Liste des groupes Sludge Atmosphérique Bossk .2

Un an après son premier essai, Bossk accouche d'un nouvel opus en Octobre 2007. Dans la lignée du précédent, celui-ci se nomme .2 et propose deux morceaux pour une durée totale d'environ 22 minutes. Si la sobriété semble toujours de mise, l'aspect textuel démontre néanmoins une évolution : les morceaux sont désormais pourvus de noms. Define et Truth, deux titres aussi simples qu'énigmatiques. En outre, la pochette de l'EP offre un contraste avec la précédente, la thématique végétale cédant sa place à une ambiance plus urbaine, industrielle. Comme pour le premier opus, le rendu est superbe. Les couleurs, les ombres, les reflets : tout dans cette photographie fait sens, chaque élément se révèle en adéquation avec la musique du groupe. Voilà pour l'avant-propos, entrons désormais dans l'atmosphère musicale si particulière du quintet originaire d'Ashford.

.2 est ce que l'on pourrait appeler une suite logique. Pas de changement fondamental, le groupe se plaît toujours à développer un postcore lancinant et immersif à forte tendance instrumentale. Mais ce disque n'est pas un clone de son prédécesseur, loin s'en faut. Au contraire .2 se révèle un véritable marqueur de l'évolution du groupe et de son expérience accumulée durant l'année de tournées intensives qui le sépare du premier opus.

Le premier morceau, Define, est un titre versatile, qui puise sa beauté dans les contrastes. Ce morceau s'éveille dans l'abîme, la noirceur, et évolue comme un canal qui retourne inexorablement vers son point de départ. L'entrée en matière s'avère sombre et brutale, entre saturations abruptes et riff stoner groovy, mais l'évolution se fait tantôt plus atmosphérique. Les guitares s'éteignent soudainement et laissent entrevoir une ligne de basse imperturbable sur laquelle va s'immiscer un trémolo hypnotisant : on entre dans la partie mystique de Bossk. Des envolées nébuleuses encadrées par une rythmique apaisante. L'apparition d'une guitare acoustique dans la suite du titre apporte une diversité appréciable à l'ensemble tout en amenant un effet de rupture avec la saturation omniprésente. On observe une gradation dans la beauté au fil du morceau, les notes s'allongent de plus en plus : on monte dans une sorte de rêverie psychédélique appuyée par une basse confuse, entre douceur et folie. Et comme toujours avec Bossk, le rêve, l'hypnotisme, est éphémère. Après s'être évadé dieu sait où, l'auditeur finit par redescendre à terre parallèlement au retour des guitares saturées.

Cette première pièce sonore démontre déjà une évolution par rapport au disque précédent. Le son de .2 est plus mécanique, plus lourd que son prédécesseur. La matière musicale que nous propose Bossk se révèle un brin plus compacte, peut-être moins intuitive, mais toujours aussi habitée. Le second morceau, monumental, en est une preuve indéniable. Truth est une pièce mélancolique, spirituelle, profonde, qui montre toute la maturité artistique acquise par le quintet.

Le titre débute par une gradation lente et mélodieuse, au cours de laquelle la batterie fonctionne comme un organe, un cœur qui bat, avec ses palpitations et ses retours au calme. D'une grande beauté, le morceau s'accentue progressivement jusqu'à l'extinction des guitares. La basse, quant à elle, poursuit son œuvre et se retrouve au premier plan. Une basse organique, mélancolique, qui s'unit à merveille à des parties de guitares douces et harmonieuses. Le groupe prouve ici toute l'étendue de son talent, les cinq musiciens nous transmettent un crescendo émotionnel très fort et très intense, d'une authenticité rare. Enfin, la tension sous-jacente finit par atteindre son paroxysme et éclater : les guitares se laissent alors aller à une déflagration, une expression de toute puissance, de courroux. Un chant bestial, teinté d'amertume, accompagne cette nuée de notes saturées, multipliant son intensité. Le morceau oscille dès lors entre la fureur et la plénitude avec, pour la première fois depuis les débuts du groupe, l'apparition d'une voix claire aérienne, située presque en arrière plan. Cette touche vocale apporte une réelle diversité à la musique de Bossk tout en gardant cet esprit de pureté et de limpidité propre au groupe. Enfin, le disque s'éteint sur une outro bruitiste, une sorte de grésillement décousu parsemé d'une voix sourde et lointaine que l'on pourrait assimiler à une prière apocalyptique.

A l'arrivée, il s'avère difficile de dire si cet EP est supérieur ou non à son prédécesseur. On reste grosso-modo dans les mêmes eaux, la voie empruntée par Bossk reste la même, mais l'évolution est bel et bien là. Il s'agit avant tout d'une progression technique, esthétique. On ressent à travers Define et Truth l'influence de groupes comme Pelican ou Cult of Luna. Les rouages de l'ardeur musicale que nous sert Bossk sont plus usités, mais la fluidité, elle, est toujours présente. La musique de Bossk a ceci de remarquable qu'elle ne feint jamais, le groupe possède une aura, une alchimie indéfinissable qui procure à ses compositions une saveur sui generis.



17/20


SH4RK