité, de mélancolie, de démence, est bien présente. Tout n'est pas parfait pour autant, certains titres pourront paraître un peu trop communs (Heliopause), certains passages typés post-rock laisseront à certains une impression de déjà-vu, mais globalement, l'expérience est plus qu'intéressante. On le ressent à chaque minute, cet
Audio Noir transpire la passion.
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