bojart | Succéder à un disque aussi surprenant et original que « Issues » était déjà une gageure en soi, mais domestiquer la célébrité due à trois missiles successifs (Life Is Peachy, Follow the Leader et Issues) vendus (en additionnant les trois) à plus ou moins dix millions d’albums (une époque où accessibilité rimait avec qualité) là, c’était quasi mission impossible ! Et ce qui devait arriver arriva avec la doublette néo brutale lâchée entre 2002 et 2005 (Untouchables et Take a Look in the Mirror); et qui fît doublon ; c’est-à-dire la chute lente vers un son de moins en moins identifiable et la tentative de sauvetage de la part d'Atticus Ross, les ayant entrainé vers un son plus indus avec « See You on the Other Side » et « Untitled ».
Analysons ensemble « Untouchables » …
« Here to Stay », premier single du disque, m’avait donné le vague espoir (et l’espoir vague) d’un groupe passant d’icône du néo métal à nouveaux venus dans le néo brutal…la batterie de David Silveria est pesante, la basse de Fieldy couple sa ligne avec aux riffs brusques et compacts de James « Gorilla » Shaffer et Brian « Head » Welch pour une ambiance lourde et brutale. Jonathan Davis alternant vocaux bestiaux et chants mélodiques tout en privilégiant le brut à la douceur… « Chouette ! » me suis-je dit dans ma douche, trempé. Korn va changer de cap et éviter le ravin de la facilité commerciale dit « d’Alzheimer »…sauf…sauf que…sauf que NON. « Alone I Break », second single, m’avait plu de par sa production indus et son mid-tempo classieux, malgré la monotonie de la chanson où seule la voix veloutée puis forte de Davis animait ce monolithe de paresse (sans parler du filtre vocal qui n’apporte absolument rien) . Un morceau qui m’est devenu insipide depuis. « Thoughtless », et son intro acoustique, est mon titre favori. Le rythme est là, Jonathan assure les vocaux et les guitaristes font rugir leurs grattes… les couplets sont accrocheur grâce à une composition néo brutale pêchue et le pont où la voix de Jon’ s’adoucit sur un air dénudé puis suivit par des cris animaux nous remémorant « Got the Life » (un des hits de « Follow the Leader » ou encore le sauvage « Twist » tiré de « Life Is Peachy ». Un titre comme « Make Believe » est inutile avec sa boîte à rythme côtoyant la batterie, les riffs se voulant puissants mais devenant les seuls éléments musicaux crédibles (sans cela, ce titre n’aurait pas été cité)
« Bottled Up Inside » fait partie des bonnes surprises qui auraient mérités de figurer en singles. Dans la forme, c’est une compo dans laquelle les guitares, les cymbales, les double-pédales et les tambours mènent la danse ! Jonathan Davis jappe de belle manière, son chant étant à la fois inharmonique (vocaux brutaux) et mélodique (vocaux clairs). Les couplets sont menés tambours battants et guitares grondantes, oserais-je dire ! Dans la même veine, « Blame », à la prod au vitriol ! Les timbales résonnent et les cymbales tintillent sous la direction d’un David Silveria survolté ! Le tempo est rapide et la guitare principale tient le premier rôle. L’interprète dévoile un chante allant de la délicatesse à la violence, une alternance qui est la marque de fabrique de Korn dans la sphère du néo métal, où cohabitent Limp Bizkit ou Linkin Park et leur rap-métal décédé depuis longtemps (ces derniers s’étant lancé dans le space rock avec leur dernier bébé « A Thousand Suns », produit par le Métal Hero, Rick Rubin) et Ill Nino, légataire légitime de Korn (dont le prochain album, « Dead New World » sort bientôt) et je cite ces groupes en exemple car je sais qu’il y en a tant d’autres !
Reprenons…
« Embrace », en dépit de son côté néo-brutale extrême, ne m’as pas du tout convaincu. Les chœurs sont bestiaux, oui, mais c’est drôlement brouillon ! On mélange vocaux brutes, riffs déchainés et chant harmonieux, on secoue le tout et on obtient un morceau bordélique… que dire de « One More Time » où l’on recycle la boite à rythme de « Make Believe » et les vocaux de brutes épaisses de « Embrace » afin de remuer tout ça et d’obtenir un son hybride hilarant qu’on sert à l’auditeur alors que c’est le chaos sonore ! Ne parlons même pas du très décevant « No One’s There », introduit par un riff lent et paresseux, pseudo ballade à la noix n’ayant, pour moi, aucune direction musicale claire, à l’écoute on s’y perd ! Reparlons des surprises plaisantes avec le surprenant « Beat It Upright », une réussite en terme de rythmique (lourde) et de sonorités néo-brutal. Le fond est empli de percussions et la forme est envahie de chants hybrides et de riffs farouches ! C’est la guerre ! Sans compter le thème du titre, très explicite (sado-masochisme) le tempo peut paraitre rébarbatif mais au moins ici, il y a un schéma directeur ! Le titre se clos sur un air hip-hop californien : basse ronflante+riff aigu de gratte…
Totale psychose dans « I’m Hiding », autre bonne surprise. C’est une chanson semblant narrer le quotidien d’un malade mental ; en cause les lyrics « Maybe I'm insane Walking on a wire/ Maybe I'm the same/ Nothing to take me higher » (Peut-être suis-je fou/Marchant sur un fil/ Peut-être suis-je le même/ Il n’y a rien pour me faire encore plus planer) Jonathan chantonne cela sur une composition minimaliste faisant appel à Fieldy (basse), James et Brian étant mis à contribution, eux et leurs rutilantes Ibanez, lors du pont musical et du refrain… Un Roméo et Juliette où le protagoniste joue les deux rôles et semble bon pour la camisole !
Un album mi-figue, mi-raisin, un peu batard, mais conservant dans la plupart des ces chansons, ce petit quelque chose identifiant Korn à coup sûr ! Un opus qui n’est pas indispensable mais qui plaira aux amateurs de néo métal et de néo brutal.
Bj 2010-10-07 00:00:00
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