Presque trente ans - vingt-six pour être exact - se sont écoulés depuis le dernier album d'
Angel Witch! La sortie de ce '
As Above, So Below' tient donc presque de l'événement pour ces pionniers de la NWOBHM. Bon, il faut reconnaître qu'il ne subsiste du line-up d'origine que Kevin Heybourne, le chanteur, guitariste et leader du groupe. Mais en contrepartie, c'est le prestigieux label Rise Above Records (
Ghost,
Electric Wizard, ...) qui couvre la sortie de cet album-comeback. De quoi se réjouir!
Pour ceux qui auraient loupé le coche,
Angel Witch est un des représentants majeurs de la New Wave Of British Of Heavy
Metal, soit la 'Nouvelle vague de heavy metal britannique', abrégée NWOBHM. La NWOBHM est un courant musical qui écuma la Grande-Bretagne dès la fin des années '70, sur lequel ont surfé des groupes aujourd'hui incontournables comme Iron Maiden, Motörhead ou les (plus très) sulfureuses
Girlschool.
Angel Witch s'y tailla une réputation solide en sortant son premier album éponyme en
1980, devenu culte depuis, mais ils ne connurent jamais le succès de leurs compatriotes de la Vierge de Fer. Après deux albums parus discrètement en 1985 et en 1986, la discographie du groupe s'étala mornement de
Lives en compilations plus ou moins dispensables. Jusqu'à aujourd'hui.
Il est intéressant de souligner que cet opus de heavy traditionnel survient alors que le genre vit une seconde jeunesse. À côté des vieux briscards de
Hell, qui eux aussi ont récemment fait leur grand comeback, on observe l'émergence de nombreuses nouvelles têtes plus ou moins talentueuses, gentiment en train de voler la vedette aux mastodontes du power européen, en proposant un son dénué d'artifices, épuré, plus authentique. Je pense à des
In Solitude,
Ghost,
White Wizzard, ou même
The Devil's Blood, pour n'en citer que quelques-uns. Ce climat de retour aux sources était vraisemblablement propice pour enfin extirper
Angel Witch de son silence.
Mais trêve de bavardages, venons-en à la musique, sans s'arrêter sur la superbe pochette. Bien vite, nombreuses craintes s'effaceront, déjà sur les premières mesures de la chanson-phare '
Dead Scrolls Sea'. Tout d'abord
Angel Witch ne s'est pas transformé. Trente ans plus tard, ils servent encore LE
Metal, avec un M majuscule. Traditionnels des pieds à la tête, des compositions à la production, le temps semble s'être arrêté depuis les eighties pour eux. Ces longues années auront été comme une hibernation, on les retrouve là où on les avait laissé (enfin, ceux qui sont assez vieux pour avoir pu le faire), et cette hibernation les a préservés de toute influence moderne néfaste. Cette approche différente, nouvelle mais d'un autre temps en réalité, réserve quelques surprises aux nouvelles générations, car les tempos sont ralentis, bien moins excités que dans le speed/power à la
Stratovarius ou
Sonata Arctica. Ici, c'est vraiment une ambiance totalement différente.
On sera d'autre part ravi de constater que Heybourne a gardé intactes ses capacités vocales d'antan, contrairement à
Bruce Dickinson dont la voix, n'en déplaisent aux fanboys, s'est un peu fragilisée par une carrière beaucoup plus remplie. Heybourne de son côté, dans des registres en général plus graves que le chanteur d'Iron Maiden, contribue à ressusciter le feeling au fond très rock'n'roll de la NWOBHM, en ne s'aventurant pas dans le grotesque. Il préfère une énergie efficace à une quête de beauté à tout prix, ce qui aurait pu se traduire par de ridicules cris suraigus. Cependant, sur certains morceaux, 'Geburah' par exemple, un semblant de monotonie découle de ce manque de prises de risques de la part du chanteur. A moins que ce sentiment naisse de l'habitude des mélodies faciles, que les parties vocales d'Heybourne évitent largement.
Les mélancoliques qui pleurent au bar sur la mort du metal le vendredi soir se frotteront les mains. Plutôt qu'une grandiloquence épique,
Angel Witch emprunte une voie plus primitive (authentique, dirons d'autres). Le contraire eut été étonnant, mais les claviers sont quasi-inexistants, les chœurs ramenés au strict nécessaire, et les solos conservent une contenance toute british, qui permet de les savourer davantage à chaque écoute sans en être écœuré. Les mélodies recèlent même parfois un certain côté inquiétant, comme sur l'ouverture de '
Brainwashed', tandis que le morceau se déroule ensuite avec majesté, s'imposant comme un des meilleurs titres de l'album. Les guitares en général se montrent souvent graves et lourdes, laissant planer le spectre du doom à l'ancienne au-dessus d'elles. En résulte un ton parfois aussi sombre que l'Opus Eponymous de
Ghost, et ça a quelque chose de terriblement séduisant. Mais ne comprenez pas par là qu'
Angel Witch fait maintenant dans l'occulte et le déprimant. C'est traditionnel avant tout, foutrement rock'n'roll, et sait faire preuve de gaieté.
Amateurs de dragons, de chevaliers, de vikings, de batailles, d'orchestres symphoniques, et tutti quanti, passez votre chemin. Grâce à son dépouillement de la vielle école, '
As Above, So Below' s'adresse sans le cacher aux nostalgiques et aux vétérans du heavy traditionnel. Et si les apparences peuvent dessiner un cd trop grave et peu inspiré, sa complexité et sa richesse s'étoffent réellement au fil des écoutes, pour proposer au final ce qui pourra rester comme un des meilleurs albums de l'année.
2012, l'année du grand retour d'
Angel Witch.
Un album correct, meme si ce n'est pas mon préféré
15/20
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