Liste des groupes Metal Alternatif Ardours Anatomy of a Moment

Prudence est mère de sûreté, dit-on... Un adage suivi à la lettre par ce groupe italien cofondé en 2015 par la chanteuse Mariangela Demurtas (Tristania, Moonspell (live), Art Of Departure, ex-Alight...) et le guitariste/bassiste/claviériste et producteur Kris Laurent (The Providence, Cadaveria...), avec le concours du batteur et parolier Tarald Lie (Tristania, ex-Draconian (live)...). C'est donc pierre par pierre que s'échafaude son projet, le groupe ne réalisant son premier et grisant album studio, « Last Place on Earth », que quatre années plus tard, auquel succédera, en 2020, un modeste mais poignant EP de reprises de titres de la scène synthpop et new wave du milieu des années 80. Le temps pour le combo transalpin de peaufiner ses compositions tout comme son travail en studio, et le voici de retour, muni d'un second album full length dénommé « Anatomy of a Moment », que quelque trois années séparent de son laconique devancier. Sorti tout comme ses aînés chez le puissant label italien Frontiers Records, ce nouvel élan demeure-t-il dans la continuité stylistique de ses débuts, une symbiose des deux offrandes, ou une alternative synonyme d'évolution de son projet ?

D'emblée, sa patte metal alternatif harmonisant metal atmosphérique, metal mélodique, rock gothique et sonorités électro pop typées mid-80s se fait sentir. Aussi, le combo harmonise-t-il à nouveau des sources d'influence des plus éclectiques, allant de The Gathering à All About Eve, en passant par Lacuna Coil, Autumn, Moonlight, Dying Passion, The Birthday Massacre, Ultravox et Angelzoom. Un original patchwork dont se nourrissent les 46 fringantes et émoustillantes minutes de la rondelle, qui a pour corolaire une production d'ensemble de fort bonne facture, dont un enregistrement difficile à prendre en défaut et un mixage bien ajusté entre parties vocales et instrumentales. Bénéficiant à leur tour d'arrangements instrumentaux de bon aloi, les 10 pistes de ce second méfait de longue durée seraient-elles en mesure de placer dorénavant nos acolytes parmi les valeurs montantes du metal alternatif à chant féminin ? Un tour du propriétaire s'impose...


A l'instar de leur premier effort, c'est à l'aune de leurs passages les plus enfiévrés que nos acolytes trouveront sans mal les clés pour nous retenir plus que de raison, à commencer par leurs pistes influencées par l'électro gothique ou la synthpop. Ainsi, c'est d'un battement de cils que le refrain catchy jaillissant des entrailles du mid/up tempo « Epitaph for a Spark » happera le tympan. Conjuguant savamment les empreintes de The Birthday Massacre, Angelzoom et Ultravox, et mis en exergue par les chatoyantes inflexions de la sirène, ce tubesque effort metal alternatif à orientation électro gothique ne se quittera qu'à regret. Et ce ne sont guère les vibes enchanteresses insufflées par « Anatomy of a Moment » qui démentiront ce constat. Parsemé de fines gouttelettes synthétiques et suivant une ligne mélodique des plus engageantes, ce grisant up tempo rock'n'metal atmosphérique aux influences électro pop serait, lui aussi, à placer parmi les hits en puissance, que l'on se repasserait volontiers sitôt l'ultime mesure envolée.

Tout aussi pulsionnels mais ayant opté pour de plus authentiques sonorités, à chercher cette fois du côté du rock'n'metal atmosphérique gothique, d'autres passages tirent également leur épingle du jeu. Aussi, le ''lacunacoilesque'' « Identified » n'en recèle-t-il pas moins une énergie aisément communicative ainsi qu'un seyant solo de guitare et des enchaînements intra piste ultra sécurisés. Difficile également de résister à l'envie d'esquisser un headbang bien senti sur « Given », mid/up tempo enjoué et à la mélodie certes convenue mais des plus enveloppantes, que n'auraient renié ni Dying Passion ni Autumn. Dans cette mouvance, pourvu de riffs crochetés, de seyants gimmicks guitaristiques et d'une insoupçonnée et prégnante gradation du corps instrumental, le mid tempo progressif « Unannounced » pourrait à son tour avoir raison des âmes les plus rétives. Mais le magicien aurait encore d'autres tours dans sa manche, et des meilleurs...

Quand le rythme de leurs frappes se fait moins incisif, pour l'essentiel dans une même orientation atmosphérique gothique, nos compères parviennent non moins à nous assigner à résidence. Ce qu'atteste, en premier lieu, le ''lacunacoilesque'' mid tempo syncopé « Insomniac » eu égard à ses couplets finement ciselés relayés chacun d'un refrain immersif à souhait, mis en habits de lumière par les troublantes impulsions de la déesse. Dans une visée ''autumnienne'', le félin « Cold Revenge », lui, joue la carte de la sensualité et de l'extrême délicatesse de ses séries d'accords pour tenter de nous rallier à sa cause. Et la magie opère, là encore. Dans cette dynamique, on n'éludera pas davantage « Secret Worlds », mid tempo rock mélodique gothique au carrefour entre The Gathering et Lacuna Coil, et ce, tant pour son infiltrant cheminement d'harmoniques que pour son vibrant solo de guitare à mi-morceau, sans omettre les charismatiques patines à la coloration bluesy de la princesse.

Dans un dessein électro pop/gothique, les deux plages de cet acabit ne sauraient davantage être esquivées. Ce qu'illustre, d'une part, « Dead Weight », mid tempo syncopé à la confluence d'Angelzoom et Autumn. Interpelant tout d'abord par l'étrangeté de ses clapotis synthétiques, ce gracieux effort ouvre peu à peu ses ailes, laissant alors entrevoir de savoureux couplets encensés par les chatoyantes oscillations de la maîtresse de cérémonie. On pourra toutefois déplorer tant la brièveté que l'inopportun positionnement de l'accélération rythmique, en bout de course, loin d'apporter l'effet escompté sur ce romanesque propos. Non moins lévitant et au regard de son rayonnant paysage de notes, l'organique low tempo progressif « Chasing Whispers » révèle toute la sensibilité de ses harmoniques, moult subtilités mélodiques mais aussi son caractère enjoué.


A l'aune de ce solaire et galvanisant set de compositions, le collectif nous immerge au cœur d'un luxuriant et seyant paysage de notes. Variant à nouveau ses ambiances tout comme ses séquences rythmiques, ce propos combine savamment les éclectiques aspirations stylistiques de la troupe qui, par ailleurs, s'est affranchie de l'empreinte de certaines de ses sources d'influence ; produisant désormais un son qui lui est propre, faisant dès lors cohabiter authenticité et modernité, c'est dire que le groupe a fait évoluer son art. On aurait toutefois souhaité un message musical plus diversifié qu'il n'apparaît quant aux exercices de style investis, ballades et/ou instrumentaux manquant à l'appel.

Bénéficiant néanmoins d'une ingénierie du son rutilante, d'une technicité instrumentale et vocale maîtrisée et de sentes mélodiques que nombre de ses homologues pourraient avoir à lui envier, ce fringant manifeste poussera assurément un tympan déjà familiarisé avec les premières mesures du groupe à une remise en selle dès l'ultime portée évanouie. Bref, une œuvre aussi subtile qu'enjouée, telle une parure de bijoux dans un écrin de satin, susceptible de hisser le combo italien au rang de valeur montante de cet espace metal. Affaire à suivre, donc...